Carte d’identité :
Nom : Mad Max : Fury Road
Père : George Miller
Date de naissance : 2014
Majorité : 14 mai 2015
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA, Australie
Taille : 2h00 / Poids : 100 M$
Genre : Action, SF
Livret de famille : Tom Hardy (Max), Charlize Theron (Furiosa), Nicholas Hoult (Nux), Rosie Huntington-Whitley (Splendid), Zoé Kravitz (Toast), Riley Keough (Capable), Hugh Keays-Byrne (Immortan Joe), Nathan Jones (Rictus Erectus), Josh Helman (Slit)…
Signes particuliers : George Miller n’avait plus réalisé de film live depuis 1998. George Miller a 70 ans et on le voyait comme un vieux de vieille frondeur mais aujourd’hui sur le déclin. En réalité, George Miller n’a pas perdu la main et se montre bien plus courageux et visionnaire que nombre des réalisateurs hollywoodiens du moment, jeunes et moins jeunes compris.
IL EST LIBRE MAX, Y’EN A MÊME QUI L’ONT VU ERRER
LA CRITIQUE
Résumé : Hanté par un lourd passé, Mad Max estime que le meilleur moyen de survivre est de rester seul. Cependant, il se retrouve embarqué par une bande qui parcourt la Désolation à bord d’un véhicule militaire piloté par l’Imperator Furiosa. Ils fuient la Citadelle où sévit le terrible Immortan Joe qui s’est fait voler un objet irremplaçable. Enragé, ce Seigneur de guerre envoie ses hommes pour traquer les rebelles impitoyablement…
L’INTRO :
Il fallait au moins ça pour assister à la résurrection de George Miller. Une illustre franchise culte, matricielle, qu’il a créée et imposée dans l’histoire du cinéma. En revenant à la source de sa notoriété, en ressuscitant son bébé Mad Max 36 ans après la sortie du premier volet, le cinéaste (qui n’avait plus fait de films live au cinéma depuis 17 ans) avait un terrain de bataille parfait pour renaître de ses cendres, même si le défi était à double-tranchant. Combien de metteurs en scène au lustre terni par les années, ont tenté un retour en force via un film ou une saga emblématique qui les avait installé sur le toit du monde ? Et combien se sont cassés les dents en manquant le rendez-vous avec leur pari ? 36 ans séparent donc le chef d’œuvre Mad Max et ce Fury Road, porté par une quadruple ambition. Un, redorer le blason de Miller après des années de « servicing » sur des Happy Feet et autre Babe 2. Deux, faire oublier le médiocre troisième opus avec une Tina Turner aux allures de travelo brésilien décrépi. Nous n’avons rien contre les brésiliens, on précise, mais le grotesque de la chose était sacrément navrant. Trois, réussir à refaire de Mad Max, le fer de lance d’un cinéma pionnier, rageur et dévastateur. Quatre, conjuguer l’esprit de la franchise et les codes du cinéma moderne, voire à venir. Tout cela en sachant que le statut de classique du film originel, représentait à la fois une épée de Damoclès tourbillonnant autour de la tête de ce « quatrième chapitre/reboot » et un challenge pour un Miller ambitieux, qui avait émis des promesses aussi excitantes que dangereuses, annonçant un spectacle monumental repoussant des limites. On était donc prêt à accueillir à bras ouverts le cinéaste australien et ses intentions révolutionnaires, Tom Hardy qui reprend le rôle anciennement dévolu à Mel Gibson, la belle Charlize Theron reconvertie en mode badass au crâne rasé, Nicholas Hoult ou Hugh Keays-Byrne en bad guy (et qui était déjà de la partie en 1979), les poupées Rosie Huntington-Whitley (Transformers 3), Zoé Kravitz ou Riley Keough et tout la clique de ce blockbuster aux bandes annonces stratosphériques, qui aura mis 18 ans à se concrétiser après un festival de malchances et trois ans à être finalisé après un tournage et une post-production compliqués.
L’AVIS :
Sur le papier, le projet Fury Road profitait surtout de la puissance de la marque « Mad Max » pour se payer toutes les folies visionnaires de son auteur iconique. Car imaginez la tête d’un studio face à un bonhomme associé à une série d’échecs depuis des plombes, et qui débarque avec l’idée d’un film proposant deux heures de course-poursuite entre des engins motorisés customisés, conduits par des tarés décrépis, au beau milieu du désert dans un monde post-apocalypse ? Couillu. Mais c’est Mad Max et ça, ça change tout.
