Dans la foulée de notre rencontre avec Jack O’Connell, héros du dernier film d’Angelina Jolie Invincible, qui sortira en salles mercredi 07 janvier, rencontre avec l’artiste japonais Miyavi. Le guitariste et chanteur nippon, superstar dans son pays et dans le monde, s’essaie pour la première fois au métier d’acteur et incarne le chef d’un camp militaire qui va martyriser Louis Zamperini, dans ce biopic consacré au destin incroyable de ce héros, coureur olympique dont l’avion s’est écrasé en mer en 1942 pendant la Deuxième Guerre Mondiale, tuant huit membres de l’équipage et laissant les trois rescapés sur un canot de sauvetage où deux d’entre eux survécurent 47 jours durant, avant d’être capturés par la marine japonaise et envoyés dans un camp de prisonniers de guerre.
Des blogueurs ? Oh cool. Je vais devoir être poli et gentil alors…
Comment êtes-vous arrivés sur ce film ? Comment Angelina Jolie vous a t-elle convaincu de prendre part à l’aventure ?
Convaincre est le mot juste. Comme vous le savez, je n’ai aucune expérience du métier d’acteur. Je n’étais même pas sûr d’être capable d’endosser ce rôle, d’autant qu’il s’agit d’une histoire très controversée et la Deuxième Guerre Mondiale est un sujet sensible au Japon. Je ne souhaitais en aucun cas incarner une mauvaise image du Japon, le pays où je suis né, où j’ai grandi et que j’aime. Au départ, j’étais hésitant mais il y avait une directrice de casting japonaise, Yoko. Elle est venue me voir à mon bureau à Tokyo. Elle ne m’a rien dit à propos du film et de qui le réalisait. Elle m’a demandé quel genre de musique je faisais, quel genre de musique j’aimais, quel était mon actrice préférée… Et je lui ai répondu « Angelina Jolie » ! Elle ne m’a toujours rien à propos du film mais deux semaines plus tard, j’ai rencontré Angelina à Tokyo. Comme je le disais, j’étais toujours très hésitant mais quand je l’ai rencontré, tout est devenu évident. J’étais confiant. Le film est plein de sens, même à propos du peuple japonais car elle disait qu’elle voulait créer une œuvre qui serait comme un pont entre l’Amérique et le Japon, mais aussi les autres pays aux destins similaires comme la Russie par exemple. Cette histoire pourrait se passer n’importe où, pas nécessairement au Japon. Il y a des thématiques universelles. Ce n’est pas un film sur le Japon mais sur le pardon. Le message, Louis Zamperini et sa vie évoque à quel point l’être humain peut être fort. C’est en cela que je trouve que le film est très significatif.
Comment vous êtes-vous préparé pour le rôle ?
J’ai commencé à étudier l’anglais il y a huit ans et je ne me suis jamais imaginé être un jour dans un film hollywwoodien. C’est ma première fois à Paris en tant qu’acteur. Je suis déjà venu en tant que musicien ici, à Nantes, à Reims… Donc, j’ai travaillé les dialogues en anglais. C’était important de mettre de l’émotion dans le jeu. Je devais donc être familier avec le texte et ce que je devais dire sur le plateau. On a eu de nombreuses discussions à propos du personnage avec Angie (Angelina Jolie – ndlr) pour ne pas le caricaturer comme un simple méchant prévisible pour le public, frappant et hurlant. Ce n’était pas ce que nous voulions. Nous voulions de l’humanité, de la profondeur, montrer plusieurs facettes de cet être humain avec du respect pour l’homme et sa famille. Nous avons trouvé des articles à propos de lui, de sa personnalité. Nous sommes tombés sur un article sur quand il est parti se cacher dans les montagnes pendant sept années afin d’échapper à ses actes criminels et sur comment il souhaitait désespérément revoir sa mère. Avec cet article, nous avons pu cerner son humanité, ainsi que le fait qu’il était terrifié, tiraillé en tant qu’homme. Comme le rôle, il était très nuancé et sadique. Deux facettes qu’il était important de représenter dans le film. J’ai essayé d’imaginer, si des gens tuaient ma famille… Je voudrais tout faire pour les faire payer. C’était des conditions extrêmes, la situation, tout le monde y prenait part, les gardes et les prisonniers. Ils avaient besoin de protéger leurs familles, leur pays. C’est la première chose que j’ai essayé de faire en entrant dans la peau du personnage.
Vous avez pu rencontrer Louis Zamperini avant le tournage ?
Je l’ai rencontré après le tournage. Ce moment a été précieux parce qu’il n’a jamais pu rencontrer « The Bird » (le surnom du chef du camp militaire que campe Miyavi – ndlr) après la fin de la guerre. Pour moi, en tant qu’acteur jouant « The Bird », je me sentais presque un peu responsable. J’ai emmené ma femme et mes deux filles et il nous a accueilli. Nous avons passé un bon moment. Nous avons plaisanté, joué avec mes enfants… Il était très charmant et généreux. Il avait 96 ans et il était plein de vie, si fort… J’ai senti que le pardon est quelque-chose de réel.
La relation entre votre personnage et celui de Jack O’Connell est fondée sur beaucoup de haine. Ce fut compliqué à jouer ? Avez-vous essayé de garder de la distance sur le plateau ?
