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MEN & CHICKEN de Anders Thomas Jensen : la critique du film

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men & chickennote 2.5 -5
Nom : Mænd & høns
Père : Anders Thomas Jensen
Date de naissance : 2015
Majorité : 25 mai 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : Danemark
Taille : 1h44 / Poids : NC
Genre : Comédie dramatique

Livret de famille : Mads Mikkelsen, David Dencik, Nicolas Bro, Nikolaj Lie Kaas, Søren Malling, Bodil Jorgensen…

Signes particuliers : La nouvelle charge d’humour noir du danois Anders Thomas Jensen.

VOYAGE AU PAYS DES FREAKS

LA CRITIQUE

Résumé : A la mort de leur père, Elias et Gabriel découvrent qu’ils ont été adoptés et que leur père biologique, Evelio Thanatos, est un généticien qui travaille dans le plus grand secret sur une île mystérieuse. Malgré leur relation houleuse, ils décident de partir ensemble à sa rencontre. Arrivés sur cette île éloignée de la civilisation, ils vont découvrir une fratrie étrange et des origines inquiétantes. Il devient évident que, décidément, on ne choisit pas sa famille.men & chicken_5L’INTRO :

Ceux qui connaissent le cinéma d’Anders Thomas Jensen sauront à quel point il est très particulier. Le danois s’est fait un spécialiste de la comédie dramatique grinçante fonctionnant à l’humour noir, et aura tutoyé les sommets avec des œuvres aussi singulières et jubilatoires que Les Bouchers Verts (2003) ou Adam’s Apple (2005). Pour son quatrième long-métrage, dix ans après sa dernière apparition (entretemps, il aura écrit de nombreux scénarios pour plusieurs confrères dont l’oscarisé Revenge), Jensen réunit une distribution pleine de talents, comptant notamment Mads Mikkelsen ou Nikolaj Lie Kaas (Les Enquêtes du Departement V), pour une virée subtilement fêlée et amorale, dans les coulisses d’une famille de « freaks dégénérés ».

Mænd og Høns Nikolaj Lie Kaas, Nicolas Bro, Mads Mikkelsen & Søren Malling Directed by Anders Thomas Jensen Produced by Tivi & Kim Magnusson M&M Production Photo Credit Rolf Konow

L’AVIS :

Une fois n’est pas coutume, Anders Thomas Jensen livre un film délicieusement irrévérencieux, au point d’avoir même fait polémique au Danemark où il aura été considéré comme discriminatoire en cela qu’il brocarde amusement des personnages souffrant de particularités physiques (en l’occurrence des becs-de-lièvre). Mais pour l’auteur habitué aux critiques, il ne s’agissait pas de faire dans la méchanceté mais plutôt de jouer avec l’éternel adage bien connu de tous : « On ne choisit pas sa famille ». Et alors que les difformités physiques de ses protagonistes ne sont qu’un moyen de les relier entre eux, Men & Chicken de tourner en dérision l’importance des acquis et des valeurs transmises par les parents dans notre construction personnelle. Comme l’explique le metteur en scène, « Sans ses acquis et ses valeurs, nous ne sommes pas si éloignés des animaux« . Et derrière ce spectacle tragicomique à la fantaisie saugrenue, Jensen de s’approcher d’un certain regard plein d’humanité et de tendresse sur des personnages mal-aimables. Mais est-ce bien leur faute ?

Mænd og Høns Nikolaj Lie Kaas & Dacid Dencik Directed by Anders Thomas Jensen Produced by Tivi & Kim Magnusson M&M Production Photo Credit Rolf Konow

Men & Chicken est un voyage aux confins d’un humour absurde, déconcertant pour les non-initiés mais tellement cocasse pour les plus ouverts à toute forme de drôlerie corrosive. Pendant une bonne première moitié, le nouveau long-métrage de Jensen régale par son surréalisme désopilant associé à une grandiloquente décadence. A travers le voyage initiatique de ces deux frangins partis à la découverte d’une famille dont il ne soupçonnait pas l’existence, Anders Thomas Jensen fait ce qu’il sait faire le mieux, présenter des personnages hauts en couleur et radicalement loufoques. Comment ne pas exploser de rire à la vue d’un Mads Mikkelsen adapte de la masturbation frénétique et grimé avec perruque bouclée, moustache imposante, bec-de-lèvre et mâchoire improbable. Comment résister devant un Nikolaj Lie Kass transformé en benêt de service avec coupe au bol et bouc de poil, en plus d’avoir des penchants que l’on ne dévoilera pas pour en préserver l’effet de surprise. Comment ne pas halluciner devant un David Dencik en apparence plus normal que ses congénères, mais dont les tocs déclencheront de furieux éclats de rire… La galerie de personnages brossée par Jensen est une nouvelle fois savoureuse et cette réunion de « marginaux bizarres » va doucement nous conduire vers un univers à l’irréalisme hilare, tout en étrangeté et en impertinence extrême.

Mænd og Høns Nikolas Bro, Søren Malling, Nikolas Lie Kaas & Mads Mikkelsen Directed by Anders Thomas Jensen Produced by Tivi & Kim Magnusson M&M Production Photo Credit Rolf Konow

Malheureusement, Men & Chicken ne réussira pas à tenir sa folle virée impayable sur la longueur et finira par s’essouffler à force de tourner un peu en rond autour de son étalage d’un humour jouissivement vulgaire et inélégant, mais quelque peu redondant dans sa frénésie déconcertante. Le ventre mou que connaîtra le film avant un final ô combien incongru (quoique prévisible) ne lui sera pas complètement fatal mais pourra risquer de voir décrocher un spectateur lassé par ce festival de salves barrées et burlesques, alors que l’intrigue patine, peinant à se renouveler pour mieux dépasser un postulat dans lequel il s’embourbe poussivement. Men & Chicken finira par tenter de redresser la tête dans un épilogue émouvant, dessinant enfin sa visée et son propos. Et c’est à travers lui, que l’on comprendra l’absence d’intentions méchantes de Jensen. Au contraire, la seule chose dont il pourra plaider coupable, c’est d’être de ces cinéastes qui passent par des voies faussement cyniques et véritablement amorales, pour mieux en venir au final, à une morale subtilement intelligente sur la condition humaine, à l’image de sa galerie d’êtres repoussants qui finissent par devenir tendrement empathiques. Mais pour cela, encore faut-il que le réalisateur ne les ait pas rendu involontairement énervants par sa maladresse d’en avoir fait peut-être un peu trop.

LA BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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