Nom : The Walk
Père : Robert Zemeckis
Date de naissance : 2015
Majorité : 28 octobre 2015
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 2h03 / Poids : 35 M$
Genre : Biopic, Aventure
Livret de famille : Joseph Gordon-Levitt (Philippe Petit), Ben Kingsley (Papa Rudy), Charlotte Le Bon (Annie), César Domboy (Jean-François), Clément Sibony (Jean-Louis), James Badge Dale (Jean-Pierre), Ben Schwartz (Albert), Steve Valentine (Barry)…
Signes particuliers : Un spectacle à découvrir en 3D. Et si possible même, en IMAX !
QUAND LA VIE NE TIENT QU’À UN FIL…
LA CRITIQUE
Résumé : Biopic sur le funambule français Philippe Petit, célèbre pour avoir joint en 1974 les deux tours du World Trade Center sur un fil, suspendu au-dessus du vide.L’INTRO :
On avait laissé Robert Zemeckis il y a trois ans en train de faire faire des pirouettes aériennes à un Denzel Washington alcoolique dans le très inégal Flight. Aujourd’hui, alors que le monde entier commémore avec emphase le 30eme anniversaire de sa saga culte Retour vers le Futur, le cinéaste est de retour avec son 17eme long-métrage, un « biopic » sur le funambule français Philippe Petit, qui s’était illustré par un exploit d’équilibriste hors normes en 1974, lorsqu’il a marché sans attaches (et illégalement) sur une corde tendue entre les deux tours du World Trade Center. La performance mémorable du natif de Seine-et-Marne, qui avait ses armes à Paris avant son grand départ vers « sa piste aux étoiles », avait déjà fait l’objet d’un documentaire, l’excellent Le Funambule de James Marsh, récompensé de l’Oscar en 2008. Pour cette version fictionnalisée, c’est au comédien Joseph Gordon-Levitt, que Zemeckis a confié le soin d’incarner à l’écran l’artiste qu’est Philippe Petit. Sur un fil, l’acteur se dandine au milieu d’un casting international, allant de la France avec Clément Sibony ou César Domboy au Québec via la délicieuse Charlotte Le Bon, en passant par l’Angleterre avec l’incontournable Ben Kingsley ou les Etats-Unis avec Ben Schwartz.L’AVIS :
Cinéaste de la rêverie fascinante, Robert Zemeckis s’adonne à ce qu’il sait faire le mieux avec The Walk – Rêver plus Haut, à savoir se muer en conteur d’histoires fabuleuses dans lesquelles les spectateurs vibrent comme un seul homme devant le pouvoir grisant et immersif de l’image en tant qu’illustration des mots et des sensations. Des Retour vers le Futur à Seul au Monde, de Forrest Gump à Roger Rabbit en passant par Le Pôle Express ou Contact, Zemeckis a toujours eu pour lui, cette étonnante douceur porteuse, qui nous embarque follement dans un univers, une histoire, un ailleurs, où des personnages terriblement attachants nous font vivre leur aventure avec chaleur et bienveillance. Pas étonnant de voir que le metteur en scène est, de fait, moins à l’aise quand il cherche à s’éloigner de son « monde », comme il a pu le faire avec Flight, l’un de ses films les plus sombres, et peut-être l’un des moins réussis.Une fois n’est pas coutume, avec The Walk, Robert Zemeckis nous entraîne dans une histoire de rêve émerveillé. Pas au sens littéral de la chose, mais plutôt dans celui d’un homme extraordinaire qui voulait marcher dans les airs et défier l’impossible. Le cinéaste nous tend la main et nous propose une invitation à venir tutoyer de près l’incroyable. Fou à lier pour les uns, artiste unique pour les autres, Philippe Petit voulait conquérir les toutes nouvelles tours du World Trade Center, alors fraîchement construites à l’époque. Les tours jumelles, ou plutôt les 43 mètres qui les séparaient. Son exploit entrera dans la légende et le récit de celui-ci ne pouvait pas mieux tomber, qu’entre les mains expertes d’un Zemeckis qui ne se contente pas de le relater avec détachement et distance, mais qui s’applique à le faire revivre, à nous le faire vivre. Avec The Walk, on n’est pas spectateur d’une performance insensée, on la vit, pas à pas, sur le même fil que celui foulé par le funambule. La traversée, comme en apesanteur dans l’espace-temps au point qu’on la croirait rendue en temps réel, est non seulement le grand moment de bravoure d’un film qui trouve dans cet épilogue fabuleux, sa meilleure mesure, mais s’impose surtout comme un intense moment