BABYSITTER de Monia Chokri : la critique du film

Trois ans après La Femme de mon Frère, la québécoise Monia Chokri est de retour avec une nouvelle comédie décalée adaptée d’une pièce de théâtre de la dramaturge Catherine Léger. Cette fois, c’est la vision de la femme dans le regard de la gente masculine qui inspire l’actrice-réalisatrice (vue notamment chez Xavier Dolan) et l’humour très aiguisé de Catherine Léger a trouvé un profond écho chez elle. Suite à une blague un peu sexiste devenue virale, un cadre sup fraîchement papa est suspendu par son employeur. Son frère qui veut prendre en main sa misogynie, sa femme au bord de la crise de nerf, l’arrivée d’une babysitter sexy, tout ça va chambouler son existence.

Si le pitch laisse augurer une comédie classique, pour ne pas dire convenue, l’univers très singulier de Monia Chokri va vite pousser son film à prendre la tangente pour aller convoler sur les terres de l’OVNI au style aussi décalé que déroutant. Avec une mise en scène qui flirte allègrement (et très étonnamment) avec les motifs du giallo pour créer une atmosphère étrange et une volonté d’ancrage féroce à la dénonciation du patriarcat moderne et du sexisme ordinaire chez ces hommes qui se croient progressistes sans réaliser qu’ils ont une vision ancrée dans leur ADN, Babysitter n’est finalement pas vraiment une comédie aux dents acérées mais plutôt une véritable diatribe déguisée en comédie. Monia Chokri dézingue du mâle avec délectation autant en s’amusant des clichés qu’en essayant de les prendre à contrepied. Mais malgré l’originalité de l’effort et un vrai univers personnel, sa comédie féministe déçoit. Parce qu’elle ressemble vite à un patchwork un peu cacophonique mélangeant plein d’idées sans vraiment se donner la peine de faire tenir l’édifice autrement qu’autour de son propos. L’équilibre de l’entreprise est très hasardeux mais en définitive, la réception de Babysitter est surtout une question d’affinité avec le ton surprenant d’un film lui-même surprenant.