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BLOOD MACHINES de Seth Ickerman : la critique du film

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Carte d’identité :
Nom : Blood Machines
Père : Seth Ickerman
Date de naissance : 2019
Majorité : 1er septembre 2020 (ressortie le 11 août 2021)
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 50 + 52 min. / Poids : NC
Genre : SF

 

Livret de famille : Elisa Lasowski, Anders Heinrichsen, Noémie Stevens…

Signes particuliers : Un moyen-métrage diffusé en salles accompagné de son making-of.

 

 

SCIENCE-FICTION MADE IN FRANCE

NOTRE AVIS SUR BLOOD MACHINES

Synopsis : Deux chasseurs de l’espace traquent une machine tentant de s’émanciper. Après l’avoir abattue, ils assistent à un phénomène mystique : le spectre d’une jeune femme s’arrache de la carcasse mécanique comme si cette dernière avait une âme. Démarre une course poursuite à travers l’espace pour comprendre la nature de ce phénomène… 

  

Vous vous souvenez de Ickerman, ce mystérieux teaser qui avait enflammé la toile en 2016 ? On en savait alors que très peu si ce n’est que c’était 100% français, que c’était de la science-fiction d’une classe affolante quelque part entre Avalon et Blade Runner, et que c’était un petit avant-goût annonçant un projet encore à ses balbutiements. Finalement, il n’y aura pas eu de film Ickerman (dans l’immédiat, mais ça arrive peut-être). En revanche, il y a Blood Machines ! Coréalisé à quatre mains par Raphaël Hernandez et Savitri Joly-Gonfard, les deux gaillards qui se cachent derrière le pseudo Seth Ickerman, Blood Machines est un moyen-métrage de SF bien de chez nous, fruit du travail acharné d’un tandem qui se débat depuis plus de quinze ans pour auto-produire des trucs aussi visuellement étourdissants que sacrément burnés (allez faire un tour sur Youtube et tapez Kaydara, Turbo Killer ou Ickerman). Et pour les connaisseurs, il s’agit d’une sorte de prolongement extended de leur clip Turbo Killer.

Sur une cinquantaine de minutes, le duo baptisé Seth Ickerman impressionne encore une fois par ses talents de graphiste de génie. Et on part encore et toujours à rêvasser qu’au lieu de filer des millions d’euros à des tocards pour nous pondre des comédies franchouillardes d’un inintérêt cinématographique quasi total, on ferait mieux de financer les travaux de mecs comme ça. Les « Ickerman » bossent dans leur garage, sans pognon, juste à la force de leur passion et de leur talent. Et quand on voit le résultat, il ne faut pas bien longtemps pour comprendre que les deux gugusses ont bien plus de cinéma en eux qu’une immense majorité de tacherons tournant des productions industrialo-fainéantes. Sur le papier, Blood Machines rappelle un peu Asimov ou l’univers science-fictionnel de Battlestar Galactica, la monumentale série de Ronald D. Moore. L’histoire ? Deux chasseurs de l’espace pourchassent une machine qui essaie de s’émanciper. Après l’avoir abattu au-dessus d’une planète, ils assistent à un incroyable phénomène mystique : le spectre d’une femme s’extirpe de la carcasse de l’engin, comme si elle avait une âme. Débute une autre traque, cette fois pour comprendre l’origine du phénomène…

Sorte de délire SF sous acide, Blood Machines est un OFNI psychédélique où des images d’une beauté visuelle envoûtante se mêlent à un récit qui se voudrait philosophico-mystique, envahissant les pensées et les mirettes d’un spectateur totalement subjugué par l’originalité radicale d’une entreprise hors normes. On sent que Blood Machines a été fait avec les moyens du bord (quoique lesdits moyens étaient plus importants qu’auparavant). On sent surtout que s’ils avaient été sortis de leur « garage » par des producteurs courageux, le duo Seth Ickerman aurait pu faire de cette incroyable curiosité, un must de la SF moderne. Mais pour ça, il aurait fallu que quelqu’un les suive jusque dans leurs retranchements, jusque dans la folie de leur univers audacieusement barré. En l’état, Blood Machines a une imagerie plus proche d’une cinématique de jeu vidéo et un script qui souffre de franches limites que l’on peut comprendre. Le film ne raconte pas grand-chose de bien substantiel dans le fond et il manque un peu de mise en scène pure pour sublimer ce qu’il propose esthétiquement. Mais put***, qu’est-ce que ça claque justement question « esthétique », surtout pour du travail de « professionnels » condamnés à « l’amateurisme » par la force des choses et la frilosité de l’industrie actuelle. Blood Machines, c’est presque du cosplay cinématographique, tout a été fait maison, tout a été bricolé, travaillé dans la sueur et le sang à la force de la démerde et du système D. Et franchement, le résultat pourrait envoyer dans les cordes bien des blockbusters « sérieux » à grand renfort de torgnoles assénées avec du barbelé.

Bienvenue dans une sorte d’hallucination ultra-colorée, ultra-perchée et ultra-stylisée surtout. Blood Machines navigue entre une somme de références élargies allant de Ghost in the Shell à Blade Runner, il furète autant du côté de la SF dite « dure » que du cyberpunk déjanté. Il y a du sérieux et du second degré, mais globalement c’est le premier qui l’emporte car Blood Machines n’a pas besoin de jouer avec sa cheaperie pour s’en excuser… puisqu’il n’a rien de vraiment cheap en soi (à part le jeu de certains de ses comédiens). Le film assume son univers et son production design tel qu’il est, et il a bien raison car si les images peuvent un peu surprendre au départ, on finit vite par s’y abandonner comme Gégé Depardieu dans un bon pinard artisanal. Enfin, impossible de ne pas toucher un mot de la somptueuse musique de Carpenter Brut qui importe autant que les images, les SFX ou les acteurs (un casting hétéroclite où brillent davantage de très bonnes comédiennes, compensant le jeu plus limité du danois Anders Heinrichsen). A noter que le film ne sort pas seul en salles puisqu’il sera accompagné de son excellent making-of (comme un double programme du coup) afin de prolonger l’expérience et atteindre la durée d’une séance classique.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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