Mondociné

WELCOME TO NEW YORK d’Abel Ferrara
#Cannes2014 – Critique (sortie VOD – drame)

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Spectateurs

411135.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxxMondo-mètre
note 2
Carte d’identité :
Nom : Welcome to New York
Père : Abel Ferrara
Livret de famille : Gérard Depardieu (Devereaux), Jacqueline Bisset (Mme Devereaux), Amy Ferguson (Renee), Paul Calderon (Pierre), Ronald Guttman (Roullot), Marie Moute (Sophie Devereaux), Pamela Afesi (femme de chambre), Shanyn Leigh (journaliste française)…
Date de naissance : 2014
Majorité : 17 mai 2014 (en VOD)
Nationalité : USA
Taille : 1h58
Poids : Budget 3,5 M$

 

Signes particuliers (+) : Malgré ses excès de jeu agaçant, on ne pourra pas reprocher à Depardieu de ne pas s’impliquer totalement dans ce projet, jusqu’au dénuement physique et moral. Au détour de (rares) scènes furtives, transpire ce qu’aurait pu être Welcome to New York.

Signes particuliers (-) : Formellement hideux et à la limite de l’amateurisme, insupportablement surjoué et surtout vide de sens et de consistance, Welcome to New York est un petit monument de crasse nauséabond et stupide dans lequel Ferrara semble se noyer sans trop savoir quoi faire si ce n’est répéter les mêmes scènes sordides pour appuyer un propos déjà bien compris, avant de tenter d’embrasser une (faible) profondeur qui finalement tombe dans la confusion, l’imprécision et le hors-sujet. Très mauvais.

 

LA DÉCHÉANCE D’ABEL FERRARA

LA CRITIQUE

Résumé : Devereaux est un homme puissant. Un homme qui manipule au quotidien des milliards de dollars. Un homme qui contrôle la destinée économique des nations. Un homme gouverné par un irrépressible et vorace appétit sexuel. Un homme qui rêve de sauver le monde et qui ne peut se sauver lui-même. Un homme terrifié. Un homme perdu. Regardez-le tomber.532442.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxx L’INTRO :

« L’affaire DSK » relue par le trublion underground Abel Ferrara, voilà un projet qui avait de quoi nourrir une forte attente et des espoirs d’œuvre prenant ses distances d’avec le simple objet opportuniste puant de récupération d’un fait divers sordide en visant l’emballage médiatique. D’autant que passionnant, marginal et riche en symbolisme, le cinéma d’Abel Ferrara s’est toujours inscrit dans une logique cohérente approfondissant sans cesse des thématiques viscérales comme la violence moderne, la déshumanisation et la déliquescence du monde, l’enfer de la déchéance et les quêtes de rédemption, l’écroulement des valeurs morales, la désillusion religieuse… Autant de préoccupations qui auraient pu coller à merveille à ce projet dominé par la stature imposante d’un Gérard Depardieu qui, sur le papier, pouvait faire un beau « faux Strauss-Khan ». Le cinéaste au regard sombre sur le monde qui l’entoure et qu’il contemple avec une forme de mélancolie acide et d’écœurement désabusé explosant généralement dans une violence cathartique inquiétante, était peut-être la personne la plus à-même d’aller chercher en profondeur la moelle substantifique viscérale tapie derrière cette affaire malsaine et ultra-médiatisée, qu’il « adapte » avec liberté même si tout est suffisamment désigné et limpide pour être entendable.547725.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxx

L’AVIS :

Plus qu’une simple retranscription de ce que l’on sait déjà, on espérait surtout voir le poil à gratter du cinéma américain s’intéresser à la face cachée d’un homme malade en proie à des démons symboles d’une époque « gerbante » en plein pourrissement, dans ce qui aurait pu devenir un portrait analytique et introspectif dépassant le seul fait divers pour incarner la sombre virée psychologique d’une déchéance pathétique et tout ce qu’elle traîne avec elle sur la psyché humaine torturée. Mais tout cela, c’était ce qu’aurait pu (et dû) être Welcome to New York. C’est surtout tout ce qu’il n’est pas, Abel Ferrara ayant réussi à nous surprendre au-delà de nos attentes, par un nanar en forme d’insulte à son propre talent. Un film où personne n’y gagne, pas plus le spectateur médusé par autant de nullité, que son auteur, voire son sujet.551417.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxx

