WOMEN TALKING de Sarah Polley : la critique du film

Depuis son développement, on ne peut pas dire que le mouvement féministe n’a fait que de bonnes choses. Tout grand bouleversement social, politique ou culturel ne se fait pas sans fracas, sans dégâts. L’important est de se questionner, de prendre conscience, de réfléchir en profondeur. Tout ce que fait Women Talking, pamphlet magistral d’une rare intelligence. Oui, il y est question de féminisme. Il y est question de femmes qui se lèvent et qui crient haut et fort que ça suffit, qu’il est temps de se battre. Il est temps de prendre la parole. Et pendant que les femmes parlent, les hommes doivent écouter. Oui, Women Talking est un procès. Le procès des hommes. Mais brillamment, avec acuité, discernement et pertinence, le film ne sera jamais qu’une invective simpliste crachée à la figure de ces hommes. Il y a de la colère dans le film de Sarah Polley, mais une colère réfléchie, canalisée, analysée. Quels hommes ? Tous les hommes ? Comment changer les comportements ? Comment transformer en profondeur les choses ? Comment agir avec discernement ? Plusieurs points de vue de femmes s’opposent, se confrontent, s’affrontent, dans un débat passionnant incarnée par des figures féminines aux visions différentes. Et le spectateur de se rendre progressivement compte que Women Talking n’est finalement pas un film contre les hommes mais un film pour les femmes. Et s’il y a des hommes intelligents, ils écouteront, ils prendront conscience, ils réfléchiront à ce qu’il se dit dans ce prise de voix intense aux allures de table ronde participative. Et quelque soit la finalité, elle devra être entendue et respectée.

La force et l’intelligence de Women Talking est de ne pas résumer son propos à une verve manichéenne. Il y a de la rage. Mais elle est dirigée avec bon sens et clairvoyance dans une œuvre virtuose. Le sujet est grave et sérieux. Sarah Polley emploie une forme adéquate. Couleurs très froides, tonalité austère, jeux de lumières très subtils, Women Talking impose immédiatement sa gravité dans sa direction artistique avant de nous enfermer dans une sorte de huis-clos où vont se tenir débats et enjeux. Des débats que l’on suit avec passion, avec émotion, avec recul.