Mondociné

WORLD WAR Z de Marc Forster
Sortie DVD – critique (horreur, catastrophe)

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Spectateurs

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note 7
Carte d’identité :
Nom : World War Z
Père :Marc Forster
Livret de famille : Brad Pitt (Gerry Lane), Mireille Enos (Karen), Elyes Gabel (Fassbach), James Badge Dale (Cpt Speke), Daniella Kertesz (Segen), David Morse (ex agent de la CIA), Fana Mokoena (Thierry)…
Date de naissance : 2013 (sortie le 03 juillet 2013)
Nationalité : États-Unis
Taille/Poids : 1h56 – 200 millions $

Signes particuliers (+) : Un film d’horreur apocalyptique mené comme un thriller intense, réinventant le film de zombie en le croisant avec le cinéma catastrophe en déployant avec maestria et crédibilité la vitesse d’exécution d’une pandémie mondiale amenant à l’effondrement de la civilisation. Visuellement magnifique, haletant, immersif et hautement spectaculaire.

Signes particuliers (-) : Le dernier tiers pâtit des réécritures et du reshoot de la fin en peinant à s’ancrer avec homogénéité dans le reste du métrage. Encore une fois, merci Damon Lindelof.

 

UN Z QUI VEUT DIRE ZOMBIE

Résumé : Sans crier gare alors que les avertissements ont été ignorés ou peu pris au sérieux, une pandémie mondiale frappe la planète. Un virus proche de la rage se répand à vitesse grand V provoquant le chaos et l’effondrement du système sans qu’il puisse être contenu ou contrôler. Gerry Lane, ancien enquêteur pour le compte de l’ONU, part à la recherche du patient zéro pour essayer d’endiguer le phénomène et sauver ce qu’il reste à sauver…

World War Z
L’INTRO :

C’est dans un mélange d’excitation et de crainte que l’on s’est précipité à l’avant-première de World War Z, long-métrage courageux (financièrement parlant) qui essaie de conjuguer le gros blockbuster spectaculaire fortuné et le film de genre avec des zombies déferlant en masse sur la planète totalement démunie face à la précipitations des évènements. Un projet d’horreur apocalyptique adapté d’un livre éponyme de Max Brooks (le fils de Mel) sorti en 2006 et qui ambitionnait de renouveler un peu le genre en essayant de l’aborder sur un angle un peu nouveau, croisant les registres de l’horreur avec celui du catastrophe. Au cinéma, l’idée de s’emparer d’un tel roman-pavé écrit à la force d’exigences scientifiques et s’ouvrant à une lecture géopolitique, avait de quoi susciter une attente non dissimulable chez les fans aussi bien de films de zombies que ceux amateurs de cinéma catastrophe post-apocalyptique, car visuellement, il y avait de quoi faire en y mettant les moyens nécessaires pour illustrer la pandémie mondiale, la panique, l’effondrement des civilisations, le chaos soudain et les efforts mis en œuvre par tout un chacun, à son échelle, pour se protéger. Le roman voyageait d’Amérique en Asie, du Moyen-Orient en Europe, de Russie en Israël, pour déployer une vision globale et mondialisante d’un fléau amenant chaque peuple à réagir pour préserver d’abord sa nation dans un mouvement de réaction d’auto-préservation d’urgence. Clairement, au cinéma, le potentiel était dément mais à n’en pas douter onéreux. Et un peu comme un Je Suis une Légende, World War Z ne pouvait qu’être un gigantesque blockbuster épique mêlant apocalypse, catastrophe, horreur et guerre. La Paramount sera finalement le studio courageux du moment qui acceptera de se lancer dans cette aventure commercialement risquée. Mais rapidement, l’exaltation laissera place à la crainte. Tournage chaotique, rumeurs de réalisateur largué et de brouille avec l’acteur principal/producteur Brad Pitt, fin réécrite et retournée en urgence en faisant appel à un parterre de scénaristes « docteurs », dépassement conséquent du budget (de 125 à 200 millions), retards de production, décalage de la date de sortie de plus d’un an, World War Z s’annonce comme une massive catastrophe candidate à un potentiel monumental échec, issue d’un accouchement douloureux et infernal. Du côté de la Paramount, on essaie d’y croire, le besoin de rentabilité est énorme et la respiration en suspens en attendant la sortie programmée pour le 03 juillet en France.

