Carte d’identité :
Nom : Scream 4
Père : Wes Craven
Livret de famille : Neve Campbell (Sidney), David Arquette (Dwight), Courteney Cox (Gale), Emma Roberts (Jill), Hayden Panettiere (Kirby), Alison Brie (Rebecca), Anthony Anderson (Adjoint Perkins), Adam Brody (Insp. Hoss), Rory Culkin, Kristen Bell, Aimee Teegarden, Anna Paquin…
Date de naissance : 2011
Nationalité : États-Unis
Taille/Poids : 1h50 – 40 millions $
Signes particuliers : Quelques moments fun intégrés dans un arc narratif malicieux articulé autour de l’évolution du genre depuis le dernier opus il y a dix ans. Scream 4 a l’intelligence de changer ses codes pour s’adapter à son temps. Mais écriture et personnages pèchent.
LE RETOUR DU RETOUR…
Résumé : Sidney Prescott a tourné la page depuis les terribles et meurtriers évènements d’il y a dix ans. Elle a depuis écrit un roman et est de retour à Woodsboro dans le cadre de sa campagne promo. Les retrouvailles sont de courtes durée, Ghostface est lui aussi de retour et s’invite à la fête…
1996 : Scream, premier du nom, débarque sur les écrans. Chef d’œuvre renouvelant un genre qui en avait considérablement besoin et qui avait été laissé moribond par des années d’excès et de dérives ridicules, le film de Wes Craven parvenait à allier avec brio slasher, suspens, humour et véritable réflexion intrinsèque sur le genre auquel il s’apparentait. Naviguant entre la tendre parodie nostalgique, l’analyse cinématographique d’un genre et le pur film de terreur en se jouant de ses codes avec malice, Scream était un vent d’air frais à l’équilibre parfait où les personnages existaient vraiment, dotés d’une réelle caractérisation au point d’en devenir terriblement attachants et marquants (chose rare dans le sous-genre). Le scénario brillant et la multitude de scènes cultes faisaient le reste pour inscrire ce premier volet au panthéon du cinéma d’horreur. Scream a révolutionné un genre à la peine depuis plusieurs années, le relançant pour une nouvelle page de son histoire. Involontairement, il aura aussi des conséquences fâcheuses mais il est difficile de le blâmer pour cela tant il n’est absolument pas responsable de la cupidité d’un système hollywoodien qui va profiter du coup de maître pour pondre nombre de ratages pathétiques copiant l’illustre modèle jusqu’à l’overdose.
1997 : Dans la foulée du succès planétaire considérable du premier volet, Wes Craven et Kevin Williamson, le nouveau scénariste chouchou d’Hollywood s’attèlent à un second opus capitalisant sur l’énorme potentiel commercial d’une saga naissante. Malheureusement, le scénario prometteur et plutôt bon qui avait été écrit, se retrouve honteusement balancé sur un internet naissant avant même le début du tournage. Une fuite qui aura des conséquences désastreuses puisque le script réécrit dans l’urgence sera nettement moins bon que ce qui avait été prévu et écrit à la base. Demeurent néanmoins dans le résultat final, quelques scènes hautement grandioses sauvant le film du naufrage complet qu’aurait pu causer une fin bien mauvaise. S’y distinguaient notamment, une intro poignante et jubilatoire dans un cinéma où, par un jeu de mise en abyme intelligent, l’histoire de Scream 1, qui avait été récupérée par Hollywood pour en faire une fiction, était projetée mais aussi les meurtres efficaces de l’icône de la série télé de l’époque Sarah Michelle Gellar, celui du personnage culte de Randy, le geek fan de film d’horreur. Le tout dans une intrigue toujours aussi bien ficelée bien que plombée par sa révélation finale.
1999 : Scream 3. Même problème que pour Scream 2 : une fuite, un scénario top secret balancé sur internet, une réécriture dans l’urgence… Ajoutons à cela, l’absence de Kevin Williamson, auteur des deux premiers opus, parti sous de nouveaux cieux (plus précisément sur son premier film en tant que metteur en scène, Mrs Tingle). Le bilan ? Un presque naufrage. La saga déçoit. Moins de saveur, un script plus mauvais, une fin assez risible, des personnages moins intéressants. Scream 3 est le maillon faible de la première saga Scream, dénué de l’intelligence de ces prédécesseurs.
