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LE LENDEMAIN de Magnus von Horn : la critique du film

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le_lendemain_afficheMondo-mètre
note 2.5 -5
Carte d’identité :
Nom : Efterskalv
Père : Magnus von Horn
Date de naissance : 2015
Majorité : 01 juin 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : Suède
Taille : 1h41 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de famille : Ulrik Munther, Mats Blomgren, Alexander Nordgren…

Signes particuliers : Un drame nordique pas inintéressant mais maladroit, porté par un jeune comédien brillant et un sujet fort.

LES LENDEMAINS QUI DÉCHANTENT

LA CRITIQUE

Résumé : John, encore adolescent, rentre chez son père après avoir purgé sa peine de prison et aspire à un nouveau départ. Mais la communauté locale n’a ni oublié, ni pardonné son crime. Sa présence attise les pires pulsions chez chacun, l’atmosphère devient menaçante, proche du lynchage. Rejeté par ses anciens amis et abandonné par ses proches, John perd espoir et la violence qui l’a conduit en prison refait peu à peu surface. Dans l’impossibilité d’effacer le passé, il décide d’y faire face.le_lendemain_6L’INTRO :

Les années passent et le cinéma scandinave réussit à toujours maintenir son très haut niveau d’exigence et de qualité. Le « nord » a toujours été une grande terre de cinéma, peut-être méconnue du grand public mais certainement pas des cinéphiles, et il entend exister encore pour très longtemps. Nouveau venu cette année, le suédois Le Lendemain. Un drame torturé, que son auteur présente comme la rencontre de l’esthétique narrative scandinave conjuguée à la puissance émotionnelle du cinéma polonais. Intéressant. Le Lendemain s’attache au portrait d’un adolescent de retour dans sa ville natale après avoir purgé une peine de prison pour le meurtre de sa petite-amie dans un moment de folie passionnelle. John, adolescent portant encore les stigmates de son acte d’horreur, voudrait oublier mais la communauté locale ne l’entend pas de cette oreille. Son retour ne pourra qu’être gravé dans le souvenir, la douleur, le rejet, la haine et la violence. Le Lendemain, premier long-métrage de Magnus von Horn, a été récompensé de trois Oscars en Suède, avant de se distinguer en festivals, de Cannes à Toronto en passant par Rotterdam.le_lendemain_2L’AVIS :

Chronique austère et glaçante décryptant un rejet social sans jamais tomber dans le jugement définitif ni de son anti-héros ni de la société (ce qui aurait probablement nuit à ses intentions), Le Lendemain incarne à la perfection ce croisement entre les cinémas nordique et polonais évoqué par son auteur. Le film de Magnus von Horn est sombre, dur, empruntant au style scandinave ce langage minimaliste et frontal, et au cinéma polonais, cette rhétorique anxiogène et clinique ne jouant jamais directement avec l’émotion de par son constant positionnement distancié. Souvent, cet idéal artistique permet de déclencher des mécanismes nourrissant des œuvres à la froideur puissante. Ce n’est malheureusement pas toujours le cas avec Le Lendemain, drame douloureux qui réussit autant qu’il n’échoue à nous plonger dans son exercice effrayant, en raison d’une progression dramatique mal maîtrisée.le_lendemain_4En découvrant Le Lendemain, on a dans un coin de la tête, le lointain souvenir du germanique Scène de Chasse en Bavière (1969). Ou comment un retour sur ses terres va devoir affronter le poids des préjugés, du regard médisant, glissant progressivement vers l’agressivité avant d’embrasser la tragédie d’un nouveau départ impossible. Magnus von Horn ne manquait pas d’idées pour soutenir les bases motrices de son récit. Éviter le pathos facile, éviter la complaisance, chercher à déployer des nuances de gris au lieu d’asséner des clés narratives figées dans la pierre, ou encore comprendre les différents points de vue en présence au cœur de son récit aux enjeux inextricable… Ainsi, son jeune personnage est toujours rangé dans le trouble, à la fois désireux de repartir du bon pied et dans le même temps, presque asocial et apathique, alors que sa gueule d’ange se mêle à une violence sourde, comme contenue en lui et prête à ressurgir à tout instant. Ce personnage, Magnus von Horn n’en fait jamais la pierre angulaire d’intentions manichéennes, instillant perpétuellement le doute sur sa nature profonde, le rendant ainsi plus authentique, plus nuancé, entre empathie et inquiétude. Le traitement narratif accordé à son film en est ainsi ambitieux mais souffre d’un contrepoids compliqué à mettre en images, en plus de requérir une exigence extrême qu’il ne parvient pas à s’adjoindre pleinement. Car les possibilités d’identification sont limitées dans Le Lendemain. John est-il la victime d’une société incapable de dépasser ses idées préconçues, de régler ses problèmes, et de donner une seconde chance à ses individus en peine, devenant ainsi un souffre-douleur social, ou tout simplement, un monstre à écarter pour préserver un équilibre sociétal ? Sa violence est-elle sa seule parade possible face à l’adversité ou une réelle nature tapie au plus profond de lui ? Et cette communauté est-elle finalement si horrifiante que cela, ou ses réactions ne sont-elles finalement que trop humaines ? Le Lendemain ne donnera jamais de réelles réponses. Un choix audacieux, mais un choix qui empêche aussi le spectateur de s’accrocher à quelque-chose dans un film suffocant, parfois pertinent dans les questions qu’il pose, mais également un peu bancal car esquivant perpétuellement la confrontation à son propos.le_lendemain_1Alors qu’il tente de cristalliser son sujet dans des scènes fortes sur la quête de normalité, la recherche d’une main tendue et l’inacceptation d’un passé trop lourd à digérer, Le Lendemain fait beaucoup de manières, tournant autour de son propos au lieu de s’y confronter avec courage pour mieux gagner le chemin de ce qu’il arbore de plus intéressant. Entre digressions et intrigues périphériques, entre refus de vraiment choisir un angle discursif liant l’œuvre au spectateur, le film de Magnus von Horn se perd peut-être aussi dans son incapacité à bien illustrer son sujet, comme si son auteur ne savait pas lui-même dans quelle direction mener son exercice, préférant de fait, présenter plusieurs facettes différentes au lieu d’en adopter une pour mieux la traiter avec concision. Curieusement, le tort de Magnus von Horn aura peut-être été de vouloir trop se mettre en retrait pour observer un échec social à défaut d’adopter un point de vue pour saisir à vif ce qu’il cherche à nous raconter. Reste néanmoins, un drame qui, de temps à autre, réussit à capter des moments poignants, soumis à des interrogations pertinentes, et un fabuleux comédien à suivre, à la base jeune chanteur à succès suédois.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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