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REVOIR PARIS d’Alice Winocour : la critique du film

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Nom : Revoir Paris
Mère : Alice Winocour
Date de naissance : 2021
Majorité : 07 septembre 2022
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h45 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de Famille : Virginie EfiraBenoît MagimelGrégoire Colin

Signes particuliers : Un drame poignant et passionnant dessiné autour d’un sujet pourtant très sensible. 

Synopsis : A Paris, Mia est prise dans un attentat dans une brasserie. Trois mois plus tard, alors qu’elle n’a toujours pas réussi à reprendre le cours de sa vie et qu’elle ne se rappelle de l’évènement que par bribes, Mia décide d’enquêter dans sa mémoire pour retrouver le chemin d’un bonheur possible.

VIRGINIE EFIRA FACE A L’HORREUR DES ATTENTATS

NOTRE AVIS SUR REVOIR PARIS

Novembre, Revoir Paris. Deux salles, deux ambiances, mais un même événement mis en scène. Il lui aura fallu un peu de temps pour digérer le traumatisme mais l’heure semble venue. Sept ans après les terribles attentats qui ont ensanglanté la capitale, le cinéma français commence à travailler le sujet (le cinéma américain aime faire les choses à chaud quand le cinéma hexagonal a besoin de plus de recul). Témoins, deux films qui sortent à peu d’intervalle l’un de l’autre. D’un côté, l’excellent Novembrede Cédric Jimenez qui approche la question sur le ton du thriller et sous l’angle de l’enquête qui a mobilisé des centaines de personnes. De l’autre, le plus intimiste Revoir Paris d’Alice Winocour qui s’oriente vers le drame et travaille la délicate thématique des victimes piégées dans leur traumatisme. Au final, deux œuvres radicalement différentes mais quelque part assez complémentaires.
On ne doutait pas de la capacité d’Alice Winocour à nous prendre à la gorge et à émouvoir. Le sujet vendait de lui-même une grosse charge d’émotions à prévoir. La seule réserve étant de voir la cinéaste tomber, soit dans le misérabilisme impudique, soit dans une forme de retenue par crainte de mal faire face à un sujet trop épineux. Deux écueils que Winocour a su esquiver. La cinéaste nous avait laissé sur une forte impression avec son magnifique Proxima, drame déjà intimiste enroulé autour de l’univers du film spatial. Un film puissant qui avait su faire oublier le désastreux Marylandqui l’avait précédé. Un film qui résonne surtout à la découverte de Revoir Paris. Alice Winocour s’affirme comme une metteur en scène talentueuse dès il s’agit de filmer les blessures intimes engendrant de l’angoisse intérieure.
Avec Revoir Paris, Alice Winocour saisit le portrait d’une reconstruction, celle d’une femme qui s’était retrouvé « par hasard » dans un restaurant pris d’assaut un soir de 13 novembre 2015. Alors qu’elle attend que la pluie se calme dehors, Mia observe les clients du lieu où elle s’est posée. Le bal des serveurs submergés par l’affluence, un anniversaire, des touristes enjoué(e)s, des couples qui dînent paisiblement. Puis le fracas des balles, les vitres qui éclatent, les hurlements, le sang, la mort et… le trou noir. Passée l’horreur qui reste gravée en elle et sur elle comme en témoigne cette cicatrice sur l’abdomen, Mia a tout oublié. Cette absence due au choc post-traumatique va l’empêcher d’avancer. Comment continuer sa vie quand il nous manque deux heures où l’on sait avoir vécu le pire sans pouvoir s’en souvenir ? Comment continuer sa vie quand on ne se souvient pas ce que l’on a fait, avec qui l’on était, comment on a survécu là où tant d’autres sont tombés à jamais.

C’est avec beaucoup de subtilité, de sensibilité et de pudeur composée que Winocour va filmer le cheminement de sa Mia cherchant à reconstituer un puzzle aux pièces manquantes tout en essayant de se réparer en surmontant ce qui freine sa vie depuis de trop longs mois. Beaucoup ont succombé ce soir là, pas elle. Pourtant, elle est depuis davantage un fantôme qu’un être vivant, comme si une part non négligeable d’elle-même était restée allongée parterre dans la salle de ce restaurant fusillé.

 

Si le scénario en fait parfois un poil trop dans la narration (certaines directions du récit rajoutant trop d’écriture dans l’écriture, notamment une forme de léger romanesque dont on perçoit l’intention sans toutefois en apprécier la formulation maladroite), reste que Revoir Paris est un drame plus qu’abouti. Un film émotionnellement fort, de surcroît pertinent dans le regard qu’il pose sur ces victimes d’une horreur qui les a figées pour longtemps dans leur traumatisme. Il fallait du talent pour incarner tant de douleur avec nuance. Alice Winocour l’a trouvé avec Virginie Efira, toujours aussi impressionnante dans sa capacité à incarner viscéralement ses personnages pour leur donner la dimension qu’ils méritent. Certains diront qu’on la voit trop (4 films rien que cette année). Oui, elle est omniprésente dans le paysage cinématographique français, mais va t-on vraiment s’en plaindre tant elle est très certainement l’une des meilleures comédiennes que l’on ait actuellement. Une fois encore, elle fascine par son naturel et elle ne fait que renforcer la grandeur d’un film qui joue magnifiquement sa partition compatissante, avec une délicatesse qui allège l’éprouvant.

Par Nicolas Rieux

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