En un film, George Miller efface presque 28 ans de néant cinématographique et d’errances décevantes (en admettant que Les Sorcières d’Eastwick était potable). À 70 ans et alors qu’on aurait pu croire qu’il avait perdu la main, le cinéaste se réveille comme un volcan endormi depuis trop longtemps. Le feu qu’il crache est furieux, semblable à des gerbes de laves fondant sur un cinéma hollywoodien monotone avec une rage créatrice, une passion virtuose, une envie de renouveau. Fury Road est un spectacle massif, radical, singulier, et surtout complètement fou, comme si Miller venait incarner une sorte de pendant hollywoodien du hongkongais Tsui Hark, en respectant avec sincérité le titre de son projet : Fury.
Délirant, fulgurant, déjanté sur le plan formel et narratif, brisant de nombreux codes et conventions pour imposer quelque-chose d’innovant et d’ultra-singulier, Fury Road porte l’étendard de ses ambitions visionnaires et novatrices. Un étendard seulement abîmé par la guerre qui fait rage au sein du long-métrage, entre le camp de sa modernité fascinante et fabuleuse et celui des nombreux défauts qui l’empêchent de foncer implacablement sur la route du chef d’œuvre. En cause, un script un peu faible, très porté sur l’action au profit de son univers et de la tension qui habitait le premier opus (on est plus proche du 2 pour le coup), expédiant ses personnages au moins autant que l’émotion et l’empathie qu’ils suscitent. En cause, un trop-plein à la fois visuel et narratif. Fury Road veut montrer beaucoup, raconter beaucoup, Fury Road se veut être dense, se veut être une météorite spectaculaire et frénétique tout en se prévalant d’un sous-texte féministe et écologique. Mais le film n’a pas toujours le temps pour tout faire tenir dans sa paire d’heures. Outre un script cumulant petites et moyennes maladresses, Fury Road est un bloc de métal tranchant et massif mais qui frôle l’indigestion par son hystérie à la fois salvatrice et excessive. Bouillonnant d’idées à tous les étages, ce délire fêlé du casque finit par laisser déborder sa casserole à trop vouloir laisser mijoter une générosité hallucinante, accolée à une beauté formaliste surréaliste.
Rarement un cinéaste ne nous aura autant transcendé avec des plans de dunes ensablés caressés par le vent. Rarement un cinéaste ne nous aura autant soufflé par un tel spectacle de feu et de flammes. Fury Road est bel et bien l’un des blockbusters d’action les plus richement créatif vu depuis une paye. De sa photographie somptueuse à une partie de sa BO (l’omniprésence de sa musique du soutien en revanche a de quoi agacer), de ses cadrages fous à sa mise en scène en constante hyperactivité, en passant par son montage-son surpuissant, l’intensité de son essence, sa beauté générale ou une 3D immersive, esthétisée, utilisée avec intelligence et magnificence… Mad Max Fury Road ne manque pas de provoquer des étincelles orgasmiques dans son lyrisme épique. Mais le jouissif de l’aventure a ses limites et elles se trouvent dans ses excès qui appuient là où ça fait mal, conséquence de sa trop noble conception du spectacle fastueux. Confusion, emballement, rythme pulmonaire au bord de l’embolie, script trop replié sur ses motivations premières.
Hydre de Lerne cinématographique dont les têtes affichent beauté, frénétisme, sauvagerie, nihilisme et monstruosité, Fury Road ne s’impose pas comme un chef d’œuvre, même si l’on voudrait y voir, à raison sur de nombreux points, une pierre angulaire d’un possible « autre cinéma à grand spectacle ». De sa narration ultra-condensée à sa vision extravagante ou à sa démente folie déchirant l’écran dans un cri d’amour au spectacle foudroyant, reste enfin une prouesse. Celle d’avoir su tourner un roller coaster saisissant et impressionnant… en live. Exit les SFX partout et bienvenu à un tournage fait de chair et de rouille, d’engins mécaniques surgonflées, d’explosions, de cascades incroyables, de sueur et de crasse, et d’action réelle. Au milieu de ce barnum effréné, hallucinant et complètement taré (mention à sa drôlerie à l’image du guitariste-étendard, illustration post-apocalyptique des anciens trompettistes et autres tambourinaires des champs de bataille ancestraux), des acteurs. Si l’interprétation tout en caricature de Tom Hardy peine à convaincre, l’excellence de Charlize Theron, au passage vraie héroïne de ce film ou Max devient presque un personnage secondaire, séduit. Dommage encore une fois, que l’émotion ne vienne pas sublimer leurs rôles. Entre le pied total et la cacophonie exténuante, glorieux sur la forme, un peu moins dans son fond désincarné ne trouvant pas d’écho à sa plastique grandiloquente, Mad Max Fury Road reste quand même un fort beau moment de cinéma méritant, décoré de la légion d’honneur de la folie salutaire bruyante, même s’il perd la récompense de la quintessence du spectacle émotionnel.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux
Un tres bon film d’action mais ce n’est pas un Mad Max. Mel Gibson peut dormir tranquille.