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RENCONTRES DU TROISIÈME TYPE (critique)

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Carte d’identité :
Nom : Close Encounters of the Third Kind
Père : Steven Spielberg
Livret de famille : Richard Dreyfuss (Roy Neary), François Truffaut (Claude Lacombe), Teri Garr (Ronnie), Melinda Dillon (Jillian), Bob Balaban (David), Lance Henriksen (Robert), J. Patrick McNamara…
Date de naissance : 1977
Nationalité : Etats-Unis
Taille/Poids : 2h15 – 19,5 millions $

Signes particuliers (+) : L’un des films les plus poétiques du genre. Légendaire et culte pour la beauté de ses images, ses éclairages, sa musique… Des comédiens épatants et une narration lente et posée mais d’une perfection et d’une maîtrise totale.

Signes particuliers (-) : x

 

CHEF D’OEUVRE DU SEPTIÈME TYPE

Résumé : Un peu partout dans le monde, des phénomènes étranges se produisent ou sont aperçus. Aux États-Unis, plusieurs personnes sont témoins de passage de soucoupes volantes…

Réalisé dans sa première décennie véritablement professionnelle alors que le cinéaste s’était quand même taillé une réputation plus qu’intéressante après les succès de Duel et des Dents de la Mer, Rencontres du Troisième Type est avec le recul l’une des pierres angulaires de toute l’œuvre de Steven Spielberg, probablement le plus célèbre metteur en scène actuel, le seul à être connu de tous y compris des plus ignorants en matière de cinéma. Les cinq notes de musiques enivrantes qui jalonnent tout le film, les nombreuses séquences cultes et notamment la légendaire « rencontre du troisième type », François Truffaut, les ovnis lumineux traversant le ciel… Spielberg signait en 1977 l’un des plus grands chefs d’œuvre de l’histoire de la science-fiction sur grand écran mais également l’un des grands chefs d’œuvre tout court de l’histoire du cinéma.

Emmené par un Richard Dreyfuss qui rafla un rôle proposé à tant de grands, de Steve McQueen à Jack Nicholson en passant par Dustin Hoffman ou Gene Hackman, Rencontres du Troisième Type va s’imposer comme la définition même du cinéma de son auteur ou comment l’extraordinaire s’invite dans le quotidien en y faisant irruption de façon aussi magique que bouleversante. C’est ça le cinéma spielbergien, cette façon de convoquer la magie de l’incroyable dans un ordinaire des plus banal, point de départ d’une aventure grandiose et souvent transformatrice de soi pour les protagonistes qui ne seront plus jamais les mêmes. Pour des raisons différentes, Rencontres du Troisième Type viendra se classer aux côtés des 2001, L’odyssée de l’Espace de Kubrick ou des Blade Runner de Ridley Scott par exemple, en ce qu’il sera l’une des œuvres majeures de son genre, de la carrière de son auteur, du cinéma en général.

Fort d’un message de paix puissant, Rencontres du Troisième Type, dont le scénario a été écrit par Spielberg lui-même (même si la première mouture était de Paul Shrader mais elle fut entièrement retravaillée par le cinéaste qui ne l’aimait pas) prend le contrepied des récits traditionnels de passage extraterrestre sur notre planète bleue. Généralement, le thème de la rencontre avec une autre forme d’existence et d’intelligence est le postulat de départ d’un film d’action basé sur le conflit. Le meilleur exemple reste le célèbre La Guerre des Mondes qu’adaptera d’ailleurs Spielberg bien des années plus tard. A l’époque, le metteur en scène se passionnait pour le thème d’une rencontre entre civilisations avec un optimisme débordant. Close Encounters puis E.T. L’extraterrestre guère après, Spielberg préfère la magie à la guerre, la beauté et la grâce au chaos et la douceur à l’horreur. Il signe du coup l’un des films les plus fascinants que la SF nous ait donné à voir.

Fascinant, c’est bien le mot qui résume à lui-seul cette magnifique odyssée fantastique en plein… quotidien ordinaire. Rencontres du Troisième Type est une splendeur de chaque instant à commencer par son intense première demi-heure mais aussi par la poésie magistrale de son long final en apesanteur, léger comme une feuille, tendrement ballotée par le vent. Le film ne cherche pas à soudainement transformer la réalité, à imposer un univers complètement fantastique, irréel, improbable ou pas. Au contraire, point d’anéantissement du monde, point de réalité divergente de la nôtre, point de rupture brutale, Spielberg préfère importer soudainement l’extraordinairement merveilleux dans la banalité de la vie d’un homme, modeste réparateur du câble, père de famille et mari aimé ou dans celle d’une femme vivant seule dans sa ferme avec son petit garçon. Une irruption soudaine puis subrepticement, l’extraordinaire se met en branle. Et le film d’alterner terreur de l’inconnu et fascination pour le mystère, pour l’autre, pour l’incroyable.