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Mais voilà, dans ce cauchemar de production, la lumière au bout du tunnel. Les premières critiques affluant des avant-premières américaines sont loin de pointer du doigt le désastre redouté, au contraire. Elles sont même, à la surprise générale, plutôt bonnes et le film reçoit un accueil très honorable. World War Z nous ferait-il une sorte (toutes proportions gardées) d’Apocalypse Now où d’une production houleuse et chaotique, naîtra  un bon film de cinéma ? On l’espère car l’autre crainte, est Marc Forster lui-même, réalisateur qui aime à alterner le pire et le meilleur, déjà responsable de la purge qu’était Quantum of Solace, l’un des pires James Bond de la nouvelle ère où il avait déjà montré des signes d’affaiblissements, dépassé par le cahier des charges, la grève des scénatistes et l’ampleur du projet. Le cinéaste semble plus à l’aise dans un cinéma plus « petit », à sa taille, comme l’a démontré son excellent travail sur le film qui l’a fait connaître, A l’ombre de la haine, ou sur Les Cerfs-Volants de Kaboul. Dans le film plus musclé, il avait démontré aussi de bonnes aptitudes avec la série B Machine Gun Preacher, son dernier film en date.

World War Z

Les premières images issues des bandes-annonces étaient en tout cas séduisantes mais l’on a appris depuis le temps, à se méfier de ces trailer masquant souvent la réalité plus ou moins bonne des produits finis. Mais voilà, il s’avère que, contre toute attente, World War Z est bel et bien une surprise au final presque inattendue. Sauf qu’attention, il y a plusieurs règles à respecter, autant qu’il y en aurait pour espérer survivre en cas d’attaque zombie soudaine. D’abord, il ne faudra pas s’attendre à un déversement de gore hardcore. World War Z est un film d’un nouveau genre, certes film d’horreur à la base, mais avant tout film catastrophe post-apocalyptique à aborder de préférence sous cet angle. PG-13 (par souci de rentabilité nécessaire), le film de Marc Forster ne contentera pas ceux qui s’y précipiteront en espérant assister à une avalanche d’horreur craspec et de sanguinolent. Le film n’est pas un Romero, pas plus qu’il n’est un 28 Semaines plus Tard ou film de genre de cet acabit. WWZ aborde son sujet sous l’angle « catastrophe » avec une pandémie mondiale évoluant à une vitesse ahurissante et les envolées horrifiques sont donc très atténuées. Deuxième point, les puristes du livre risquent d’hurler au scandale s’ils attendent un film se calquant sur la schématique du bouquin. Le film n’en reprend ni la sémantique, ni la structure de fond et évacue toute considération géopolitique pour se concentrer sur le spectacle d’une part, et la quête d’un scientifique cherchant le patient zéro pour endiguer la propagation du virus d’autre part. Même si le film essaie de garder le côté globalisant et mondial de la chose, il ne se dédoublera pas d’une sous-lecture politique comme le faisait brillamment le roman originel, expurgeant ses qualités-là pour s’ancrer sur d’autres, notamment l’impressionnant et l’aspect massif des évènements. Cela étant dit, reste plus qu’à profiter du spectacle et d’un film tiré du livre mais en marge du livre…

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L’AVIS :

