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LIFE OF CHUCK de Mike Flanagan : la critique du film

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Nom : Life of Chuck
Père : Mike Flanagan
Date de naissance : 11 juin 2025
Type : sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h51 / Poids : NC
Genre : Drame, SF

Livret de Famille : Tom HiddlestonMark HamillChiwetel Ejiofor, Karen Gillan, Jacob Tremblay, Matthew Lillard, Carl Lumbly, Mia Sara…

Signes particuliers : Un classique instantané !

Synopsis : La vie extraordinaire d’un homme ordinaire racontée en trois chapitres. Merci Chuck !

MIKE FLANAGAN SUBLIME STEPHEN KING

NOTRE AVIS SUR LIFE OF CHUCK

Même s’il a parfois égratigné son indéniable talent dans des productions indignes de celui-ci (le médiocre Ouija 2), Mike Flanagan conserve tout de même une belle côte auprès des cinéphiles et chacun de ses nouveaux projets est attendu avec une impatience stimulée. A plus forte raison quand le cinéaste s’attelle à l’adaptation d’une nouvelle méconnue de Stephen King, l’une de ses plus poétiques, l’une de ses plus difficiles à adapter aussi. Primé à Toronto, Life of Chuck raconte la vie extraordinaire d’un mystérieux inconnu dénommé Chuck Krantz, que la société tient à remercier chaleureusement pour ses « 39 superbes années ». Après Jessie ou Doctor Sleep et en attendant La Tour Sombre, Flanagan poursuit son exploration du riche imaginaire de Stephen King en se frottant à une nouvelle complexe et de surcroît éloignée de l’épouvante dont l’auteur est l’un des chantres littéraires. Le résultat emporte tout sur son passage…
Life of Chuck est un long métrage aussi étrange que magnifique, de ces œuvres dont on tombe éperdument amoureux sans trop saisir pourquoi elles nous fascinent autant sur l’instant. Comme une énigme cinématographique qui renferme bien des secrets que l’on a instantanément envie de percer en la regardant encore et encore, car un seul visionnage ne sera jamais suffisant pour en admirer tous les éclats et les reflets. Mike Flanagan nous happe dans une fresque en trois chapitres imaginée comme un vaste puzzle autour de ce mystérieux Chuck Krantz que personne ne connaît mais que l’on célèbre à la hauteur de ce qu’il semble mériter. Trois chapitres en ordre décroissant, trois époques, trois styles, trois tons, trois univers. Il y a d’abord le film apocalyptique hypnotisant et intensément angoissant où l’on assiste à la fin du monde qui s’effondre sous les yeux désabusés de quelques personnages mélancoliques et résignés. Puis on passe à une célébration de la vie autour d’un moment de grâce musical et dansé. Un long passage festif et grisant où le cœur se retrouve en rythme avec les mouvements de batterie et la chorégraphie spectaculaire d’un instant hors du temps, dans une rue. Et enfin, on pénètre en profondeur dans la fable dramatique avec le parcours initiatique d’une enfance baignée de tragédie et de lumière. D’un bout à l’autre, Life of Chuck change de visage, virevolte entre les genres, avec une seule et même ligne de continuité. Alors que l’on sent le poids d’un monde qui collapse, Mike Flanagan célèbre la beauté de la vie dans un conte existentiel d’une splendeur exceptionnelle. Il se dégage constamment une forme de merveilleux dans la tristesse de cette réflexion méditative sur l’existence, sur le monde qui court à sa perte, sur la peur de l’oubli, sur l’angoisse de la solitude. Tour à tour à la fois effrayant et doux, Life of Chuck est un chef d’œuvre philosophique invoquant ces grandes pièces de cinéma où l’on rit, où l’on pleure, où l’on tremble, où l’on admire, où l’on pense, où l’on est fasciné par plus grand que soi.
Mike Flanagan retravaille légèrement le roman court de Stephen King tout en en gardant l’essence et la construction, pour en tirer une œuvre époustouflante, un grand voyage à interprétations multiples où l’on se fait aspirer par quelque chose qui nous domine. Tout convergeait pour en faire un film d’une tristesse insondable, mais le cinéaste sèche les larmes par l’éloge. La vie peut être courte ou longue, stoppée brutalement ou étirée jusqu’au dernier souffle, elle est rythmée par des moments de magie, des élans qui font battre les cœurs et enivrent les âmes. Poétique, Life of Chuck puise son cœur dans l’illustration d’un célèbre poème existentiel de Walt Whitman, Chanson de moi-même, qui revient inlassablement comme un mantra philosophique. « Le passé et le présent se fanent – je les ai remplis, je les ai vidés. Et m’apprête à remplir mon prochain repli de l’avenir […] Suis-je en contradiction avec moi-même ? Alors c’est parfait, je me contredis. Je suis vaste, je contiens des multitudes. » Toute la complexité du monde, et de nous-mêmes dans ce monde, réside là. Nous ne sommes pas un simple résumé de nos vies, nous sommes des multitudes. Dans son cheminement, Life of Chuck part de l’infiniment grand pour se réduire subtilement à l’infiniment petit. Nous, dans ce vaste monde.

De Walt Whitman à la théorie du calendrier cosmique, Life of Chuck aurait pu déraper et sombrer dans le chaos d’une œuvre intello pompeuse. Il n’en sera jamais rien. Mike Flanagan livre un film animé d’une vitalité incroyable, comme une ballade lumineuse qui délivre une façon de voir le monde autrement, tout en savourant de grands moments de cinéma éclatants. Car au-delà d’un fond d’une richesse mirifique, formellement, il y a plus de cinéma dans chaque seconde du film que dans une année de blockbusters hollywoodiens réunis. Life of Chuck parle souvent des étoiles, « la plus belle équation de l’univers » dixit un personnage. Comme une constellation majestueuse, elles s’alignent toutes ici pour faire d’un simple film, un moment hors du temps. D’un auteur de génie qui a livré une nouvelle parmi ses plus grands écrits à un cinéaste qui l’a parfaitement comprise et restituée en passant par des comédiens au sommet de leur art, de Chiwetel Ejiofor à Jacob Tremblay, de Mark Hamill à Carl Lumbly en passant par un immense Tom Hiddleston. Bouleversante allégorie où le passé, le présent et le futur se mélangent dans une grande musique infinie, Life of Chuck emporte tout sur son passage. Quelle œuvre ! Quel chef-d’œuvre !

 

Par Nicolas Rieux

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