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THE ABCs OF DEATH (critique – horreur)

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abcofdeathMondo-mètre :
note 6.5
Carte d’identité :
Nom : The ABCs of Death
Père(s) – non exhaustif : Nacho Vigalondo, Angela Bettis, Andrew Traucki, Jorge Michel Grau, Jake West, Ben Wheatley, Adam Wingard, Ti West, Bruno Forzani/Hélène Cattet, Jason Eisener, Xavier Gens, N. Iguchi…
Livret de famille : nombreux
Date de naissance : 2012 / Nationalité : USA
Taille/Poids : 2h09 – 5000 $ / segment

Signes particuliers (+) : Une grande diversité de tons, de styles, d’ambiances, de genres, d’esthétiques, de nationalités. Un projet visitant le cinéma d’horreur en général et de bonne facture dans l’ensemble. Les segments sont généralement courts et efficaces, pas le temps de s’ennuyer. Certains sont brillants et imaginatifs.

Signes particuliers (-) : Des inégalités entre les sketches, certains étant très mauvais. Tous les auteurs n’ont pas eu l’inspiration, la créativité ou l’envie.

 

AVOIR L’ALPHABET EN HORREUR

Résumé : Compilation de 26 histoires ou saynètes donnant chacune une vision de la mort à partir d’une lettre de l’alphabet et d’un mot correspondant…

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The ABC’s of Death est probablement le projet horrifique le plus surprenant du moment voire depuis longtemps tant dans son idée et sa conception que dans sa forme et sa construction. C’est surtout une entreprise très casse-gueule puisqu’il s’agit d’une ambitieuse anthologie de l’horreur, plus précisément d’un abécédaire horrifique casse-tête. Commençons par l’idée déjà. L’alphabet est composé de 26 lettres, ça, tout le monde le sait. The ABC’s of Death propose donc une série de courts segments prenant chacun une lettre de l’alphabet et tous réalisés par des cinéastes différents et de divers horizons. Un film mis en scène aux quatre coins du monde en somme. Chaque réalisateur va donc se retrouver avec une lettre au hasard et va devoir créer, dans un temps maximum imparti et pour un budget riquiqui de 5000 $, une petite histoire, saynète ou illustration autour de la « mort ». Et le film au final d’être l’assemblage de ces 26 visions mises bout à bout, dans l’ordre, pour proposer un travail très diversifié sur la thématique en question. Précision importante, un appel à concours a même été organisé par les instigateurs de l’affaire de sorte à ce que même le public puisse participer au projet. De total inconnus pouvaient donc envoyer leur travail et le meilleur d’entre eux allait gagner sa place dans l’anthologie incroyable des ABC’s of Death aux côtés des prestigieux metteurs en scène présents à bord. C’est un certain Lee Hardcastle qui remportera le concours avec son magnifique segment en pâte à modeler animé image par image.

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On connaît tous très bien la problématique des films à sketchs. La faiblesse des moins bons segment tire généralement les meilleurs films vers le « moyen » même si un ou deux segments sont très bons. La question ne se posera pourtant pas sur The ABC’s of Death et c’est probablement ça qui le rend finalement plutôt convaincant. Car contrairement à ses oncrères du genre, l’anthologie ici en question ne propose pas seulement 3 ou 4 courts ou moyen-métrages mais 26, tous d’une durée au final très courte. Un segment est plus faible, aucune importance, deux ou trois minutes plus tard, on est déjà sur autre chose, une autre histoire, un autre univers, un autre réalisateur. Du coup, The ABC’s of Death passe vite, sur un rythme endiablé qui ne nous laisse pas le temps de nous ennuyer et c’est non sans une certaine délectation, que l’on jongle entre les univers, les styles, les histoires, tout cela animé avec comme seul moteur commun, une vision de la mort originale.

