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MACHINE GUN PREACHER (critique)

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Carte d’identité :
Nom : Machine Gun Preacher
Parents : Marc Forster
Livret de famille : Gerard Butler, Michelle Monaghan, Michael Shannon (II), Madeline Caroll, Kathy Baker, Souleymane Sy Savane, Inga R. Wilson…
Date de naissance : 2011
Nationalité : États-Unis
Taille/Poids : 2h09 – 30 millions $

Signes particuliers (+) : Brutal, dur, épique, violent et viril. Un beau portrait d’un homme complexe. Une articulation casse-gueule mais bien huilée entre le film d’action et le pamphlet humanitaire.

Signes particuliers (-) : Un petit côté très démonstratif. Légèrement maladroit dans l’écriture sur quelques séquences clés.

 

QUAND L’ABBÉ PIERRE RENCONTRE RAMBO

Résumé : Sam Childers, un homme violent addict à l’alcool et à la drogue, décide de changer de vie à sa sortie de prison. Il fonde une église et s’exile en Afrique où il va tenter de venir en aide aux enfants victimes des guerres civiles. Mais les obstacles seront légion à commencer par les milices locales violentes.

L’histoire incroyable de Sam Childers méritait bien une adaptation au cinéma tant sa trajectoire et son destin uniques est digne d’un film épique de cinéma, tant sa vie est l’exemple même de la notion de rédemption et de la résistance à ses sombres démons intérieurs. Le cinéaste Marc Forster s’empare de cette histoire vraie, synthèse entre tous ses précédents travaux, lui qui a abordé le drame intimiste (A l’Ombre de la Haine, Les Cerfs Volants de Kaboul) le récit autobiographique (Neverland) et le film d’action (le James Bond Quantum of Solace). Car c’est ce qu’est au fond ce Machine Gun Preacher, un drame autobiographique dérivant fréquemment vers l’action.

S’il n’était pas véridique, l’on ne pourrait pas s’empêcher de trouver bien gros ce récit incroyable, mouvementé et grandiloquent. Sam Childers, dealer violent, membre des Hell’s Angel et sortant de prison, réussit à se remettre sur le droit chemin, à fonder une entreprise honnête et lucrative avant de trouver Dieu et la foi. Il entame alors une rédemption extrême qui va le conduire en Afrique où il va être touché par la dramatique situation des soudanais, pris dans une guerre civile fratricide entre armée régulière et groupuscules tortionnaires terrorisant la population. Perturbé dans son petit confort américain par cette vision de l’horreur fait homme, Sam Childers va donner tout ce qu’il a, physiquement et matériellement, pour venir en aide aux orphelins abandonnés, fondant une église, un orphelinat et tentant comme il le peut, de protéger ces êtres démunis face à l’agressivité morbide des factions de l’armée dissidente révolutionnaire sévissant surtout au Nord du pays. Cet incroyable destin va permettre à Marc Forster d’accoucher d’un film passant par tous les stades et les états émotionnels en suivant la trajectoire d’un homme oscillant entre l’ombre et la lumière. Car cette formidable destinée ne s’arrête pas là. La volonté opiniâtre de Sam Childers dans son élan humanitaire admirable est à double tranchant et va finir par le conduire, par excès de bonnes intentions, à retomber dans d’autres travers liés à son ancienne personnalité, ses démons intérieurs demeurant jamais loin et titillant ses efforts pour devenir quelqu’un de bien. Enfermé dans sa générosité extrême, Sam Childers va finir par en oublier toute lucidité dans son combat, par délaisser les siens, par basculer progressivement dans une violence démesurée mais employée autrement et d’autres fins. D’un résistant à la cruauté et aux atrocités commises par la LRA (l’armée de résistance), Sam Childers va retrouver au fond de lui la violence qu’il avait refréné depuis ces dernières années avant d’exploser et de la retourner contre ses assaillants pour se transformer en mercenaire impitoyable et en combattant rendant coup pour coup, violence pour violence.

Machine Gun Preacher montre toute l’ambivalence d’un homme rien que dans son titre. Un homme aux sombres facettes masquées par une bonne volonté de faire le bien, dans un état d’esprit de rédemption pour tous ses méfaits commis dans son ancienne vie. De ce contraste, résulte un film lui aussi ambivalent, partagé entre ode à l’humanisme, à la tolérance dans une dénonciation des affres d’une guerre civile oubliée du reste du monde et film d’action dur, nerveux et hargneux. Faisant l’apologie de la paix en essayant d’interpeller le monde sur la situation du Soudan, Machine Gun Preacher bascule tout à tour dans la violence la plus extrême et démesurée au gré d’un personnage partagé entre violence et paix, entre ce qu’il est aujourd’hui et ce qu’il a été par le passé. Et à son image, le film de Forster alterne plans humanistes douloureux et tragiques et explosion dantesque de dureté sous les fusillades à la kalachnikov opposant dans une guérilla personnelle, une armée caractérisée par ses atrocités et exactions commises et un homme entouré de quelques fidèles, ne lâchant rien et rendant l’horreur par l’horreur quitte à en perdre parfois tout recul et objectivité.

Drame cruel sur une région du monde délaissée et abandonnée à son sort, à son cauchemar tragique d’un quotidien affreux, Machine Gun Preacher est un film engagé qui ne ménage pas le spectateur en n’étant jamais ni noir ni blanc, à l’image de son protagoniste central. Film d’action qui dépote où la violence jaillit à l’écran, il est aussi une sorte de Rambo en terres africaines où un prêtre se mue en combattant pour une cause. Machine Gun Preacher est plein de chose, pas forcément parfait dans sa construction, mais un film d’homme musclé racontant une trajectoire incroyable que l’on croyait réservée aux films hollywoodiens et symbolisée par un Gérard Butler en bad boy devenant prêtre, puis mercenaire, puis prêtre, puis mercenaire, bref, l’abbé Pierre mixé avec un Rambo. Il est surtout un film que l’on sent passer, épique et complètement dingue. Mais aussi triste à la fois. Car on n’est pas malheureusement pas chez Rambo. On est dans une tragédie humanitaire terriblement vraie.

Bande-annonce :

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