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LE MONDE APRÈS NOUS de Sam Esmail : la critique du film [Netflix]

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Spectateurs

 

Nom : Leave the World Behind
Père : Sam Esmail
Date de naissance : 08 décembre 2023
Type : disponible sur Netflix
Nationalité : USA
Taille : 2h18 / Poids : NC
Genre : SF, Thriller, Drame

Livret de Famille : Julia RobertsMahershala AliEthan Hawke

Signes particuliers : L’un des meilleurs films « Netflix » proposés jusqu’ici par la plateforme. 

Synopsis : Une famille qui rêvait d’une pause dans une luxueuse maison de location plonge en plein chaos après une cyberattaque qui neutralise tout appareil – et l’irruption de deux inconnus.

THIS IS THE END

NOTRE AVIS SUR LE MONDE APRES NOUS

Depuis que Netflix s’est imposé comme un acteur majeur de la production-distribution cinématographique, nombre sont ceux qui reprochent à la plateforme la faiblesse des films qu’elle y propose, voire sa constance dans la déception avec des longs-métrages souvent précédés d’une hype gigantesque, mais qui ne convainquent jamais complètement. Et si Le Monde Après Nous venait mettre tout le monde d’accord, réussissant là où même des pourtant excellents Don’t Look Up, Mariage Story ou The Killer ont échoué ? Ç’aurait pu tant le réalisateur Sam Esmail assène une sacrée belle baffe enrubannée de génie avec son thriller d’anticipation. Mais… Il faut toujours qu’il y ait un « mais« , c’est épuisant. Son rythme particulier misant sur une intensité contenue et incarnée par une tension sourde ou sa fin jugée trop cryptique, ont encore déçu beaucoup d’agacés par un film anti-spectaculaire qui s’inscrit finalement plus dans un entre-deux à mi-chemin entre le huis-clos psychologique et le thriller apocalyptique d’auteur. On ne peut que regretter cet accueil mitigé (à l’opposé de celui plus dithyrambique de la critique) car Le Monde Après Nous est pourtant haletant à sa manière et sa fin est loin d’être aussi « frustrante et mystérieuse » qu’on ne l’entend ça et là. Elle est au contraire d’une brillante cohérence avec l’ensemble de l’œuvre -magistrale- signée du père de la série Mr Robot et coproduite par… Michelle et Barak Obama (oui oui, l’ex-couple présidentiel, qui fait une entrée fracassante dans le monde du septième art).

Dans Le Monde Après Nous, les petites vacances d’une famille assez banale dans une superbe maison louée pas très cher hors saison dans les Hamptons, est perturbée par l’arrivée des soi-disant propriétaires de la villa au milieu de la nuit. Ces derniers auraient fui un black-out qui viendrait de frapper New-York. Petit à petit, tous les signaux semblent leur indiquer que les Etats-Unis sont en train de s’effondrer. Mais pourquoi ? Une attaque terroriste ? Un accident écologique ? Une invasion ? Une guerre civile ? Une menace nucléaire ? Une cyber-catastrophe ? Dans l’inconnu, ce groupe de personnages va devoir réfléchir à quoi et comment faire. Mais pour ça, encore faudrait-il pouvoir se faire confiance et pouvoir se croire.

Brillant. On savait Sam Esmail (sur)doué d’un imaginaire fort et capable de créer un univers passionnant observant le monde qui l’entoure. Mariant thriller, satire, anxiogène, technologie et anticipation, Le Monde Après Nous confirme l’étourdissante intelligence artistique de l’auteur. Avoir réussi une série marquante ne voulait pas dire être à l’aise avec le format plus resserré du long-métrage. Son Comet réalisé en 2014 n’avait pas démontré grand-chose. Mais pour son second effort, Esmail frappe très très fort.

Le Monde Après Nous fonctionne comme un aspirateur, on est littéralement happé par la puissance d’un impressionnant et insoutenable suspens, qu’Esmail parvient à déployer tant dans son écriture qu’à travers sa mise en scène, tous deux d’une maîtrise assez exceptionnelle. L’écriture prend le parti de se mettre au diapason du regard de ses personnages. Ils sont isolés, on est isolés. Ils n’ont aucune information, on n’a aucune information. Ils ne savent pas ce qu’il se passe, on ne sait pas ce qu’il se passe. Ils sont perdus et déstabilisés, on est perdus et déstabilisés. Jamais l’on aura une longueur d’avance sur eux et c’est ce qui rend le film si captivant, mystérieux et oppressant. En quête d’explications, de réponses, d’indices, on est comme ce petit microcosme, inquiets, désorientés, paniqués puis tétanisés face à un invisible inconnu menaçant. De son côté, la mise en scène, particulièrement immersive, vient soutenir ce qu’Esmail traduit par l’écriture. Virtuose et souvent surprenante, la réalisation est dingue, totalement en prise avec ce qu’elle tente de montrer entre jeux de focales, travail de montage, plans-séquences, soutien musical, choix de cadrage… Rien n’est laissé au hasard pour accroître le sentiment d’immersion dans un cauchemar que l’on a du mal à jauger, plus proche de Kafka, de Stephen King ou de Black Mirror ?
En soi, Sam Esmail n’invente rien. Au contraire, il remue des ingrédients bien connus du genre et étire sa palette d’inspirations de Shyamalan à Jordan Peele. Mais en mieux, et avec du Hitchcock en plus ! Tout s’emboîte et fonctionne à la perfection dans une sorte de géniale symphonie terrifiante, tant dans les moments intimistes chargés d’angoisse paranoïaque que une poignée de scènes spectaculaires laissant bouche bée. Le suspens captive, l’ambiance anxiogène oppresse, l’immersion saisit, l’exercice périlleux se tient de la première à la dernière minute (quelle conclusion subtile et si maligne !) et le propos ne se noie jamais dans le spectacle (et vice versa). Car en creux de ce portrait d’un mystérieux chaos en cours qui dénonce notre addiction aux technologies numériques, Sam Esmail dresse un portrait effrayant de l’humanité (paniquée devant l’inconnu), avec un regard épris d’un pessimisme glaçant.

 

Par Nicolas Rieux

One thought on “LE MONDE APRÈS NOUS de Sam Esmail : la critique du film [Netflix]

  1. Attends…Pas un mot sur le message opposant problématiques WASPs et afro-américaines ? Pas un mot sur le traitement putassier de la jeunesse tantôt agressive, immature puis mollasse, tentatrice (Myha’la Herrold a 27 ANS !) ou rebelle puis totalement snowflake ? On en parle du fait que finalement, c’est la mère blanche qui la sauve malgré les reproches ? On en parle de la mère blanche et du père afro dont la danse est une métaphore d’un adultère inabouti/inassouvi (c’est eux qui le disent) ? On en parle de la sexualisation des afro-américains ? On en parle de l’enfant qui se barre comme métaphore soulignée à gros traits de la civilisation occidentale droguée aux séries ? On en parle du traitement du « méchant » Bacon qui en fait a une fille et la protège ? On en parle de la pseudo antipub Tesla qui en fait les valorise comme summum (certes inutile et dangereux) de la tech ?
    Non seulement c’est lent et peu inspiré mais c’est déjà vu, chiant et sans finesse, typique des trucs qui poussent les réacs à hurler dès qu’un film est produit par des afro-américains. Ben là, c’est la première fois que je les comprends et ça…c’est pas bon. Antebellum faisait bien mieux et Shyamalan, dans son trip puritain-pentecôtiste, était au moins fidèle à ses idées à la con.
    Bonne chronique, cependant, vous n’êtes pas en cause (accueil mitigé ? tu m’étonnes) .

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