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Le projet était pharaonique. Réunir 26 réalisateurs, si possible un maximum de « noms » connus des fans d’horreur, tourner aux quatre coins du monde, enchaîner 26 histoires ou saynètes différentes, tout en gardant une certaine forme de cohérence… Le pari était osé de la part de la firme Drafthouse Films qui produit l’affaire. Et pourtant, ils l’ont fait ! Et les noms qui défilent de sketch en sketch sont bel et bien prestigieux. Bien sûr, pas de Wes Craven de Carpenter ou d’Argento comme du côté des Masters of Horror mais quand même, la liste est excitante. Jugez un peu : Nacho Vigalondo (l’excellent Timecrimes), l’actrice Angela Bettis (la magnifique May de Lucky McKee), Andrew Traucki (réalisateur déjà dans l’anthologie V/H/S), l’ibérique Jorge Michel Grau, Jake West (Doghouse), Ben Wheatley (Kill List), Adam Wingard (lui aussi était de V/H/S), Ti West (House of the Devil, The Innkeepers), Bruno Forzani et Hélène Cattet (Amer), Jason Eisener (Hobo with a Shotgun), ou encore Xavier Gens (Frontière) ou Noburo Iguchi (très productif réal japonais de films d’horreur et pour adultes)… Bref, ils sont 26 donc, voire un peu plus puisque l’on compte quelques duos réalisant en tandem et surtout, ils ont une entière liberté artistique sur leur courtes histoires, aucune limite, aucune condition, aucune restriction… aucune censure en gros !

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Alors forcément, on ne pouvait pas décemment s’attendre à ce que les 26 segments soient d’un niveau égal. On ne vous le cachera pas, il y en a des géniaux, des moins bons et des mauvais, comme dans toute anthologie. Sauf que la rapidité d’exécution et du rythme nous permet de naviguer à une telle vitesse de sketches en sketches que tout s’auto-compense dans au final, un film plutôt réjouissant et positif. De même, autre différence à noter dans le contenu, certains « épisodes » proposent une véritable histoire, courtement traitée, alors que d’autres relèvent plus de saynète ou du « morceau » d’histoire sans début, milieu ni fin. Certains sont incongrus, voire abscons, d’autres finement ficelés en un temps pourtant minimum, certains sont narrativement ou stylistiquement ambitieux là où d’autres sont assez succincts limite expéditifs. Certains sont classiques, d’autres de vrais ovni, certains sont sérieux, d’autres déjantés, certains sages et d’autres très trash. C’est ça The ABC’s of Death, un projet extrêmement hétéroclite.

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Bon, mais concrètement ? Concrètement, il y e a pour tous les goûts. Du gore, de la comédie noire, du barré, de l’animation, du déviant hardcore voire même du malsain, du stylisé, de l’expérimental, du sadique, du très cul etc… Difficile de juger, difficile de dire que tel segment est meilleur qu’un autre tant tous les univers possibles sont représentés dans un film où les préférences se feront selon les affinités de tout un chacun. Impossible aussi de vous le présenter un à un, il y en trop pour cela. Mais rien ne nous empêche de vous en donner un compte rendu qui n’engagera que nous.

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Au rayon des saynètes très positives, notre attention aura été captée par plusieurs cinéastes. Nacho Vigalondo pour commencer, en charge de l’ouverture avec le « A ». L’espagnol a choisi le mot « apocalypse » et montre une femme massacrer soudainement et violemment son mari dans son lit. Les segments « B » et « C » (respectivement d’Adrian Bogliano et Ernesto Espinoza) également de sympathique tenue, formant un bon trio pour commencer, surtout le « C » autour du mot « cycle » avec une histoire proche du Timecrimes de Vigalondo. Le « D » est un essai esthétique entièrement au ralenti et de toute beauté, le « E » selon A. Bettis une saynète mi-décalé mi-cronenbergienne mettant un homme aux prises avec une araignée. La qualité redescend alors d’un cran mais quelques autres lettres vont régulièrement se faire remarquer. Le « K », par exemple, illustré par Anders Morgenthaler est un beau moment comique en dessin-animé où une femme se débat dans des WC avec une crotte récalcitrante. Le « N » aussi, du thaïlandais Banjong Pisanthanakun, une petite comédie noire grinçante autour de l’infidélité. On retiendra aussi le très bon « Q », jouissive mise en abîme du projet par Adam Wingard qui se met en scène dans une saynète comique, ne sachant pas comment prendre sa mission artistique avant d’avoir une idée et l’excellent « T » du jeunot amateur Lee Hardcastle, une histoire comico-gore en pâte à modeler. Ben Wheatley avec son « U » montre la mise à mort d’un vampire traqué en vue subjective alors que Kaare Andrews (un auteur de comics) s’essaie à la SF ambitieuse aux superbes effets spéciaux vu le budget alloué, avec un segment qui pourrait faire un jour l’objet d’un film à lui-seul ! Avec son « X », Xavier Gens fait dans le XXL avec une histoire aussi sordide qu’insoutenable mais intéressante de sens, tournée à Paris. Plus moyen mais distrayant, un petit mot sur le « S » de Jake West, un segment très grindhouse dans l’âme façon Bitch Slap brutalement réorienté et ancré dans la tragique réalité façon Sucker Punch de Zack Snyder.

