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WENDY de Benh Zeitlin : la critique du film

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Carte d’identité :
Nom : Wendy
Père : Benh Zeitlin
Date de naissance : 2019
Majorité : 23 juin 2021
Type : sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h52 / Poids : NC
Genre : Drame, Fantastique

Livret de famille : Devin France, Tommie Lynn Milazzo, Shay Walker…

Signes particuliers : Moins réussi que Les Bêtes du Sud Sauvage mais encore une fois la patte d’un véritable auteur.

LE RETOUR D’UN RÉALISATEUR ATTENDU

NOTRE AVIS SUR WENDY

Synopsis : Perdue sur une île mystérieuse où l’âge et le temps ne font plus effet, Wendy doit se battre pour sauver sa famille, sa liberté et garder l’esprit jovial de sa jeunesse face au danger mortel de grandir. 

La moisson de prix glanés aux quatre coins du monde avait été tellement abondante, que l’on pensait vite retrouver Benh Zeitlin, ici ou là, sur un plus gros film ou toujours dans le sillon du cinéma indépendant. Curieusement, c’est tout le contraire qui s’est passé. Le jeune cinéaste prometteur d’hier a refusé tous les offres mirobolantes tendues par Hollywood et a préféré disparaître pendant huit longues années… avant de refaire surface aujourd’hui avec le film qu’il avait envie de faire et rien d’autre. Wendy est sa propre vision du mythe de Peter Pan. Pour tous ceux qui ont vu Les Bêtes du Sud Sauvage, voir le cinéaste new-yorkais s’emparer du célèbre conte fait sens. Ses thématiques fétiches sont là et son style si singulier avait l’occasion de réinventer un peu la célèbre histoire jadis imaginée par J.M. Barrie. Direction une île mystérieuse où les enfants ne peuvent pas grandir. On y retrouve Peter, Wendy, un Capitaine Crochet, tout y est… mais autrement.

Comme on pouvait s’en douter avec Benh Zeitlin, on est très loin de ce que l’on a connu auparavant, loin de Disney, loin de Spielberg. Avec sa revisite très personnelle de Peter Pan, Benh Zeitlin se sert de son goût prononcé pour les univers poétiques et oniriques où s’exprime la beauté de l’enfance, afin de travailler des thématiques comme les idéaux, l’avenir, le refus du déterminisme, la peur de grandir (et par extension de la mort ?). Étonnamment compte tenu du principe même du conte, Wendy est un film qui évacue la magie féérique pour la transformer en ce que l’on pourrait appeler un « réalisme magique ». De loin, Wendy nous donnerait presque l’impression d’assister à une rencontre farfelue entre le néoréalisme italien d’après-guerre, le drame à la Dickens et un fantastique grisant prenant à rebours la naïveté disneyenne. Ce mix très improbable avouons-le, donne lieu à un ofni aussi déroutant que déconcertant, chose peu étonnante venant de Zeitlin. Une chose est sûre, elle donne lieu à une œuvre dans la ligne des Bêtes du Sud Sauvage, mais peut-être pas aussi réussie que son aînée.

Car malheureusement, Benh Zeitlin n’est animé que par la sincérité et l’envie, et son film n’est porté que par de bonnes intentions. Presque tout fait mouche dans Wendy, son introduction à la noirceur fataliste où une petite fille angoisse de n’avoir aucun futur et de commencer et terminer sa vie dans ce miteux restaurant que sa mère tient à bout de bras. Pour elle, l’aventure ressemble à ce train qui passe régulièrement devant chez elle, une locomotive qui file à tout allure sans s’arrêter. Avec son style pénétrant, caméra à l’épaule au contact de son/ses sujet(s) et granulosité de l’image, Zeitlin plante un décor et des enjeux forts. Puis l’expédition démarre et l’on retrouve tous es codes du contes mais le cinéaste en fait à chaque fois quelque-chose de viscéralement ancré dans le réel, même si une composante féérique est présente mais reléguée en arrière-plan (comme Peter d’ailleurs, Wendy étant pour une fois la star du film). Continuellement, Wendy fascine par la manière dont il élabore son histoire, comme si Stand By Me s’abandonnait à une odyssée fantastique. Benh Zeitlin s’efforce de créer quelque-chose de très sensoriel, de très immersif, un effort d’une grande liberté soulevé par une forme de rude beauté escarpée. Malheureusement, s’il réussit beaucoup de choses, Wendy reste un pari en demi-teinte. Car étrangement, l’émotion peine à se former dans un film pourtant bouleversant sur le papier et véhiculé par un supplément (humain et artistique) d’âme indéniable. Comme si la lourdeur du symbolisme devenait trop écrasante pour le conte lui-même. Bien que captivé, on reste spectateur distant de cette aventure qui se veut une expérience cinématographique… et qui en est peut-être un peu trop consciente. Mais saluons quand même l’audace de l’un des cinéastes les plus intéressants de sa génération, aussi intéressant que rare et discret, qui a eu le mérite de proposer quelque-chose de fort et radical, Essayer de réinventer un monument génial demande du courage et Benh Zeitlin en a eu. Pour un résultat certes inabouti mais néanmoins assez fou, mystique, lyrique et saisissant (à défaut d’être enivrant).

BANDE-ANNONCE :

Par Wilfried Rennahan

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