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3 BILLBOARDS – LES PANNEAUX DE LA VENGEANCE de Martin McDonagh : la critique du film

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Carte d’identité :
Nom : 3 Billboards oustide Ebbing, Missouri
Père : Martin McDonagh
Date de naissance : 2017
Majorité : 17 janvier 2017
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h56 / Poids : NC
Genre
: Drame, Polar

Livret de famille :  Frances McDormand, Woody Harrelson, Sam Rockwell, Peter Dinklage, John Hawkes, Lucas Hedges, Caleb Landry Jones, Samara Weaving, Abbie Cornish…

Signes particuliers : Fascinant, puissant, surprenant, du grand cinéma comme on l’aime, porté par une distribution exceptionnelle.

 LA CLAQUE DE CE DÉBUT D’ANNÉE !

LA CRITIQUE DE 3 BILLBOARDS

Résumé : Après des mois sans que l’enquête sur la mort de sa fille ait avancé, Mildred Hayes prend les choses en main, affichant un message controversé visant le très respecté chef de la police sur trois grands panneaux à l’entrée de leur ville.

Martin McDonagh est un réalisateur vraiment à part, capable d’embarquer le spectateur dans des univers où le loufoque se conjugue à merveille avec le drame et une certaine forme de violence jaillissante. Cinq ans après 7 Psychopathes, celui qui s’était révélé avec le délicieux Bons Baisers de Bruges, est de retour avec un troisième long-métrage qui marque l’heure de la maturité. Dire que le cinéaste signe là son meilleur film serait un euphémisme. 3 Billboards, les Panneaux de la Vengeance est un petit chef-d’œuvre, ou du moins un très grand film, d’ores et déjà en pôle position pour la prochaine moisson des Oscars.

Emmené par une formidable Frances McDormand, qui pourrait bien décrocher la statuette de la meilleure actrice sans qu’on n’y trouve à redire, 3 Billboards nous plonge dans le monde recroquevillé d’une petite bourgade du sud des Etats-Unis, du genre où le temps semble s’être arrêté il y a fort longtemps, à une époque où l’évolution des mœurs n’avait pas encore opéré la mue de la société. À l’entrée de la commune de Ebbing dans le Missouri, trois vieux panneaux publicitaires délabrés. C’est en passant devant pour la énième fois, que la malheureuse Mildred Hayes a une idée. Cela fait sept mois que sa fille a été torturée, violée, assassinée et brûlée. Depuis, rien, l’enquête n’avance pas, sa tristesse est toujours aussi insondable, et elle ressemble plus à un fantôme traversant le quotidien, qu’à une femme vivant vraiment sa vie. Ni une ni deux, Mildred loue les panneaux pour un an et y fait afficher un message visant directement le très respecté chef de police locale (excellent Woody Harrelson). Mais cet acte de provocation va prendre des allures de déclaration de guerre épique entre la mère éplorée et les autorités du coin.

À l’heure où l’on reproche trop souvent au cinéma sa consensualité, son manque d’originalité et son incapacité à surprendre et à prendre des risques, 3 Billboards fait figure de modèle à suivre. Parce qu’il prend un malin plaisir à sans cesse nous entraîner là où l’on ne s’y attend pas, parce que son ton est totalement déconcertant, parce qu’il ne ressemble à pas grand-chose de vraiment connu. Certains y verront un vague fond lorgnant vers les frères Coen, mais même pas. 3 Billboards est plus dramatique, plus mélancolique, plus noir, et surtout, sa douce folie se fond subtilement dans les pores du drame au point de nous placer dans une position d’équilibriste radicalement surprenante. Alors qu’il s’élance depuis un point de départ terrible et qu’il suit un chemin extrêmement dramatique avec son histoire de mère endeuillée et de crime sordide, 3 Billboards est… très drôle. Oui, vous avez bien lu, très drôle. Un humour certes très noir, dont le second degré pourra en déranger plus d’un, mais un humour ravageur, qui bien souvent n’a d’autre vocation que de soutenir un propos sur la petite médiocrité humaine. Mais le plus étonnant, c’est que malgré cette drôlerie qui nous surprend constamment à froid, le film de McDonagh est capable d’une émotion douloureuse bouleversante. C’est sans aucun doute la subtile gestion de cet équilibre précaire entre deux tons très opposés, qui fait que 3 Billboards est une telle réussite, chacune de ses facettes servant à sublimer l’autre en jouant la carte de l’inattendu permanent. Les scènes de drôlerie cocasse viennent systématiquement renforcer la puissance des scènes tragiques qui les précèdent ou les succèdent, et vice-versa dans l’autre sens. On en vient finalement à penser que le film de McDonagh est si imprévisible, qu’il est capable de tout. Et cette sensation d’imprédictibilité est un bonheur, celui de faire enfin face à une œuvre un peu nouvelle, capable d’être hilarante dans le déchirant et déchirante dans l’hilarité.

Mais le génie de 3 Billboards ne s’arrête pas là. Le film ne se contente pas d’être seulement l’œuvre d’un petit malin qui  cherche à se montrer en jouant avec les codes du cinéma. Ce que fait McDonagh avec son sens du grand écart jubilatoire, sert toujours un propos, propos qui vient parachever la complétude de ce tour de force brillant, ironique, palpitant et fascinant. A travers ce chassé-croisé dans une petite ville aux allures d’étouffante prison confinée, les personnages vont tous se renvoyer les uns les autres, à leur propre médiocrité, justifiée ou non. C’est là que 3 Billboards gagne ses galons d’œuvre somptueuse et intelligente, dans sa propension à imposer une réflexion sur l’être humain à travers un savoureux mélange qui tranche autant qu’un mariage sucré-salé. Un mélange qui n’a finalement rien d’artificiel, et qui symbolise en substance, cette idée que l’homme n’est jamais tout blanc ou tout noir, qu’il y a des nuances en chacun de nous, bon ou mauvais, malin ou stupide, égoïste ou généreux. L’être humain peut toujours être surprendre, dans un sens comme dans un autre, et c’est ce que traduit 3 Billboards et son constant esprit de surprise. Jamais il ne juge ses protagonistes car il est impossible de savoir où ils iront. L’être humain est imprévisible, ainsi donc est 3 Billboards. Formidable !

BANDE ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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