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NOS FRANGINS de Rachid Bouchareb : la critique du film

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Nom : Nos Frangins
Père : Rachid Bouchareb
Majorité : 07 décembre 2022
Type : sortie en salle
Nationalité : France
Taille : 1h32 / Poids : NC
Genre : Drame, Biopic

Livret de Famille : Avec Reda KatebLyna KhoudriRaphaël Personnaz, Samir Guesmi…

Signes particuliers : Un film sincère mais boitillant. 

Synopsis : La nuit du 5 au 6 décembre 1986, Malik Oussekine est mort à la suite d’une intervention de la police, alors que Paris était secoué par des manifestations estudiantines contre une nouvelle réforme de l’éducation. Le ministère de l’intérieur est d’autant plus enclin à étouffer cette affaire, qu’un autre français d’origine algérienne a été tué la même nuit par un officier de police.

 

DEVOIR DE MEMOIRE

NOTRE AVIS SUR NOS FRANGINS

1986, le Gouvernement de François Mitterrand administré par Jacques Chirac lance la réforme Devaquet, un projet de loi du nom du ministre délégué en charge de l’Enseignement Supérieur. L’idée, imposer une forme de sélection à l’entrée de l’université et mettre celles-ci en concurrence. La fronde est gigantesque, les étudiants vent debout, les manifestations houleuses et de grande ampleur. Et au milieu de cette agitation parfois violente, une mort symbolique, celle de Malik Oussekine. Il ne sera pas le seul victime d’une bavure policière dans la nuit du 5 au 6 décembre mais il deviendra en effet un symbole et son nom restera à jamais l’écho d’un martyr des violences policières. Les hautes sphères de l’administration chercheront absolument à étouffer l’affaire, ce qui ne fera qu’envenimer les choses quand elles éclateront au grand jour.
Nos Frangins marque le retour de Rachid Bouchareb à un cinéma plus « sérieux » après la comédie policière Le Flic de Belleville, sa grosse bavure cinématographique portée par Omar Sy. S’il peut se voir comme un biopic historique, Nos Frangins est avant un drame très politisé, mettant en exergue un événement de 1986 tout en laissant venir à lui l’idée que les choses n’ont pas tant changé que ça en 35 ans. La piqûre de rappel est importante. En effet, à travers son hommage sincère et appuyé à Malik Oussekine, Bouchareb entend dénoncer les violences policières teintées de préjugés qui perdurent depuis bien trop d’années. Le cas Oussekine était exemplaire. Parce qu’il était là au milieu des casseurs, parce qu’il semblait chétif et vulnérable, parce qu’il avait une « tête d’arabe », il a été pris pour cible par les voltigeurs (des flics à moto armés de matraques, lâchés dans les rues pour repousser les casseurs). Pris en chasse puis battu à mort et abandonné dans son sang. Sauf que Malik Oussekine passait là par hasard, il ne participait pas aux manifestations, il sortait juste d’un club de jazz voisin dont il était un habitué. La même nuit, Abdel Benyahia fut également assassiné par un policier ivre dans un bar, d’une lapidaire balle dans la tête.
Biopic historique et fable contemporaine à la fois, Nos Frangins évolue comme bien d’autres films du même genre, sur ce procédé consistant à utiliser le passé pour dénoncer le présent. Rachid Bouchareb ne manque aucune occasion d’associer son film aux échos contemporains qui pourraient accompagner son sujet, alors qu’il ne se passe pas deux mois sans qu’une bavure défraie la chronique. C’est toute la démarche de Nos Frangins, film très calme dans l’approche mais puissant dans l’idée, et dont le ton paraît souvent à cheval entre la fiction et le documentaire. C’est peut-être d’ailleurs la limite d’une œuvre qui veut sonner vraie et sans artifice mais qui, par contrecoup, manque parfois d’émotions dans sa pudeur rigide. D’un peu d’émotion et de beaucoup de rythme. Complètement « dé-rythmé », Nos Frangins avance assez laborieusement et c’est peut-être parce qu’il est si lent dans son déroulé, qu’on a le temps de s’arrêter sur les détails, notamment ses tous petits arrangements avec la réalité et la chronologie des événements. Mais quoiqu’il en soit, l’effort reste pertinent et important. Il est important de raconter ou de rappeler qu’il y a 35 ans, on disait « plus jamais ça ». Et trois décennies plus tard, on en est où ?

Par Nicolas Rieux

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