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Au rayon des faiblesses, on aura noté les segments « G » d’Andrew Traucki (une noyade en vue subjective sans grande explication) et « H » de Thomas Malling avec ses chiens « humanoïdes » (une chatte nazie et un chien allié) pendant la deuxième guerre mondiale, un grand moment d’incongruité bien barré mais vite fatigant. Difficile également d’avoir une opinion sur le poétiquement scatologique segment « F » d’Iguchi avec son histoire de pet ou sur le « O » du duo Cattet/Forzani qui s’amuse à faire de l’expérimental sans se fouler, reprenant leur travail sur le magnifique giallo Amer. Le « P » de Simon Rumley fait entrer le drame dans l’entreprise et ne convainc guère alors que le « R » du serbe Srdjan Spasojevic (coupable de l’atrocement gratuit A Serbian Film) est certes très stylisé mais peu compréhensible. Le « Y » de Jason Eisener est également assez moyen et le « Z » du japonais Yoshihiro Nishimura peut-être un peu trop barré, mélangeant délirant, nudité et deuxième guerre mondiale. Idem pour le rigolo « W » de Jon Schnepp sur le mot « WTF » qui, comme son titre l’indique, est un grand n’importe quoi où l’on a envie de hurler « what the fuck ?! ».

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On aura volontairement écarté certains segments, globalement bons mais qui méritaient un mot à part. ce sont les segments les plus « déviants » dont l’insoutenabilité pourra irriter voire choquer. Liberté artistique disaient les créateurs du projet… On notera donc les chocs « I » de Jorge Michel Grau et sa femme agonisant torturée par un homme dans une baignoire ou le « M » de Ti West, une femme devant ses toilettes et l’horreur qui se dessine. West parle de bel et bien mort mais par un sujet sérieux dont on va prendre l’ampleur de l’abominable en pleine figure. Mais la palme du tordu malsain revient incontestablement à l’asiatique Timo Tjahjanto (que l’on retrouvera sur V/H/S 2, ça promet). Un concours est organisé, deux hommes attachés à une chaise, et l’épreuve commence : la masturbation. Le premier qui jouit l’emporte et sauve sa vie alors que son adversaire est tué. Les sujets d’excitation défilent… Une belle femme d’abord avec que l’horreur ne fasse son apparition, un enfant sexuellement abusé, un cadavre etc… Timo Tjahjanto essaie de tempérer avec un peu d’humour ironique mais son segment est quand même douloureux au regard, même si bon dans la forme.

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The ABC’s of Death était donc une ambitieuse tentative qui nous surprend par sa diversité de ton. Certains cinéastes auront eu l’inspiration, d’autres non. Certains auront pris la chose à cœur avec sérieux, d’autres avec un détachement un peu trop désinvolte. Certains se seront creuser la tête alors que d’autres auront expédiés le boulot vite fait pas toujours bien fait. Il y a du bon et du moins bon dans cette anthologie, du à boire et à manger va t-on dire. Le mieux est de prendre l’œuvre dans son ensemble et d’en dire que The ABC’s of Death est une entreprise ambitieuse mais intéressante malgré ses faiblesses. Des segments nuls, oui, il y en a mais ils sont anecdotiques finalement dans le lot de 26 histoires narrées. 26 histoires, 26 tons, 26 styles, 26 ambiances. The ABC’s of Death est un divertissement horrifique assez passionnant, une sorte de voyage dans le cinéma d’horreur en général nous faisant visiter tous les genres, sous-genres et registres. Un peu long (2h10), il est quand même une tentative courageuse avec ses pics et ses baisses qualitatifs. Dans tous les cas, on ne peut que le conseiller aux mordus d’horreur car dans sa globalité, vous serez sûrement séduit par quelque-chose.

Bande-annonce :

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