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TOUT PEUT CHANGER, ET SI LES FEMMES COMPTAIENT À HOLLYWOOD ? de Tom Donahue : la critique du film

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Spectateurs

La Mondo-Note :

Carte d’identité :
Nom : This changes everything
Père : Tom Donahue
Date de naissance : 2019
Majorité : 19 février 2020
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h35 / Poids : NC
Genre : Documentaire

Livret de famille : Geena Davis, Meryl Streep, Chloë Grace Moretz, Sharon Stone, Jessica Chastain, Cate Blanchett, Natalie Portman, Sandra Oh, Alan Alda…

Signes particuliers : Un sujet d’actualité traité avec sérieux.

ET SI LES FEMMES COMPTAIENT A HOLLYWOOD ?

NOTRE AVIS SUR TOUT PEUT CHANGER

Synopsis : Tout peut changer est un documentaire qui révèle ce qui se cache derrière l’une des aberrations de l’industrie du cinéma américain : la sous-représentation des femmes à Hollywood. Le réalisateur Tom Donahue met en avant des décennies de discrimination à l’égard des femmes derrière et devant la caméra, grâce notamment à une méthode inédite d’étude des données chiffrées, avec, à l’appui, des centaines de témoignages accablants. Plus important encore, le film cherche et propose des solutions qui vont au-delà de l’industrie du cinéma et bien au-delà des frontières américaines, à travers les témoignages de nombreuses voix d’Hollywood, dont Meryl Streep, Cate Blanchett, Natalie Portman, Reese Witherspoon, Sandra Oh, Jessica Chastain, Chloë Grace Moretz, Shonda Rhimes, ou encore, Geena Davis, également productrice exécutive du film ; pour mettre en exergue ce qui peut et doit changer. 

Si la carrière de Geena Davis n’a pas connu l’évolution qu’on lui prédestinait après le succès de Thelma et Louise (les échecs cuisants de L’île aux Pirates et Au Revoir à Jamais mis en scène par son mari Renny Harlin ont fait mal), l’artiste ne pointe pas pour autant au guichet des Intermittents à Pôle Emploi. Depuis quelques années, elle s’est considérablement investie dans un organisme de recherche qu’elle a elle-même créé, le Geena Davis Institute on Gender in Media. Sa mission, étudier la représentation des sexes dans les medias ou le cinéma. Aujourd’hui, le fruit des études menées depuis 2009 se retrouve au cœur du documentaire Tout Peut Changer, et si les femmes comptaient à Hollywood ?, réalisé par Tom Donahue et produit par Geena Davis. Donnant la paroles aux plus grandes stars du système, de Meryl Streep à Jessica Chastain en passant par Natalie Portman, Cate Blanchett, Sandra Oh ou Reese Witherspoon, Tout Peut Changer détaille son constat alarmant sur la sous-représentation des femmes dans le cinéma américain, l’analyse de l’intérieur et essaie d’imaginer quelques directions envisageables pour que les choses changent. Nécessaire.

A l’heure de #MeToo, de la poussée du féminisme et du combat pour plus de justice, de parité et d’égalité, Tout Peut Changer met de côté les polémiques faciles pour soulever un problème de fond dans le cinéma hollywoodien : la terrible sous (ou non)-représentation des femmes, que ce soit dans l’industrie elle-même ou dans ce qu’elle fabrique à l’écran. Le film de Tom Donahue n’a rien d’une saillie hystérique hurlant sa critique avec une colère aveuglée. Au contraire, l’entreprise est le fruit d’une vaste étude qui a aboutit sur un constat plus qu’inquiétant, chiffres précis à l’appui. En 2018, 92% des grosses productions ont été dirigées par des hommes. Dans toute l’histoire des Oscars, une seule femme a été récompensée pour son travail de réalisatrice (Kathryn Bigelow pour Démineurs). Si l’on passe l’ensemble des films produits à Hollywood sur une année, très peu passe le célèbre test de Bechdel. Mais le documentaire ne se contente pas de parler du monde très fermé de la mise en scène. Côté comédiennes, la situation n’est guère plus glorieuse. Les premiers rôles féminins restent assez rares malgré le succès de superproductions tels que les Hunger Games, Wonder Woman ou Captain Marvel (autre chiffre, en 2017, le Top 100 des meilleurs films révèle que ceux ayant une femme pour personnage principal étaient bien plus rentable !). Bref, des arguments très solides, Tout Peut Changer n’en manque pas, et c’est justement cette précision du travail accompli basé sur des études sérieuses, qui rend le résultat si crédible. A cela s’ajoute des interventions pertinentes, quand Meryl Streep ou Sharon Stone parlent du haut de leur expérience, quand Jessica Chastain ou Natalie Portman analysent du haut de leur intelligence, ou quand Chloe Grace Moretz expose son cas symbolique, lorsqu’à 16 ans, on a demandé à la costumière d’un de ses films, de rembourrer son soutien-gorge car sa poitrine n’était pas assez généreuse. Et Tout Peut Changer de lier avec intelligence sous-représentation, sexisme et discrimination, sans jamais venir flirter avec la ligne jaune du mélange malhabile et décrédibilisant.

Néanmoins, on pourra toujours regretter qu’au-delà de l’importance majeure d’un tel documentaire dans le contexte actuel, le film de Tom Donahue s’enferme parfois dans le dirigisme didactique de sa ligne engagée, sa rhétorique démonstrative très forcée oubliant des choses et créant trop de raccourcis pour mieux aller dans le sens de ses idées. En résulte un effort qui peine à dépasser le statut de simple exposé, certes admirablement détaillé, mais enfonçant des portes ouvertes car réticent à aller analyser en profondeur certaines problématiques par peur de quitter les sentiers bien battus du conformisme dans lequel il s’est rangé. La démarche était bonne mais le résultat semble trop souvent se limiter à un discours démago calqué sur des argumentaires à la mode, qu’il compile sans les dépasser pour voir plus loin et offrir une réflexion poussée et audacieuse. Porté par de nobles intentions difficilement discutables, Tout Peut Changer n’est pas toujours à la hauteur de celles-ci car au lieu de discuter de son sujet, il se contente trop souvent de faire dans le long spot publicitaire engagé, beaucoup trop facile pour convaincre. En un sens, presque aussi paresseux sur le fond qu’il l’est sur sa forme. Car oui, rien à voir, mais pour un documentaire parlant du cinéma, voilà une chose dont il manque cruellement.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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