2011 : Après des années de développement hell et de tentatives infructueuses, ça y est ! Casting réuni, script correct, film pondu, le quatrième volet de la légendaire saga Scream débarque sur les écrans. Il faut être honnête, on attendait plus grand chose d’une franchise qui avait décliné d’épisode en épisode. Alors, quid de ce nouveau volet, 12 ans après le dernier en date ? La génération Scream a été remplacée par la génération Saw–Hostel et la saga, très ancrée dans un esprit 90’s va tenter l’impossible : se relancer dans une nouvelle décennie où les codes et le public ont changé…
SCREAM 4
Le bilan de ce quatrième volet est mitigé. Il est difficile d’analyser et de critiquer un opus de ce genre sans le comparer nécessairement aux précédents numéros. Le premier ? Non, impossible. Scream 1 était un chef d’œuvre inégalable. Le troisième ? Non plus. Scream 3 était tellement mauvais qu’il aurait été difficile de faire pire, à moins de ne le faire exprès. Reste alors le second volet, Scream 2.
La différence avec Scream 2 est de taille et concerne le film dans sa généralité. Scream 2 était, dans son ensemble, pas très bon, force est de l’admettre. Mais il recelait quelques scènes cultes, aussi brillamment écrites que réalisées. Ce sont les fameuses scènes évoquées en introduction. Scream 4 ne possède pas cela. Aucune scène ne se démarque vraiment de l’ensemble du film. Aucune scène n’est instantanément culte tant elle serait bluffante qualitativement. En revanche, perçu dans sa globalité, Scream 4 est peut-être meilleur que le deuxième opus. Disons, pour résumer, que l’un comporte quelques scènes supérieures à l’autre, mais Scream 4 est peut-être meilleur dans son aspect général, plus uniforme dans sa totalité. Il se classerait donc potentiellement, comme le second meilleur opus de la saga. Wes Craven a su relancer sa franchise et insuffler un second souffle à sa série. Le script de ce quatrième volet est plutôt correct, son introduction se défend bien sans atteindre l’excellence de celles des deux premiers, le déroulement de l’intrigue est rondement mené, sans temps mort, les meurtres s’enchaînent et le final se défend plutôt pas mal comparé aux fumeux twists des précédents (exception faite du un, bien évidemment).
Nouvelle décennie, nouvelles règles, telle est l’accroche. Et effectivement, à la manière du premier, Wes Craven analyse à nouveau le genre et la façon dont il a évolué depuis les quinze années qui sépare ce dernier opus des origines de la saga. L’apparition des torture porn à la Saw ou Hostel est donc au centre du récit, la façon de traiter les personnages premiers et secondaires, la multiplication du nombre de personnages, la violence des meurtres, la mécanique actuelle… tout y passe. Et pour ancrer son film dans la génération de maintenant, Wes Craven fait appel à un casting majoritairement très « série télé » fait de visages reconnaissables pour le public d’aujourd’hui. Les fans retrouveront en effet dans ce quatrième volet un nombre considérable d’acteur/rices connues pour leur rôle dans un show télévisé (ou ayant eu une carrière ciné puis jouant aujourd’hui dans des séries). Pêle-mêle, citons : Hayden Pannettière (Heroes), Kirsten Bell (Veronica Mars), Anna Paquin (True Blood), Alison Brie (Community), Aimee Teegarden (Friday Night Lights), Mary Mc Donnell (Battlestar Galactica), Antwon Mitchell (The Shield et autres), Emma Roberts (Allie Singer), Marley Shelton (Eleventh Hour) etc…
Si Scream 4 au final se défend bien, poussant loin l’analyse du genre (trop loin ?), se montrant hautement référentiel, alliant comme à la grande époque humour-meurtre et comportant son lot de scènes fort agréables et bien fichues, est-il par contre à la hauteur des attentes ? Et surtout, est-il vraiment bon ? Et c’est là que le bât blesse…
Oui, Scream 4 est correct. Oui, Scream 4 relève le niveau et oui, il est objectivement pas trop mal. Mais dans une certaine limite. Car le film comporte aussi un certain nombre de défauts fâcheux. A commencer par un casting inégal. Beaucoup de personnages, beaucoup d’acteurs mais dont une grande partie ne brille pas par la qualité de son interprétation. Étonnement, ce sont des acteurs/rices plutôt bons en temps normal qui flanchent ici, de façon inexpliquée. Si Hayden Pannettière est moyenne, va t-on dire, la jeune et jolie Aimee Teegarden est par contre curieusement catastrophique. Mary Mc Donnell est de son côté désastreuse, elle qui pourtant n’a plus rien à prouver en matière de jeu. David Arquette semble être en roue libre face à une Courteney Cox qui ne prend aucun risque puisqu’elle joue de la même façon que précédemment. Neve Campbell redresse un peu le niveau, et encore mais du moins au niveau du casting de tête puisqu’Emma Roberts s’y révèle plus que passable. On ne s’attardera pas sur Kirsten Bell ou Anna Paquin car leur rôle particulier explique diégétiquement le niveau de leur prestation.
Second point faible de ce Scream 4, les personnages en eux-mêmes. Ce qui faisait la qualité du premier Scream, était justement la force de ces protagonistes. Peu de personnages au final, mais remarquablement écrits avec chacun leur caractérisation, leur différence, leur histoire, leur vécu, leur mode de vie. Chaque personnage était fouillé, crédible, avec une histoire et un style. On se souvient tous du mystérieux beau-gosse Billy Loumis, de la foldingue déjantée Tatum, de l’hilare timbré Stuart, de la journaliste ambitieuse Gale Weathers ou du geek fan de cinoche Randy. Dans Scream 4, il faut admettre que les personnages sont d’une superficialité assez désastreuse pour certains, ce qui annihile toute empathie, toute identification, tout attachement. Certains en viennent même à être d’une totale inutilité, servant seulement à boucher des trous, à remplir des blancs dans le script ou à être matière à meurtre.
Enfin, pour terminer, Wes Craven a poussé loin, très loin, l’analyse du genre. Ce qui était la marque de fabrique du premier volet, le côté référentiel, introspectif du genre, est ici mis très en avant. Trop peut-être car du coup, nombre de scènes sont désamorcées par une analyse immédiate du genre et de leur « utilité » ou « justification » dans la mécanique du film d’horreur. Une analyse qui est tellement poussée, qu’elle va non seulement passer au-dessus de la tête d’une grande partie du public mais qui en plus, manque de subtilité, de finesse et d’une imbrication subtile dans le récit. Trop de références tue la référence. Et soyons honnêtes, on attend pas non plus d’un slasher qu’il soit une masterclass sur le cinéma d’horreur. On veut avant tout profiter du spectacle. Wes Craven a certainement voulu capitaliser sur ce qui avait fait le succès du premier pour se relancer au travers de sa saga, pour redorer son blason et sa crédibilité pas mal attaquée ces temps-ci à force de bien piètres films (My Soul to Take en premier lieu). Mais comme beaucoup de cinéastes avant lui, en revenant à ce qui a fait son succès, il se heurte au temps, au fait de ne plus être le même metteur en scène qu’à l’époque. Il tente ainsi artificiellement de refaire ce qui avait naturel au premier coup et l’échec, sans être total, est partiel.
En conclusion, Scream 4 est agréable, fun par moments et meilleur que ce que Craven nous a pondu récemment. Surtout, il est meilleur que ce qui était redouté, le public ayant quitté la saga sur un insipide et bien mauvais troisième volet. Mais le film n’est pas exempt de défauts, certains mineurs, d’autres plus gênants et surtout, pour beaucoup, qui auraient facilement pu être corrigibles. On est loin, très loin du brillant premier volet mais on remonte la pente néanmoins. Maintenant, il faut peut-être se demander du côté des pontes de Dimension Films, si repartir sur une nouvelle trilogie, est une bonne idée. Scream 4 critique beaucoup la nullité crasse d’une saga Saw qui s’est perdue avec le temps faute de s’être arrêtée quand il en était encore temps. Est-ce une bonne idée de faire pareil ? Peut-être est-il temps pour Ghostface de raccrocher son masque, sur une note à peu près correcte. Laissons donc filer ces personnages au son d’une BO qui reprend quelques musiques originelles, cessons de vouloir réinventer de nouvelles copies des illustres rôles d’antan (le geek Randy trouve ici deux équivalents sans saveur). Oui, les adieux sont toujours tristes mais parfois ils sont salutaires.
Bande-annonce :