de cinéma immersif, transfiguré par une 3D vertigineuse qui donne lieu à une étourdissante expérience où l’on se surprend à avoir les jambes tremblotantes au rythme des battements cardiaques accélérés qui accompagnent chaque pas de cette folie fantastique.Sur la forme, c’est en adoptant les codes du film de casse des années 60-70 que Zemeckis porte son récit à l’écran. Musique jazzy, montage percutant, précision du détail, minutie du déroulé narratif, rythme d’horloger pas loin du pas de danse permanent, interaction avec le spectateur (via un dialogue face caméra)… On se croirait presque dans Guet-Apens, L’Inconnu de Las Vegas, Les Pirates du Métro, L’Arnaque ou Le Dossier Anderson ! The Walk swingue et rend compte de son sujet comme il a été vécu à l’époque, comme un « coup ». Et quoi de mieux que les oripeaux du film de braquage pour raconter ce qui aura été un hold up artistique organisé comme un acte criminel rocambolesque !Fascinant pour l’aventure dont il narre le déroulé, et palpitant de bout en bout alors que son auteur au savoir-faire indéniable parvient à nous tenir follement en haleine, des préparatifs initiaux à l’exécution finale, The Walk est un acte de magie cinématographique. Un acte passé pas loin du brillant, mais qu’une petite série de défauts vient remettre à sa juste place, celle d’un bon film qui aurait pu être meilleur, déjà s’il avait pu disposer d’un budget à la hauteur de ce qu’il s’applique à proposer. D’abord, avec une écriture un brin mieux ficelée. The Walk s’égare par moments dans quelques micro-redondances et menues longueurs, sans doute le contre-effet inéluctable de l’attente de son grand épilogue final où le virtuose de l’équilibre prend son envol. Dommage qu’il ne mette pas mieux à profit ce cheminement, pour mieux pour étayer certaines pistes entrouvertes, comme l’angle psychologique par exemple. Mais surtout, ce sont certaines facettes de son arborescence visuelle qui gênent, alternant fulgurances sublimes et petits traits enlaidissant son beau visage. Si l’on tirera un grand coup de chapeau à l’utilisation faite de la 3D et son intégration dans l’histoire, on émettra en revanche quelques réserves sur le look très numérique de l’affaire et ses fonds verts versatiles (les trop minces 35 millions se font sentir), qui ne tend pas toujours son meilleur profil, pas aidé cela dit, par la photographie du maestro Dariusz Wolski (Dark City, Prometheus, Pirates des Caraïbes) parfois abominable. Enfin, vient la question de la distribution. En dehors de l’énergie grisante d’un excellent Joseph Gordon-Levitt gentiment cabotin, mais juste ce qu’il faut pour donner corps et âme à son personnage, et d’un étonnant méconnu César Domboy, les prestations de ses petits camarades ne seront pas de nature à convaincre, d’un Clément Sibony un peu trop lisse à une Charlotte Le Bon, que l’on connu autrement meilleure (La Marche, par exemple).Mais malgré ses travers matière à débat, The Walk reste un spectacle à sensations fortes, qui parvient à toucher du doigt l’effet recherché par sa démarche fondatrice, celui d’immerger complètement le spectateur au cœur même de l’aventure, des ressentis, comme s’il glissait lui-même ses pieds dans ces fines chaussures évoluant sur ce fil branlant. Et parce que l’effet d’immersion fonctionne, c’est tout ce The Walk qui se met à fonctionner dans son sillage, parce que le but est atteint, parce que les émotions sont là, parce que l’on vit pleinement l’effort, entre angoisse, rires et regard captivé. Le tout, non sans une pointe d’amère mélancolie touchante mouillant la cornée, lorsque Zemeckis, au détour d’une séquence aussi discrète que pudique, se livre à un petit hommage à ses tours disparues, et à travers lui, aux gens qui y ont péri un triste 11 septembre. Un plan presque anecdotique, où s’évapore dans un regard et un soupir lourd de sens, ce petit salut d’en-haut vers ceux qui ont quitté cette terre d’en-bas. Juste assez pour raccrocher cette parenthèse fabuleuse à la réalité de notre monde. Sans doute l’un des plus beaux passages du film, peut-être parce qu’il passe presque inaperçu tant il est réalisé avec finesse.
LA BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux