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EFFETS SECONDAIRES (critique – thriller)

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Spectateurs

642312-effets-secondaires-afficheMondo-mètre :
note 4.5
Carte d’identité :
Nom : Side Effects
Père : Steven Soderbergh
Livret de famille : Rooney Mara (Emilie), Jude Law (Banks), Catherine Zeta-Jones (Siebert), Channing Tatum (Martin), Vinessa Shaw (Deirdre)…
Date de naissance : 2013
Nationalité : USA
Taille/Poids : 1h46 – 30 millions $

Signes particuliers (+) : Un thriller honnête et plutôt efficace ou du moins regardable.

Signes particuliers (-) : Mineur, anecdotique et sans génie, le film pâtit de son histoire improbable aux rebondissements alambiqués très « De Palma » dans l’esprit. Vite vu, vite oublié.

 

VIVEMENT LA RETRAITE A 50 ANS !

Résumé : John Banks, un psychiatre ambitieux, prend en charge Emilie, une jeune femme dépressive ayant fait une tentative de suicide et dont le mari vient de sortir de prison. Il lui prescrit un nouveau médicament en phase de test. Lorsque Emilie assassine son mari dans une crise de somnambulisme, la réputation de Banks est remise en question…

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Il nous fait le coup depuis plusieurs années et dans le même temps, il enchaîne les projets tel un boulimique. Une fois de plus, Steven Soderbergh parle de retraite prochaine du métier de metteur en scène. Pas tout de suite mais après un soi-disant ultime projet, Behind the Candelabra qu’il a tourné dans la foulée de ce Effets Secondaires, un thriller psycho-médical mêlant intrigue policière à rebondissements  et univers pharmacologique. Pour cet « avant-dernier film » supposé, Soderbergh, qui multiplie les casquettes sous des pseudonymes (réalisateur mais aussi monteur et directeur photo) s’entoure encore une fois de  collaborateurs qu’il connait bien et avec lesquels il a l’habitude de travailler. On retrouve du coup au scénario, Scott Z. Burns (déjà derrière le script de Contagion, le précédent effort du cinéaste) et devant la caméra, Jude Law (Contagion aussi), Channing Tatum (Magic Mike, Piégée) ou encore Catherine Zeta-Jones (Traffic, Ocean Twelve).

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C’est il y a dix ans quand il travaillait sur la série médicale Wonderland que Scott Burns a eu l’idée du thriller Effets Secondaires qu’il souhaitait durant un temps, réaliser lui-même. Mais finalement, c’est Soderbergh qui a pris en charge la réalisation de ce projet atypique, histoire d’alimenter les quelques mois qui lui restent avant sa « fumeuse fin de carrière ». Le projet l’a attiré dit-il, car il lui permettait de poser une réflexion communément évoquée avec Burns sur le fait que la société moderne dénie le sentiment de tristesse à ses citoyens, comme si l’homme moderne n’avait plus le droit d’être triste et qu’il fallait combattre à tout prix ce sentiment à grands coups de médicaments. La chimie contre la nature en somme. De ce postulat, les deux hommes ont retravaillé le script, ambitionnant un thriller hitchcockien vertigineux aux multiples twists.

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Le sous-genre du thriller paramédical ou médical a toujours été très délicat par sa généralement complexité scénaristique amenant à des récits tortueux s’évertuant à se montrer passionnant mais peinant à y arriver totalement. Peut-être parce qu’il s’agit très souvent d’univers très mystérieux et trop éloignés du commun des mortels qui éprouve bien des difficultés à y entrer, à y trouver un enracinent psychologique et un attachement particulier. Peut-être aussi parce que le sous-genre n’a jamais réussi à trouver l’alchimie idéale entre le médical et le thriller ou encore, autre piste, peut-être parce qu’il s’appuie généralement sur des scripts quand même bien tiré par les cheveux, gênant dans l’identificatoire. On pourra citer comme exemples Mesure d’Urgence de Michael Apted, Le Mystère Andromède de Robert Wise, Morts Suspectes de Michael Crichton, Awake De Joy Harold, Anatomie de Stefen Ruzowitzky, Malice d’Harold Becker ou Dirty Pretty Things de Frears. Pas de mauvais films pour la plupart mais aucun n’a réellement convaincu totalement. Toujours est-il que les deux auteurs Burns et Soderbergh vont bosser pour essayer de rendre une atmosphère singulière, une ambiance particulière à un film plutôt bien ficelé au demeurant. Y sont-ils parvenus ?

