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LE MONDE D’HIER de Diastème : la critique du film

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Nom : Le Monde D’hier
Père : Diastème
Date de naissance : 2021
Majorité : 30 mars 2022
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h29 / Poids : NC
Genre : Thriller politique, Drame

Livret de Famille : Léa DruckerDenis PodalydèsAlban Lenoir, Benjamin Biolay, Jacques Weber, Thierry Godard, Emma de Caunes…

Signes particuliers : Passionnant dans le fond, inabouti sur la forme. 

Synopsis : Elisabeth de Raincy, Présidente de la République, a choisi de se retirer de la vie politique. À trois jours du premier tour de l’élection présidentielle, elle apprend par son Secrétaire Général, Franck L’Herbier, qu’un scandale venant de l’étranger va éclabousser son successeur désigné et donner la victoire au candidat d’extrême-droite. Ils ont trois jours pour changer le cours de l’Histoire.

BARRAGE A L’EXTREME-DROITE

NOTRE AVIS SUR LE MONDE D’HIER

Quatrième long-métrage pour le réalisateur Patrick Asté dit Diastème. Après une parenthèse un peu plus légère avec la comédie dramatique Juillet Août, le cinéaste revient à un cinéma très engagé, très politique. En 2015, il s’attaquait frontalement à la montée du racisme en France avec Un Français, portrait d’un skinhead cherchant à se repentir et à laisser derrière lui sa colère et sa haine. Cette thématique d’un monde qui se radicalise davantage de jour en jour et affronte l’inexorable progression des extrémismes, le réalisateur la reprend à bras le corps avec Le Monde D’hier, une plongée dans les arcanes de la politique française à l’heure où des élections présidentielles s’apprêtent à fracturer le pays. Présidente de la République depuis cinq ans, Elisabeth de Raincy (Léa Drucker) va céder son fauteuil élyséen dans quelques semaines quand elle apprend qu’un énorme scandale est sur le point de balayer son successeur désigné (Jacques Weber), laissant le champ totalement libre à son rival d’extrême-droite. A trois jours du premier tour, trouver une solution d’urgence est primordial pour empêcher la France de sombrer dans le « fascisme ».

Le Monde d’hier sortira en salles le 30 mars prochain. Le timing est tout sauf innocent. Nous serons à une dizaine de jours du premier tour des élections présidentielles 2022 et la période sera sous haute tension entre un Président sortant qui cristallise beaucoup de rancœur (comme celle du film), une nuée de candidats incapables de peser dans le débat (comme dans le film) et la montée angoissante des extrêmes (comme dans le film), en l’occurrence Marine Le Pen d’un côté et Eric Zemmour de l’autre. Le film de Diastème n’avance pas masqué, il est clair, limite propagandiste : il faut sauver le soldat France. Basculer dans l’extrémisme semble la pire chose qui soit et les répercussions seraient terribles. Le cinéaste n’y va donc pas par quatre chemins, il est impératif de faire barrage par tous les moyens possibles. Même illégaux ? C’est le débat de moralité qu’il pose.
L’incursion dans les coulisses d’un palais de l’Elysée dans la tourmente est passionnante. Les petits conflits, les rivalités, les dilemmes, la gestion de crise et surtout un séisme politique qui se profile, Diastème scrute ce qui a participé à créer cette situation. « On a merdé« . Voilà comment Denis Podalydès (incarnant le Secrétaire Général de l’Elysée) résume les choses. Pendant ses années de Présidence, le pouvoir en place (et toute la classe politique avec lui) a merdé et voilà le résultat. En face, les extrêmes sautent sur la moindre opportunité, un scandale, un attentat, tous les moyens sont bons pour instrumentaliser et déployer un discours populiste séducteur. Comment combattre cela ? Est-il encore possible de rattraper les choses à quelques semaines d’un enjeu électoral crucial ? Diastème voudrait sûrement le croire même si le titre de son film est emprunté à un livre de Stefan Zweig peignant son pessimisme politique quant à la marche du monde.
En soi, Le Monde d’hier essaie de jouer la carte du thriller politique sous tension, tension décuplée par le fait que la menace en question résonne terriblement avec l’actualité. Et il y parvient… en partie. Si le récit tient en haleine par le sentiment d’urgence qu’il orchestre et par le réalisme des tractations et du langage, il s’affaisse malheureusement en raison de son manque d’étoffe. Le Monde d’hier est comme une promesse inaboutie. Un film entièrement auto-centré sur son enjeu et la micro-poignée de protagonistes qui l’animent, au point de ne pas réussir à prendre une hauteur qui lui aurait été bénéfique pour réellement creuser et approfondir une interrogation somme toute très légitime.
Légitime car le cas de figure imaginé par Diastème a de quoi faire peur. Aux dernières estimations (au moment de l’écriture de cet article), le président sortant Emmanuel Macron et Marine Le Pen font figure de candidats détachés largement favoris pour un duel au second tour. Et si une « bombe » venait à détruire la campagne de Macron dans l’entre-deux-tours au point de totalement le décrédibiliser aux yeux des français ? Marine Le Pen aurait alors le champ libre pour être présidente puisque le vote blanc (un possible garde-fou) n’est pas reconnu et que seuls les suffrages exprimés comptent. Sauf qu’encore une fois, l’enjeu est légitime mais Diastème ne dit rien à propos de cette problématique récurrente des votes blancs non reconnus (qui réglerait pourtant l’épineuse situation du film). Un exemple parmi d’autres traduisant les faiblesses d’un film trop dans le filmage illustratif de son idée (la mise en scène n’a pas la vivacité d’un Exercice de l’Etat) et péchant par un certain manque d’ambitions et par ses petits écarts mélodramatiques perturbant l’essentiel. Reste que l’effort est intéressant, pertinent, important même à l’heure actuelle.
Par Nicolas Rieux

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