Oui, on a gardé une certaine distance entre nous. Parce que je suis un musicien avec beaucoup de fans, je voulais traîner avec Jack comme des amis mais on ne l’a pas fait car ça aurait été compliqué à gérer. Je devais mettre du réalisme, de vrais sentiments. C’était un sentiment compliqué avec de l’amour et de la haine. « The Bird » et moi sommes semblables, il voulait être comme Louis mais il savait qu’il ne le pouvait pas. Pendant la guerre, il ne pouvait cesser de penser à Louis mais après la guerre, c’était Louis qui ne pouvait cesser de penser à lui. Ils étaient connectés. Mais comme « The Bird » voulait aimer et être aimé, il a fini par en devenir sadique, brutal et il a tourmenté Louis et les autres prisonniers. Il essayait de garder de la distance, y compris avec les soldats japonais, parce qu’il était tellement isolé, il s’étouffait chaque jour.
Votre expérience dans la musique vous a t-elle aidé pour préparer votre rôle ?
Je pense. Je veux dire, je ne savais pas comment jouer donc j’ai essayé de ne pas jouer. L’expérience de la scène a été précieuse pour jouer devant des dizaines de prisonniers devant la caméra. Je devais intimider tout le monde. Sauf que je tenais une matraque au lieu d’une guitare.
Quelle était l’ambiance sur le plateau ?
Intense. Avec Angie, nous avons passé de super moments. C’est une grande artiste. Elle est connue comme actrice mais c’est une artiste, une grande créatrice en pleine transition entre le métier d’actrice et de réalisatrice. C’est génial et je suis tellement heureux d’avoir côtoyé une telle équipe de professionnels, Roger Dickens qui a été chef op sur Les Evadés, Skyfall etc. et qui a été souvent récompensé. J’ai aimé cette expérience et voir comment il travaillait. En Australie (ou a été tourné le film – ndlr), tout le monde est tellement dédié à son métier, tout le monde travaille dur. Avec la passion d’Angie, son attitude, sa détermination, tout le monde voulait s’impliquer à fond pour accomplir cette œuvre. Tout le monde s’entraidait. C’était positif et intense.
Comment votre communauté de fans a répondu à cela ? Avez-vous eu des retours ?
Je crois qu’ils sont impatients de voir le film. C’est une autre dimension par rapport à Myavi. J’ai l’habitude de maltraiter ma guitare et là, je maltraite des gens. C’est très différent, avec un côté diabolique. En tout cas, ils sont un grand soutien. Je suis sûr qu’ils comprendront pourquoi j’ai décidé de prendre cette voie et de faire cela. Ils sauront recevoir le message de pardon, l’accomplissement de la vie de Louis Zamperini. J’espère que chacun apprendra de cette expérience. C’est ce que nous devons transmettre à la prochaine génération, c’est proche de ma musique en fait. Je suis fier de ce film et de le partager avec mes fans.
ATTENTION SPOILER
Comment avez-vous préparé la scène de la poutre en bois ?
Ce fut intense. Trop intense pour moi en tant qu’homme sans expérience. J’ai vomi. C’était trop dur à porter. Je devais exprimer des émotions négatives, confusion, colère, folie… A ce moment là, « The Bird » sait qu’il va être exécuté, le Japon perd la guerre mais il sait quoi faire. Il décide de tuer Louis, de le battre. Mais il réalise qu’il ne peut pas battre Louis. Physiquement, il gagne, il le bat. Mais moralement, il perd. Comme la guerre, il n’y a pas vainqueur. Exprimer ces émotions sans dialogues, ce fut très dur pour moi. J’ai essayé de ne pas être dans l’émotion. J’ai essayé de garder mes émotions à l’intérieur mais je n’ai pas pu me contrôler. Je pleurais. Même pendant que l’équipe technique changeait les caméras de place, je continuais de pleurer. Ce fut la scène la plus difficile. Mais je suis confiant sur le résultat. Plus je devenais le mal, plus l’histoire gagnait en force dramatique.
FIN DU SPOILER
Aimeriez-vous poursuivre dans cette voie et jouer à nouveau ?
Bien sûr, si j’en ai l’opportunité. Mais maintenant, je dois me reconcentrer sur ma musique. En tout cas, j’ai beaucoup appris avec cette expérience. La musique et jouer sont des expériences assez similaires finalement, jouer sur une scène, tout est question d’émotions et de message, ce que vous voulez transmettre à votre audience. J’ai aimé jouer un personnage si profond avec de nombreuses facettes, triste, fou, malheureux, en colère et faible à la fois, sensible… J’aimerai réessayer à nouveau.
Retrouvez également notre entretien avec Jack O’Connell, héros du biopic Invincible.
Propos recueillis et traduits par Emmanuel Sal (du blog Regardezmoica)
Un grand merci à Jack O’Connell, Universal Pictures, Florence Debarbat et Emmanuelle Sal.
Ravi que le film vous ait plu, Annaelle. 😉
Je suis allée voir » Invincible » aujourd’hui au cinéma et l’émotion qu’il transmet m’a fait pleurer plusieurs fois, car cette force moral qui y est représenté est surprenante, incroyable ! Le fait que se soit une histoire vrai est inimaginable ! Angelina Jolie ne m’a pas déçue, aucun des acteurs d’ailleurs. » The Bird » donc Miyavi que je ne connaissais pas du tout a très bien rempli son rôle d’acteur pour ma part, tous les acteurs sont très bon. Merci pour ce moment intense !
Annaëlle, 14 ans.