Nom : Bird
Mère : Andrea Arnold
Date de naissance : 1er janvier 2025
Type : sortie en salles
Nationalité : Angleterre
Taille : 1h58 / Poids : NC
Genre : Drame
Livret de Famille : Barry Keoghan, Franz Rogowski, Nykiya Adams…
Signes particuliers : Tout le talent d’Andrea Arnold.
Synopsis : À 12 ans, Bailey vit avec son frère Hunter et son père Bug, qui les élève seul dans un squat au nord du Kent. Bug n’a pas beaucoup de temps à leur consacrer et Bailey, qui approche de la puberté, cherche de l’attention et de l’aventure ailleurs.
UNE ENFANCE QUI S’ENVOLE
NOTRE AVIS SUR BIRD
L’impatience était forte à l’annonce de la présence d’Andrea Arnold en compétition officielle à Cannes, elle qui y a déjà remporté à trois reprises le Prix du Jury. La cinéaste britannique avait même une bonne tête de favorite pour une première Palme, forte de précédentes réalisations marquantes, de son très loachien Fish Tank à sa radiographie d’une Amérique socialement fracturée dans American Honey. Arnold, qui aime les portraits d’adolescentes qui se cherchent dans l’adversité du monde des exclus, reste dans la continuité de son travail avec Bird, son cinquième long-métrage. Elle y suit les pas de Bailey, une gamine de 12 ans qui tente de mener sa vie au milieu d’un contexte social difficile et d’une famille éclatée. Contrainte d’en supporter plus que son jeune âge ne le devrait, elle essaie de se centrer dans un chaos ambiant.
Avec Bird, Andrea Arnold fait du Andrea Arnold. La réalisatrice livre un drame social au style réaliste et à la mise en scène épurée, avec juste quelques touches d’onirisme pour conférer un peu de poésie au portrait rugueux proposé. Et comme souvent, on se laisse embarquer par la puissance qui se dégage du regard brut et du relief abrupte. La cinéaste plante vite son décor. Violence sociale, pauvreté crasseuse, famille explosée… Au milieu, Bailey, 12 ans (mais qui en paraît 16), s’accroche. Malgré un domicile qui ressemble à un squat, malgré un grand frère ingérable, malgré des petites sœurs à charge, malgré une mère qui s’est tirée avec un connard brutal, malgré un père déglingué, toxico et immature prêt à se marier avec une femme qu’il connaît à peine et qui cherche à faire fortune avec les soi-disantes propriétés hallucinogènes de la bave de crapaud… Et dans son aventure contre la dureté d’une vie qui n’en serait pas une pour bien des gens, la rebelle Bailey va rencontrer Bird, un jeune homme étrange qui va pousser le film à tutoyer le fantastique.
S’envoler et fuir un quotidien trop noir pour être acceptable, telle est la portée métaphorique du parcours de Bailey, une nouvelle jeune figure marquante du cinéma d’Andrea Arnold. La metteur en scène poursuit son travail sur les laissés-pour-compte et si sa vision ultra-réaliste est toujours le cadre de son portrait, elle y injecte un onirisme qui permet à Bird d’éviter la redite par rapport à ses précédents travaux en lui conférant une originalité nouvelle. Cette touche de fantastique poétique qui fait réellement décoller le film, le sort du drame anxiogène qui est pourtant sa base, pour l’emmener sur les traces du conte social célébrant la force d’une jeunesse sauvage et résiliente qui rêve encore plus fort quand elle semble condamnée.
Percutant par son style, dynamité par sa B.O électrisante et vibrant d’émotions déchirantes, Bird est une fable naturaliste débordant de vie, de rage et d’amour. Une histoire en équilibre entre la crudité d’un réel glauque et la lumière d’une parenthèse relationnelle hors du monde entre deux marginaux. Il en restera éternellement des visages fascinants, de la jeune Nikiya Adams qui incarne avec force, justesse et conviction cette Bailey battante au magique Franz Rogowski, l’oiseau lunaire du film qui déambule en jupons, en passant par un Barry Keoghan une nouvelle fois impressionnant en très jeune père aimant mais totalement à la ramasse. Bien qu’un peu inégal dans son ensemble, Bird est un geste de cinéma assez époustouflant.
Par Nicolas Rieux