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Comme pour chacune de ses entreprise, on ne pourra reprocher à Soderbergh sa nonchalance ou son je-m’en-foutisme. Le cinéaste a travaillé dur et avec minutie pour livrer un film documenté, très travaillé où les rouages de la mécanique globale ont été peaufinés, où les lieux ont leur importance (un film très new-yorkais dans l’âme, voulait-il), où le jeu des acteurs est affiné vers une visée précise recherchée (Tatum a bossé dur son élocution paraît-il). La méthode Hitchcock en effet. Puzzle complexe fait de complots, de machinations et d’interactions troubles entre les personnages, Effets Secondaires voulait capturer le spectateur dans les filets de son histoire baignant dans une certaine étrangeté dissimulant quelque-chose de présent mais que l’on a du mal à identifier, un peu dans un esprit presque De Palmesque. En même temps, Soderbergh n’a jamais été De Palma et puis quel De Palma aussi, celui de Body Double ou du navrant Passion ?

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Effets Secondaires n’est pas un mauvais film sur le fond. C’est un thriller plutôt regardable et efficace n’ennuyant jamais mais ne passionnant jamais non plus. Son principal défaut est de nous embarquer dans une intrigue extrêmement tirée par les cheveux, emberlificotée comme souvent dans le registre à nous ménager des twists qui ne relèvent plus de la ficelle mais de la corde épaisse. D’un thriller psychologique à la limite vaguement attirant, Effets Secondaires bascule dans le pur thriller paramédical en s’appuyant au fur et à mesure de son déroulement accéléré dans son dernier quart d’heure, sur des rebondissements improbables qui font vaciller le film entre nanar idiot et film en forme de toile d’araignée tissée et dont les extrémités viennent se resserrer sur le spectateur prenant la mesure de ce que les apparences cachaient depuis le départ. Et c’est bien là que l’on reste dubitatif devant la portée d’un film quand même bien limité au-delà de ses effets retors scénaristiques. La mécanique est certes bien exécutée mais la pilule a un peu de mal à passer.

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Rarement haletant, rarement virtuose, Effets Secondaires est un film mineur qui vient confirmer une tendance amorcée par Soderbergh il y a de cela plusieurs années. Ce nouvel exercice est une fois de plus un essai anecdotique posant le débat de savoir si le cinéaste ne serait pas lui-même un auteur anecdotique qui maquille sa réelle nature derrière un cinéma faussement intelligent et véritablement cynique. En somme, Soderbergh ne serait-il pas un metteur en scène très fortement surcoté depuis des années sur le marché et sur la base de quelques films intéressants à ces débuts mais trop peu pour convaincre du contraire ? C’est en tout cas ce que l’on est en droit de penser. Faux prodige réellement surestimé, Soderbergh ne cesse de s’enfoncer (finalement sa prétendue retraite pourrait être vraiment une bonne chose) et mis à part un dernier Contagion qui malgré ses défauts était plutôt intéressant, il n’a plus convaincu et épaté son monde depuis bien longtemps. Et ce n’est pas de nous faire croire qu’il peut être un faiseur de divertissement clinquant (les Ocean Eleven qui n’arrivent pas à la cheville de l’original) ou un auteur oeuvrant dans l’expérimentalisme (Full Frontal) qui nous feront courber l’échine devant le prétendu talent du bonhomme. Car au final, Effets Secondaires est un film assez banal, aussi vite regardé qu’assimilé et oublié. Tantôt critique bouillonnante du monde médical régi par l’argent, tantôt thriller de faux-semblants et tantôt policier pur censé être surprenant, les écarts du film ne l’amènent finalement nulle part si ce n’est à nous dire que le voyage n’a pas été si mouvementé que cela et que malgré la diversité des paysages qui ont défilé, aucun n’aura su vraiment nous marquer. Le film essaie d’être malin, il l’est, mais ce genre de malice là a été faite et refaite mille fois auparavant et le cinéma n’a pas attendu Soderbergh pour cela. Certains marcheront peut-être encore dans ce genre de combine foireuse mais les autres n’auront qu’un sentiment de dépit face à cette tentative de dédale dramatique aux ficelles trop grossières pour que l’on marche dans la blague s’appuyant sur un sujet sérieux.

Bande-annonce :

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