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WAVES de Trey Edward Shults : la critique du film

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La Mondo-Note :

Carte d’identité :
Nom : Waves
Père : Trey Edward Shults
Date de naissance : 2019
Majorité : 29 janvier 2020
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 2h16 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de famille : Taylor Russell McKenzie, Kelvin Harrison Jr., Alexa Demie, Sterling K. Brown…

Signes particuliers : Puissant, sensoriel, un drame intimiste dévastateur et immersif.

LE PREMIER CHOC DE 2020 !

NOTRE AVIS SUR WAVES

Synopsis : Le parcours des membres d’une famille afro-américaine, menée par un patriarche protecteur, mais très exigeant, sur les eaux troubles du malheur et du deuil. Un chemin douloureux qui finira par les rassembler sur les rives de l’amour et du pardon, si tant est qu’ils parviennent à accepter de lâcher prise. 

Il y a un peu plus de quatre ans, Trey Edward Shults nous avait littéralement mis sur les genoux avec son premier long-métrage Krisha, petit chef-d’œuvre qui avait fait l’effet d’une puissante déflagration au festival de Deauville. Passé un détour mitigé par le film de genre avec l’intéressant (mais inabouti) It Comes at Night, le jeune cinéaste texan revient au drame pour sa passe de trois, à quelque chose de plus intimiste et épidermique. Véritable choc qui bouscule en profondeur, Waves est une vibrante épopée tour à tour romanesque ou tragique, qui déroule les fils de plusieurs destins assombris. Il y a celui de Tyler et Alexis, deux jeunes amoureux qui vivent intensément leur passion et essaie de se construire en avenir. Puis il y a celui d’Emily, la sœur de Tyler, qui tente de surnager dans des eaux troubles entre deuil, émancipation et pardon après un terrible choc. Et enfin, il y a celui de leurs parents, dont un patriarche aimant mais exigeant qui inflige une pression terrible à son fils sans se rendre compte de sa dureté bien intentionnée mais maladroite. Tous vont être ébranlés par un malheur qui va briser leurs vies. Avec cette question, pourront-ils s’en relever ? Pourront-ils faire comme la mer et continuer leur cycle malgré les difficultés ?

Toute la force du cinéma de Trey Edward Shults réside dans sa capacité à faire passer des sensations par le biais de l’image et du son. Shults a une maîtrise folle du pouvoir cinématographique et un sens inné pour communiquer des émotions, qu’elles soient de rage, de tristesse, d’amour, de douleur, de joie, de guérison… En utilisant toutes les possibilités créatives à sa disposition, le cinéaste a cet incroyable don de pouvoir couper complètement la distance qui sépare le spectateur de l’écran, pour l’immerger totalement dans ses histoires en développant un lien fusionnel entre son cinéma et son public. Avec Krisha, on vivait viscéralement le chemin douloureux d’une femme psychologiquement instable. Avec It Comes at Night, on était envahi par l’angoisse latente autour d’un homme vivant reclus alors que le monde collapsait face à une menace terrifiante. Aujourd’hui avec Waves, Shults nous emporte dans le maelström d’une puissante relation entre deux jeunes américains, nous faisant ressentir à chaque instant sa force comme son tragique, ses bonheurs les plus intenses comme ses peines les plus incommensurables. Sons, images, montage, musiques, formats, couleurs, Trey Edward Shults utilise tous les moyens pour transmettre, pour faire ressentir, pour faire de son film une expérience palpable proche du drame épique scrutant les contours d’une famille moyenne. Épique tout en restant de l’ordre de l’intime. C’est le pari du scénario et du film, raconter un ordinaire avec des images extraordinaires.

Deux parties bien distinctes coexistent dans Waves, l’histoire d’une tentative de construction puis celle d’une tentative de reconstruction après un point charnière. Si la première est clairement supérieure par la folle passion qui l’anime, les deux forment ensemble un portrait familial profondément déchirant qui fait l’effet d’une accumulation de vagues. D’où le titre ? Probablement, car Waves est ainsi, comme un incessant ballet tumultueux qui ne laisse aucun répit, qui nous noie dans son cycle infini, et qui laisse entrevoir l’essentiel dans l’écume qui traîne en fin de vague, une fois que la furie passionnelle est passée. Mais quel est cet « essentiel » ? En creux de son aventure intimiste, Waves évoque beaucoup de choses, la notion de masculinité ébranlée, la pression patriarcale, la peur de la vulnérabilité, les relations père-fils, père-fille aussi, le deuil, le pardon, les problèmes raciaux, la nécessité de trouver sa voie, de faire entendre sa voix… A travers ce portrait universel (le récit pourrait être transposé n’importe où, n’importe quand), Trey Edward Shults parle finalement de la vie, et du combat qui l’agite entre sa part de hasard et sa part de fatalisme. Produit par le même studio qui nous avait sorti l’éblouissant Moonlight il y a trois ans, Waves fait écho au film de Barry Jenkins. Non pas par son sujet ou son esthétique, mais parce qu’il est une claque similaire, la preuve que le cinéma indépendant américain est encore capable de grandes choses et qu’il est un vivier de jeunes talents bouillonnant d’ardeur.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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