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SUNEUNG de Shin Su-won
Critique – en salles (policier, drame)

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283130.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxxMondo-mètre
note 7.5
Nom : Myung wang seong
Mère : Shin Su-won
Livret de famille : David Lee (June), Sung June (Yujin), Kim Kkob-bi (Jung Su-jin), Cho Sung-ha (Park), Sung Ha Jo (vieux détective), Kwon Kim (Han Myung-ho), Kyung-soo Yu (Park Jung-jae), Tae-boo Nam (Choi)…
Date de naissance : 2013
Majorité au : 9 avril 2014
Nationalité : Corée du Sud
Taille : 1h47
Poids : Budget NC

Signes particuliers (+) : Au carrefour du thriller, du policier et du drame, Suneung s’interroge sur un triste fléau emblématique de la volonté excessive de modernité et de réussite de la Corée du Sud actuelle. Aussi bien réussi dans sa partie drame que dans partie thriller policier, cette petite pépite coréenne brille avant tout pour la lucidité de sa critique sociale aiguisée, pointant du doigt avec intelligence les enjeux de ce qu’il dénonce au détour d’un vrai film haletant.

Signes particuliers (-) :  Quelques hésitations balbutiantes notamment quand Shin Su-won longe la lisière du cinéma de genre avec attirance mais sans jamais oser s’y aventurer vraiment.

 

EXAMEN DE PASSAGE

LA CRITIQUE

Résumé : Yujin, élève de terminale promis à un avenir brillant, est retrouvé assassiné. Très rapidement, les soupçons se portent sur June, l’un de ses camarades de classe. Mais en remontant le fil des événements, c’est un univers d’ultra-compétition et de cruauté qui se fait jour au sein de ce lycée d’élite, où la réussite au « Suneung », l’examen final qui conditionne l’entrée des élèves dans les meilleures universités, est une obsession. Pour obtenir la première place, certains sont prêts à tout, et même au pire…suneungL’INTRO :

Second long-métrage de la brillante cinéaste sud-coréenne Shin Su-won, Suneung est une sorte de thriller dramatique jetant un regard plein d’amertume et de colère sur un constat terrifiant et emblématique d’un des visages de la surproductive Corée du Sud moderne. Depuis quelques années, le Pays du Matin Calme se dispute avec le Japon voisin, la triste palme du plus fort taux de suicides chez les adolescents. En cause, un système éducatif recherchant l’excellence mais dissimulant un revers de la médaille trahissant son apparente efficacité. Bien placée pour évoquer le sujet après plus de dix ans d’enseignement universitaire, la réalisatrice du remarqué Passerby et du court-métrage Circle Line (primé à Cannes) s’est muée en pendant du nippon Sono Sion, dont on se souvient de l’accablant Suicide Club, qui abordait un sujet similaire.Capture d’écran 2014-03-31 à 09.41.41L’AVIS :

Pour son deuxième film, Shin Su-won signe une œuvre intéressante, parfois maladroite et pas toujours formellement bien maîtrisée, mais faisant preuve d’un mérite et d’un courage caractérisés, symbolisés par une œuvre en forme de lame critique aiguisée, limée sur une lucidité impressionnante à l’égard de son sujet. Différent et proche à la fois de l’évoqué Suicide Club, les deux œuvres partageant cette manière de relier inquiétude sociale sur le taux de suicide inflationniste et intrigue de genre plus ou moins accentuée, Suneung pousse son sujet vers une fictionalisation peu éloignée d’une réalité alarmante, par le biais d’une enquête criminelle sur le meurtre d’un étudiant retrouvé assassiné dans une forêt attenante à son lycée. La metteur en scène donne quelques clés d’explication sur ce fléau tragique qu’est l’implosion de la jeunesse sud-coréenne actuelle, soumise à une pression exténuante à être ainsi lancée dans une quête obsédante aux résultats se transformant progressivement en compétition acharnée malsaine. Le système éducatif coréen est fait de sorte à ce que seul les « meilleurs » élèves puissent envisager un avenir serein et résolument positif, les autres étant condamnés à des perspectives peu réjouissantes d’instabilité professionnelle, de faibles revenus et d’errements de vie. Cette peur inculquée dès le plus jeune âge tend à produire des machines prêtes à tout pour intégrer et conserver leurs places dans les très sélectives « classes spéciales » préparatoires au fameux Suneung, titre du film renvoyant au concours d’entrée tout aussi sélectif, aux grandes universités.Capture d’écran 2014-03-31 à 09.41.50À mi chemin entre le drame social et le thriller tranchant à la coréenne, Suneung aborde ainsi de manière pessimiste et acerbe, le traitement réservé à la jeunesse de son pays, façonnée à cet esprit de compétition redoutable au point de perdre repères, clairvoyance et limites. Aussi bien réussi dans son angle de thriller haletant à enquête que dans son visage de drame social livrant une peinture effrayante de la compétitivité forcée poussant la jeune génération à bout et au bord d’un précipice près duquel la pression se fait main prête à pousser dans le vide, cette âpre critique du modèle éducatif coréen est une angoisse saisissante et oppressante nous faisant partager ce poids terrible reposant sur les jeunes épaules de ces étudiants soumis à une forme d’écrasement étouffant. Une atmosphère suffocante bien retranscrite par un film passionnant de bout en bout et porté au passage par une brochette de brillants jeunes comédiens. Ce portrait engagé ne manque pas d’intelligence dans les motifs et paraboles qu’il convoque pour offrir une richesse qui dépasse de loin sa seule première lecture.121245.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxxMalgré quelques hésitations rhétoriques, notamment dans l’ancrage à un ton revendiqué (Shin Su-won longeant la lisière du cinéma de genre sans jamais trop oser s’y aventurer, poussant volontairement à l’extrême son postulat pour mieux en faire ressortir l’essence du discours tout en s’efforçant de conserver un fond attaché au crédible) Suneung est une œuvre forte et poignante à l’acuité dévastatrice, témoignant par la même occasion, si besoin était encore, de l’incroyable diversité du cinéma sud-coréen, capable d’œuvres d’auteur magistrales, de thriller hard boiled implacables, comme d’un cinéma mainstream époustouflant. Et quand il entremêle tout ça comme peut le faire un Suneung, il prouve toute sa grandeur et sa force malgré les imperfections éventuelles.

Bande-annonce :

Par Nicolas Rieux

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