D’une rare indigence et incommensurablement nauséabond quand il verse pas dans le crasse ou la prétention (Ferrara qui s’auto-cite par clins d’œil furtifs ou qui étale son amour mal placé pour la Nouvelle Vague godardienne entre citations d’A Bout de Souffle ou de Domicile Conjugal), Ferrera n’a rien à dire ou plutôt, s’il a quelque-chose à dire, il l’exprime bien mal et bien tard. Et le metteur en scène de s’appesantir avec vulgarité sur le cul, comme un mauvais réal d’érotique de bas étage dans des pelletées de séquences obscènes mal jouées, mal filmées et surtout provoquant une overdose de râles, de fessées, de tripotages de seins… 78 claques sur les fesses de prostituées de l’Est et 1256 râles jouisseurs de Depardieu plus tard, Welcome to New York daigne commencer. Après plus de trente minutes ridicules censées planter les bases d’un personnage, mais en réalité juste insupportables de fainéantise, de redondance et de vulgarité inutile, s’acharnant à bien peindre avec minutie les bords d’un tableau dont on a déjà saisi l’essence au bout de cinq minutes. On aura beau tenter de justifier ce tournoiement en rond en clamant que Ferrara tente de pointer du doigt la répétitivité du monde de son personnage entièrement auto-centré sur « la chose », rien n’y fera. Ferrara se cherche, nous perd, ne se trouve pas, et alors qu’aucun parfum ni de sulfureux, ni de psychologique, ni de pathétique, ni de quoi ce soit, ne ressort, reste juste une répétition des mêmes séquences voyeuristes et obscènes sans intérêt dans une apparente coquille vide.Capture-d’écran-2014-05-06-à-17.57.17

Puis Ferrara entre avec la même mollesse et la même indigence dans son « drame », entre stupidité, superficialité, grotesque rebutant et séquences provoquantes abscons et à côté de la plaque, à la justification insuffisante et dont on cherche la clé explicative (les dérives appuyés sur les origines juives d’Anne Sinclair par exemple). Ferrara semble tomber à l’image de son protagoniste, avant d’agiter les bras pour essayer de surnager dans le foutoir le plus total où il s’est enfermé, mélangeant tout et n’importe quoi dans un film sans cesse happé par le hors-sujet et englué dans une disette narrative et idéologique l’empêchant de se concentrer avec intelligence sur son véritable matériau. Il faut attendre les 25 dernières minutes pour qu’il tente de balbutier quelque-chose, qu’il essaie de bégayer ce portrait introspectif attendu d’un homme complexe. Mais une fois de plus, tout n’est que confusion, imprécision, mélange maladroit, idiotie et nullité frustrante, et trop rares sont les scènes laissant transpirer une substance et pointant quelque-chose d’intéressant (à l’instar de celles montrant un Devereaux agissant par pulsions incontrôlées comme s’il n’était plus maître de son propre corps et esprit ou celles pointant du doigt son absence de conscience de sa « responsabilité »).welcome-to-new-york-photo-537762864149b

Au final, Welcome to New York est l’une des plus grosses déceptions de l’année. Un film où son auteur se noie, sans doute obnubilé par quelques idées de départ ayant nourri son désir précipité d’aller vers un projet dont les carences évidentes témoigne de sa hâte par son manque de préparation, de réflexion, de fond. Et cet objet de la honte hideux et digne d’un boulot d’amateur emballé à la va-vite, de basculer dans un néant terrifiant où personne ne l’entend crier, Ferrara se révélant aussi peu inspiré formellement que bien incapable d’injecter une intelligente profondeur face à un sujet devant lequel il semble démuni et errant. En dépit des questionnements sur l’utilité de faire ou ne pas faire un tel film, sur un tel sujet, Welcome to New York est tout simplement mauvais, un navet bordélique et décousu à la résonance digne d’une cave en placo-plâtre. Mais où est donc passé Ferrara ?

Bande-annonce :


Welcome to New York – Bande-Annonce (VF) – DSK par Reviewerfr

Par Nicolas Rieux

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