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GRÂCE À DIEU de François Ozon : la critique du film

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La Mondo-Note :

Carte d’identité :
Nom : Grâce à Dieu
Père : François Ozon
Date de naissance : 2018
Majorité : 20 février 2019
Type : Sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 2h17 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de famille : Melvil Poupaud, Denis Ménochet, Swann Arlaud, Josiane Balasko, Frédéric Pierrot, Eric Caravaca, Hélène Vincent…

Signes particuliers : Du grand Ozon, juste, poignant et intelligent.

FRANÇOIS OZON, LA VOIX DES VICTIMES DE PÉDOPHILIE CLÉRICALE

LA CRITIQUE DE GRÂCE À DIEU

Synopsis : Alexandre vit à Lyon avec sa femme et ses enfants. Un jour, il découvre par hasard que le prêtre qui a abusé de lui aux scouts officie toujours auprès d’enfants. Il se lance alors dans un combat, très vite rejoint par François et Emmanuel, également victimes du prêtre, pour « libérer leur parole » sur ce qu’ils ont subi. Mais les répercussions et conséquences de ces aveux ne laisseront personne indemne.

C’est dans la plus grande discrétion que François Ozon a tourné Grâce à Dieu, son nouveau long-métrage basé sur l’affaire « Bernard Preynat » qui a récemment secoué la région lyonnaise et choqué la France entière. En 2016, le Père Bernard Preynat a été accusé d’agressions sexuelles sur des dizaines de jeunes enfants dans les années 70 et 80. Le scandale fera grand bruit sous l’impulsion de l’association La Parole Libérée qui regroupe de nombreuses victimes de l’ecclésiastique. En effet, outre les crimes abjects et répétés de l’homme d’église, c’est toute une hiérarchie qui est mise en cause dans l’affaire car après enquête, il s’est avéré que le diocèse de Lyon était au courant depuis longtemps… et n’a rien fait.

S’il se défend de tout film à charge menant une vendetta enragée contre l’église, François Ozon reconnaît en revanche avec ce nouveau film engagé et subversif, la volonté de parler à nouveau de la fragilité des hommes, ou plutôt de la fragilité masculine comme il le dit, terrain qu’il avait un peu exploré différemment sur Une Nouvelle Amie il y a quatre ans. Après plusieurs films consacrés à des figures féminines, Ozon avait envie de raconter l’histoire d’hommes blessés, meurtris dans leur âme comme dans leur chair. L’affaire Preynat était le sujet idéal car il concentrait à lui-seul beaucoup de thématiques, et surtout beaucoup de douleurs intimes d’hommes fragilisés par un passé et un secret commun. Et une évidence, Ozon était la bonne personne pour parler de cette histoire sur un écran de cinéma. Parce que s’il y a bien un point sur lequel le metteur en scène a toujours été prodigieusement doué, c’est pour parler avec tact de sujets controversés, pour se pencher sur les non-dits qui enflent intérieurement comme un caillot de sang mortel, pour dessiner des drames calmes qui explosent soudainement quand la machine s’emballe.

Avec Grâce à Dieu, François Ozon remonte le fil d’une affaire tragique en respectant son histoire, son sujet et ses personnages, qu’il ne sacrifie d’ailleurs jamais sur l’autel du thriller d’enquête à sensation. À l’inverse d’un Spotlight qui utilisait tous les codes du film d’investigation pour se rendre haletant, Grâce à Dieu privilégie la rhétorique du drame afin de rester vissé à une dimension humaine qui prévaut sur tout. Mais qui dit « drame » ne veut pas forcément dire que « anxiogènement pathos ». Et si le sujet peut-être lourd, Ozon réussit à ne jamais le rendre anxiogène justement. De la douleur, il y en a dans Grâce à Dieu. De la dureté, de l’émotion et de la compassion aussi. Mais Ozon ne se laisse jamais enfermer et piéger par cela. Régulièrement, Grâce à Dieu trouve le moyen de rappeler qu’il évoque certes la destruction dans le passé, mais qu’il met avant tout en lumière la reconstruction dans le présent, de personnes blessées qui relèvent la tête et décident de libérer leur parole pour guérir de plaies jamais cicatrisées. Sans être un feel good movie non plus, Grâce à Dieu est au moins un film de lumière, un film d’espoir, un film de lutte, un film qui ne veut pas s’enfermer et s’étouffer dans son horreur, un film fort et important qui transcende son histoire vraie par sa capacité à en explorer les multiples facettes au lieu de se limiter au regard le plus facile. Un film fort et important qui parle aussi de la culpabilité, du pardon et de l’impardonnable, du poids des traumas, de la religion, de l’incompréhension, du silence, du rejet, de la peur du regard… Il aurait été difficile de faire un film plus complet sur son sujet tant Grâce à Dieu embrasse tous les points de vue, n’oublie rien, y compris les choses qui se cachent dans les plus petits recoins.

Porté par d’excellents comédiens (citons pêle-mêle Melvil Poupaud, Denis Ménochet, Swann Arlaud, Eric Caravaca ou Josiane Balasko), Grâce à Dieu est un film qui en dérangera peut-être certains, mais qui a le mérite d’épauler et d’amplifier cette parole récemment libérée en essayant de comprendre et de faire comprendre. Grâce à Dieu ne s’attache pas seulement à dénoncer la pédophilie au sein d’un microcosme opaque, mais s’attaque aussi à ceux qui la couvre ou l’occulte, comme à ceux qui la minimise sans comprendre la douleur des victimes. Et tout cela, Ozon l’exprime avec une immense pudeur, ce qui vient d’autant plus adouber un travail formidable et magnifique. 

BANDE-ANNONCE :

Par Wilfried Rennahan

One thought on “GRÂCE À DIEU de François Ozon : la critique du film

  1. La Bible n’a jamais dit que les pretres ne devaient pas se marier ! L’apotre Pierre était marié !
    Tant de vies gachées à cause de mensonges véhiculés sous le couvert de la soutane !
    Que la honte poursuive ceux qui ont cachée la vérité pendant tant d’années et ont la responsabilité devant Dieu d’avoir sali son Nom !

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