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GRAND TOUR de Miguel Gomes : la critique du film

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Nom : Grand Tour
Père : Miguel Gomes
Date de naissance : 27 novembre 2024
Type : sortie en salles
Nationalité : Portugal, France, Italie
Taille : 2h08 / Poids : NC
Genre : Drame, Comédie, Aventure

Livret de Famille : Gonçalo Waddington, Crista Alfaiate, Teresa Madruga

Signes particuliers : Un geste de cinéma rare et audacieux.

Synopsis : Rangoon, Birmanie, 1918. Edward, fonctionnaire de l’Empire britannique, s’enfuit le jour où il devait épouser sa fiancée, Molly. Déterminée à se marier, Molly part à la recherche d’Edward et suit les traces de son Grand Tour à travers l’Asie.

 

CAVALE(S) AUX QUATRE COINS DE L’ASIE

NOTRE AVIS SUR GRAND TOUR

Prix de la mise en scène assez inattendu au festival de Cannes, Grand Tour est le sixième long-métrage du réalisateur portugais Miguel Gomes (Tabou). Le cinéaste y filme un rocambolesque double-parcours à travers l’Extrême-Orient, celui d’Edward, un diplomate qui fuit à l’arrivée de sa fiancée qu’il est censé épouser, et celui de Molly, ladite fiancée qui le pourchasse à travers le continent. Tout commence dans la Birmanie de 1917 et va se poursuivre du Vietnam au Japon en passant par l’ancienne Thaïlande, les Philippines ou Singapour.

Quel bien curieux film que signe là Miguel Gomes. Entre le drame, la romance désenchantée, le film d’aventure, l’œuvre expérimentale, le road trip et la comédie, Grand Tour est une sorte de douce folie ubuesque, comme habitée par une fièvre délirante qui contamine tant l’histoire que les personnages ou la mise en scène. Miguel Gomes nous entraîne dans un grand voyage ethnologique où un jeu du chat de la souris est l’occasion de traverser des cultures, des coutumes, des peuples, des réflexions et des visions sur le monde. Si dans un premier temps le film laisse perplexe (voire redouter un possible long emmerdement), Miguel Gomes finit par nous emporter dans sa valse effervescente balancée entre amusement et poésie. Car s’il y a bien une chose que Grand Tour n’a pas volé, c’est bien son prix de la mise en scène. Il aurait pu aller au vertigineux Megalopolis de Coppola, à l’endiablé Emilia Perez de Jacques Audiard ou au grandiose Les Graines du Figuier Sauvage de Mohammad Rasoulouf, tous brillant dans leurs réalisations inspirées. En récompensant Grand Tour, le jury cannois a fait le choix de sacrer la beauté, la différence, l‘originalité folle. Tour à tour en noir et blanc ou en couleurs, épuré ou picaresque, classique ou expérimental, en studio ou en extérieur, avec une voix off d’homme ou de femme, Grand Tour est une leçon de mise en scène libre, décalée, généreuse, qui assume son esthétique singulière et diversifiée.

De somptueuses images de cinéma se croisent et s’entrechoquent dans ce maelström sonore et visuel construit en deux temps, d’abord le voyage du futur époux fuyard puis ensuite le périple de la future mariée tenace. On pense à la Nouvelle Vague de Godard et les autres, aux profondeurs d’Apocalypse Now, à l’esthétique de l’expressionnisme allemand, au cinéma de Werner Herzog… Pourquoi ? Parfois pour des détails, parfois pour des traits affirmés, parfois pour des sensations ou des souvenirs cinéphiles.

Œuvre composite qui peut ennuyer dans un premier temps ceux qui resteront sur le carreau avant de fasciner par sa richesse narrative et formelle (la seconde partie étant meilleure que la première), Grand Tour est assurément un film marquant, qu’il est impossible de foncièrement rejeter ou détester. Miguel Gomes signe un coup d’éclat à la fois radical et délicieusement grisant, qui nous entraîne follement dans son mouvement fantaisiste à travers l’Asie.

 

 

Par Nicolas Rieux

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