Et là, World War Z fait le job bien plus brillamment qu’on ne l’aurait cru. Marc Forster a finalement fait un travail admirable pour nous livrer clé en main, un film visuellement impressionnant, recelant des images d’une beauté à se damner. Les vagues et les mouvements massifs de ces hordes d’humains transformés se jetant sur les populations, tétanisent autant qu’ils ne laissent le souffle coupé devant la maestria bluffante du boulot accompli pour les rendre crédibles. Le spectateur est convié à assister impuissant, à un pur cauchemar catastrophe apocalyptique de masse au souffle épique indéniable alors que le film ne relâche pas un instant la tension qui l’anime dès ses premières minutes. Condensé et resserré sur une durée globalement courte et efficace au vu du sujet ambitieux, World War Z est un petit monument laissant la respiration en apesanteur et la boule au ventre, qui ne perd pas de temps en exposition inutile et fumeuse. L’action prend place dès les premières minutes pour rapidement nous faire entrer le film dans le vif de son sujet qui va s’ingénier à se conduire sur un rythme mené tambour battant avec de très rares baisses ou longueurs. Le foirage en règle qu’on lui prédisait et la réputation peu flatteuse qui le précédait, disparaissent in extenso au profit d’un immense divertissement tendu et ultra-spectaculaire, qui se trahit seulement au détour de quelques petites maladresses d’écriture pointant du doigt les réécritures par d’autres scénaristes. Le film perd légèrement en force dans son dernier quart et dans son final un peu décevant aux antipodes du reste du métrage que l’on doit à Monsieur Damon je-flingue-tout-ce-que-touche Lindelof (après ses tristes exploits sur Prometheus et les derniers Star Trek, il vient abîmer la direction du script du pauvre J. Michael Straczynski) qui s’est chargé de la réécriture post-tournage de la fin originellement prévue donnant lieu à quelque-chose de très différent et peu homogène d’avec le reste du film (même si le film arrive à sauver les meubles en gardant dans cette partie, une certaine puissante stressante). WWZ reste quand même de très haute volée et salvateur par l’ampleur de sa démonstration de force et la crédibilité de son univers recensant les points fondamentaux d’une telle situation : gouvernements dépassés, dans l’incapacité de réagir et de se concerter, système effondré, chaos social, protectionnisme égoïste primaire, ruée vers les supermarchés, fuite, médias réduit au black-out, impossibilité de compter sur qui que soit, survie désespérée… et fin de la civilisation à vitesse grand V.

World-War-Z-trailer

L’attaque initiale en plein Philadelphie avec sa déferlante et la panique qui s’empare de la population, les magnifiques mouvements de masse carnassiers à Jérusalem débordants les fortifications construites, les séquences de suspens remarquablement orchestrées en Corée du Nord, dans un petit building cerné ou un centre de recherche, l’impressionnante séquence aérienne, World War Z est une « bombe » oppressante et nerveuse à défaut d’être un monument de terreur, qui ravira les amateurs de grand spectacle frustrés du sort du cinéma zombie souvent réduit au simple carcan de la série B à budget aléatoirement minimaliste. Effrayant, crédible (mine de rien, le postulat scientifique se tient), brad-pitt-blood-world-war-z-1WWZ est un film immersif qui se vit en apnée, ce que la mise en scène intelligente de Marc Forster renforce grâce à ses variations de plans entre séquences en plans larges pour déployer toute l’ampleur du débordement de l’humanité face aux évènements, et séquences en plans plus resserrés sur les personnages lorsque la mise en scène prend des accents plus intimistes pour nous plonger dans la peur et la tension qui les contraint à se battre dans une course contre la montre haletante. Généreux et dantesque, le divertissement apocalyptique qui se met en branle est d’une efficacité redoutable et même s’il expurge le fond du roman au profit d’un roller coaster primaire, il le fait bien en se drapant dans une ambiance hallucinée suffocante, anxiogène, stressante, le tout au nom d’une intensité qui donne une nouvelle vie au cinéma de « zombie » ironiquement en s’en éloignant. De l’horreur, on vire vers le thriller catastrophe à enquête doublé d’un magistral film catastrophe, du concept même du zombie, on vire plus vers l’infecté par une forme de virus de la rage et même s’il y aura toujours des puristes qui s’évertueront à hurler à la trahison au mythe au lieu de voir là une démarcation en marge du genre, la réalité est que World War Z est une réussite, certes imparfaite, et un gros film d’invasion et de guerre désespérée où les extraterrestres sont remplacés par des malades rageux, où les gouvernements sont dépassés en voyant leurs tentatives de barrage d’urgence pour endiguer la propagation exponentielle échouer, débordés par une maladie se muant en fléau pandémique avec une vitesse faisant d’une victime une horde en quelques secondes. Forster propose un beau spectacle intense et épique, meilleur dans ses deux premiers tiers que dans le dernier, mais si plaisant et bien exécuté qu’il vaut largement le coup d’être vu.

Bande-annonce :

Par Nicolas Rieux

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