Rencontres du Troisième Type va gagner tout au long de son déroulement en fascination. Les images de Spielberg sont tout simplement à crever de beauté, comme si le metteur en scène était à l’apogée de son art et c’est d’ailleurs probablement le cas même si l’apogée va durer encore un bon bout de temps. Chaque plan est d’une maîtrise palpable démultipliant cette impression de poésie naturelle, de grandeur des paysages, du ciel étoilé, des nuages annonciateurs, le tout au son de la courte et simple mélodie imaginée par John Williams qui n’aura jamais eu travail aussi compliqué, sans ironie aucune. Comment résoudre un tel problème : créer une musique qui restera, qui marquera mais qui se doit d’être la plus simple, épurée, facile et basique possible.

Envoûtant, aspirant, Rencontres du Troisième Type nous attire comme des aimants. La fascination que semble éprouver les personnages pour cette musique, pour ces formes, pour ces lumières, devient contagieuse tant nous aussi, devant l’écran, sommes comme hypnotisés par ces engins volants furtifs, par ces manifestations perçues parfois avec terreur, parfois avec émerveillement. Et alors que nous c’est par le film, Spielberg lui c’est par son idole, présent comme dans un rêve à ces côtés. Admirateur de longue date du réalisateur français François Truffaut, Spielberg réussit à le convaincre de venir jouer le rôle d’un scientifique dans son ode à la paix, au romantisme science-fictionnel. On aime à voir une éventuelle rencontre avec une forme d’intelligence comme conflictuelle, Spielberg avec son âme d’enfant pleine de magie, préfère y voir l’occasion d’un échange fort et puissant.

Dans l’écriture enfin, Rencontres du Troisième Type n’a pas son pareil. Incroyablement rythmé, le film enchaîne les évènements sans temps morts, notamment dans ces trois premiers quarts d’heure qui multiplie les manifestations, les mouvements narratifs. Il se passe constamment quelque chose dans Close Encounters et pourtant, jamais on a cette impression de fatigue pesante. En cause ? La légèreté d’un film qui est tellement gracieux que jamais il n’en est indigeste.

Alors que pendant plus de deux décennies de cinéma de SF surproductif (depuis le début de la guerre froide et la peur d’une guerre nucléaire) le cinéma américain a passé son temps à anticiper avec paranoïa une éventuelle invasion catastrophique, une rencontre qui virerait au cauchemar pour la race humaine, Spielberg débarque et lance solennellement une demande d’arrêt, de trêve. Pourquoi angoisser ? Pourquoi paniquer ? Pourquoi imaginer le pire ? Et si la réalité était belle ? Spielberg balaie presque d’un doux revers de la main des années de cinéma pessimiste et presque catastrophe nous promettant l’enfer. Ses extraterrestres n’auront rien d’aliens belliqueux mais seront juste des créatures pacifiques, venant en paix pour une rencontre entre espèces. Chatoyant, sa rencontre qui a tout du haut sommet privé entre dignitaires mais auquel quelques quidam se retrouvent imprévisiblement convoquer, sera douce, poétique, comme si le temps cessait pendant quelques minutes de grâce pure couchée sur pellicule.

Vous l’aurez compris, pour les quelques amateurs de grand cinéma et qui n’auraient toujours pas vu cet immense film fondateur du style « Spielberg », il est temps de combler une lacune majeure. Close Encounters of the Third Kind de son magnifique titre en VO, est un moment de bravoure cinématographique, véritable démonstration du génie de son auteur qui a toujours su allier ordinaire et extraordinaire mais aussi fantastique divertissement grand public et art et cinéphilie. Ce n’est pas pour rien si le nom de « Spielberg » fait tant rêver, ce n’est pas pour rien que cet artiste incroyable est ce qu’il est aujourd’hui. Quand on voit cela, on comprend le sens de l’expression « la magie du septième art ».

Bande-annonce :

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