Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : 24 Jours, la vérité sur l’affaire Ilan Halimi
Père : Alexandre Arcady
Livret de famille : Zabou Breitman (Ruth Halimi), Pascal Elbé (Didier Halimi), Jacques Gamblin (Commandant Delcour), Sylvie Testud (Brigitte Farell), Eric Caravaca (José), Syrus Shahidi (Ilan), Alka Balbir (Yaël), Tony Harrisson (Youssouf), Olivier Sitruk (Raphy), Olivier Barthélemy (Johan), Matthieu Boujenah (Ribeiro)…
Date de naissance : 2014
Majorité : 30 avril 2014 (en salles)
Nationalité : France
Taille : 1h51 / Poids : Budget 5 M€
Signes particuliers (+) : Le sujet terrible et révoltant ici mis en lumière est, et restera, la seule arme de défense possible pour ce dernier effort d’Arcady, qui a seulement pour lui la démarche d’essayer de garder une certaine sobriété malgré sa thématique et au de-là du débat de son principe même d’existence.
Signes particuliers (-) : Parce que dans une perspective critique, un film évoquant une telle affaire tristement bien réelle n’a pas, et ne doit pas, être jugé sur la seule base de son sujet mais pour ses valeurs cinématographiques, alors oui, 24 Jours n’est pas un bon film. Casting en roue libre, mise en scène paresseuse voire inexistante, étrange absence de poigne, excès de pudeur bridant l’émotion, ouverture du propos niée… Reste aussi l’anormalité questionneuse de ce sentiment de gêne et de mal à l’aise à ne pas avoir apprécié une oeuvre…
LA CRITIQUE SUR UN FIL
LA CRITIQUE
Résumé : Elle est entrée dans une boutique de téléphonie sur le boulevard Voltaire. Elle a fait mine de s’intéresser aux nouveaux portables, a obtenu le numéro du vendeur et s’en est allée. Elle l’a rappelé dès le lendemain, lui a dit qu’elle voulait le revoir. Ilan ne s’est pas méfié. Il avait vingt-trois ans, la vie devant lui… Comment pouvait-il se douter qu’en rejoignant cette jolie fille dans un café de la porte d’Orléans, il avait rendez-vous avec la mort ? Le vendredi 20 janvier 2006, Ilan Halimi, choisi par le gang des Barbares parce qu’il était juif, est enlevé et conduit dans un appartement de Bagneux. Il y sera séquestré et torturé pendant trois semaines avant d’être jeté dans un bois par ses bourreaux. Retrouvé gisant nu le long d’une voie de chemin de fer à Sainte-Geneviève-des-Bois, il ne survivra pas à son calvaire. L’INTRO :
20 janvier 2006, Ilan Halimi, jeune homme kidnappé quelques semaines auparavant, est retrouvé gisant le long d’une voie de chemin de fer. Ilan Halimi était juif, et c’est pour cette raison là qu’il a été assassiné après avoir été horriblement torturé. On est au XXIème siècle, à Paris. Ce fait divers tragique et révoltant qui a remué l’opinion publique et relancé le débat tant sur l’antisémitisme que sur le racisme dans nos sociétés soi-disant évoluées, est emblématique du chemin qu’il nous reste à parcourir pour confronter l’horreur de certains courants, de certaines idéologies à faire froid dans le dos. La mère d’Ilan, Ruth Halimi, a souhaité tirer la sonnette d’alarme en cosignant un livre sur la vérité derrière l’affaire dite du « gang des barbares ». Mais au centre de tout ça, c’est avant tout le drame d’une famille meurtrie, le calvaire d’un fils, tout ça au nom de l’innommable.Cinéaste engagé et connu pour sa faculté à s’imprégner d’histoires fortes en allant chercher l’humain derrière le récit, Alexandre Arcady s’est employé à porter à l’écran avec un maximum d’authenticité, cette histoire atroce en partant du livre 24 Jours, pour « laisser une trace » et que « cette histoire ne tombe pas dans l’oubli ». C’est bien là après tout, l’un des potentiels indéniables et l’un des rôles du médium qu’est le cinéma, entretenir et faire perdurer le souvenir par l’image. Il aura fallu de la sueur pour monter un tel projet. Du courage, de l’audace et de l’envie aussi. Car étrangement, aucune aide de la télévision n’est venue à la rescousse. Heureusement pour le metteur en scène, les soutiens afflueront d’ailleurs. En coulisse comme sur le plateau, avec la dévotion des comédiens, dont une Zabou Breitman qui a accepté de remplacer au pied levé la tristement disparue Valérie Benguigui initialement prévue, comme le fils Alexandre Aja, aide à la réalisation sur la seconde équipe, comme l’implication de politiques ou de journalistes…L’AVIS :
24 Jours est un problème. Le dernier film d’un Alexandre Arcady à bout de souffle depuis plusieurs années, pose la question des limites du travail critique. Peux t-on analyser et juger cinématographiquement une œuvre dont l’intérêt est avant tout le travail de mémoire auquel elle s’adonne ? D’ailleurs, que juge t-on devant 24 Jours, le film ou le sujet ? Ce dernier effort louable d’Arcady est typiquement le genre d’œuvre à mettre un couteau sous la gorge de la critique. Car il s’efface derrière son sujet et le laisse parler à sa place. Que dire alors face à la retranscription de l’un des faits divers les plus révoltants et atroces de ce début de siècle. Que dire face à l’anormalité de cet étrange sentiment de gêne perdurant parce que l’on a pas apprécié une œuvre… Il devient alors important de dissocier le travail cinématographique, du sujet qu’il met en lumière. Et 24 Jours est un piètre film sur un sujet fort, ce qui rend difficile son approche critique. Pour prendre un pendant concret, que dire d’un devoir d’histoire sur un sujet tel que la Shoah par exemple, rendu par un élève avec 3 fautes par ligne, une écriture approximative et rédigé avec une désinvolture notoire ? Certes, le sujet de fond est dur, certes il prime sur le tout, mais la forme doit-elle être vraiment occultée ? C’est tout le problème de 24 Jours, film au sujet indiscutable et à la démarche louable, mais couché sur une copie indigne. Réalisation passéiste et nonchalante, rhétorique souvent proche du policier télévisé, montage maladroit, acteurs mal dirigés au jeu très (trop) souvent faux, émotion expurgée par excès de sobriété bienvenu de prime abord mais handicapant à la longue… Arcady se repose sur son histoire qu’il juge suffisante pour ne pas avoir à « réaliser ». En technicien qui met en boîte, le cinéaste rate tout dans la perspective d’un travail purement examiné d’un point de vue cinématographique. Reste évidemment le fait divers en lui-même, alarmiste sur le devoir de vigilance d’une société encore capable de dérives antisémites, ou plutôt tragiquement racistes si l’on veut ouvrir le débat au-delà de sa seule perspective, ce que le film peine à faire d’ailleurs.Pour ce qu’il est sur le fond, 24 Jours était nécessaire, quoique certains pourront toujours lui prêter l’entretien d’une forme de communautarisme sujet à questionnement sociétal pour la façon dont il est fait. Sinon nécessaire, en tout cas important, il s’attaque à la face sombre d’une société encore engluée dans certains préjugés nocifs bien qu’on pourra lui reprocher son manque d’ouverture sur le racisme en général. Sur la forme, c’est tout autre chose. Partagé entre une approche faiblarde qui participe de plomber cet effort courageux abordant un sujet difficile et l’intelligence d’une grande pudeur associée à une absence de cynisme dans la mise en scène de ce calvaire décrit avec froideur et sobriété du point de vue des parents Halimi confrontés à l’impuissance personnelle, au tâtonnement des forces de police et à la lâcheté des appareils judiciaires, 24 Jours est une épineuse équation cinématographique insoluble, aussi défendable qu’elle n’est indéfendable, méritante sans être de qualité, sociétalement intéressante tout en étant trop limitée pour être totalement respectée.
Bande-annonce :
Par Nicolas Rieux
Je partage ton avis à 100% ou presque. C’est un film qui est fort et qui peut paraître nécessaire, car il met en avant un sujet de société difficile et qui doit être dénoncé pour ne plus arrivé. Après malgré le fait qu’Arcady y ai mis du bon cœur et une bonne volonté, ce n’est pas pour autant un bon film. Pour ma part, je trouve tout de même le casting bon même s’ils exagèrent volontairement leurs émotions, contrairement à la mise en scène, la réal, la photo ou même la bande-son qui sont catastrophiques.