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LA MAIN DE DIEU de Paolo Sorrentino : la critique du film

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Nom : È stata la mano di Dio
Père : Paolo Sorrentino
Date de naissance : 2021
Majorité : 15 décembre 2021
Statut : disponible sur Netflix
Nationalité : Italie
Taille : 2h14 / Poids : NC
Genre : Biopic, Drame

Livret de Famille : Filippo ScottiToni ServilloTeresa Saponangelo

Signes particuliers : Un Sorrentino plus personnel où le cinéaste se raconte…

 

SORRENTINO REGARDE DANS LE RETROVISEUR

NOTRE AVIS SUR LA MAIN DE DIEU

Synopsis : Naples dans les années 80. Fabietto Schisa, adolescent mal dans sa peau, vit avec sa famille excentrique et haute en couleurs. Mais son quotidien est soudain bouleversé lorsque Diego Maradona, légende planétaire du football, débarque à Naples et le sauve miraculeusement d’un terrible accident. Cette rencontre inattendue avec la star du ballon rond sera déterminante pour l’avenir du jeune homme. Avec La Main de Dieu, Sorrentino revient dans sa ville natale pour réaliser son film le plus personnel, qui mêle le destin et la famille, le sport et le cinéma, l’amour et les illusions perdues.

Après une année somme toute assez décevante côté « cinéma », Netflix a terminé 2021 en trombe en proposant successivement trois des meilleurs films de l’année : le musical Tick, Tick… Boom !, la comédie satirique Don’t Look Up et l’italien La Main de Dieu de Paolo Sorrentino. Quatre diront certains, si l’on rajoute le The Power of the Dog de Jane Campion. En tout cas, avec ce nouveau Sorrentino, la plateforme a encore mis la main sur une belle prise, rappelant qu’elle ne se contente pas d’œuvrer dans le registre de l’archi-commercial (style Red Notice) mais qu’elle a pour volonté de diversifier au maximum son offre et ses propositions pour toucher tous les publics. Et La Main de Dieu de confirmer une tendance déjà initiée avec le Roma d’Alfonso Cuaron (et d’autres), le cinéma d’auteur est une piste de prestige.
La Main de Dieu marque le retour de Sorrentino au cinéma, trois ans après Silvio et les autres, sa satire grandiloquente sur Berlusconi. Mais pour ce retour, le cinéaste italien change de crèmerie. Après le portrait volontairement boursouflé d’une figure excessive, Sorrentino passe en mode introspection avec une œuvre moins démonstrative, moins flamboyante. Une œuvre moins généraliste aussi et plus personnelle. Oui, avec La Main de Dieu, Sorrentino se raconte, signant son film le plus intime.
Autobiographique, cette chronique adolescente est l’occasion pour lui de parler de sa jeunesse dans sa Naples natale entre merveilleux souvenirs nostalgiques, moments fondateurs et instants tragiques qui l’ont fait grandir. Sa famille haute en couleurs, ses voisins, le folklore napolitain, l’arrivée de Maradona au Napoli en 1984, sa tante si sexy, sa première fois, ses parents… Sorrentino se met à nu et c’est peut-être parce qu’il touche au trop intime cette fois, qu’il délaisse un peu la grandiloquence de son cinéma, cette grandiloquence pop qui fait que généralement on aime ou on déteste son travail. La Main de Dieu est plus sobre, plus épuré, même s’il subsiste encore quelques petites traces de fulgurances esthétisées disséminées ça et là, comme cette introduction maritime fondant sur Naples. On pense alors que le style baroque du cinéaste va se répéter mais il n’est qu’illusion. Derrière, Sorrentino flirte plus avec l’esprit de son maître absolu, Federico Fellini. Plus précisément, le Fellini de I Vitelloni, de Fellini Roma ou de Amarcord. Si l’on devait trouver un mince lien de parenté dans sa filmographie passée, on penserait à la limite à La Grande Bellezza et à ce côté chronique douce-amère filmant amoureusement l’ébullition italienne, des personnages truculents, des instants qui comptent, le tourbillon de la vie. Sauf que le sujet en est très éloigné, quasi opposé, il ne s’agit pas de parler de la fin de quelque chose mais du début cette fois.
Mais Sorrentino avait-il au moins quelque chose à dire au-delà d’un coup d’œil dans le rétroviseur sur sa jeunesse ou le geste se résume t-il à un vain regard nombriliste ? La réponse est oui. En se prenant pour sujet, Sorrentino évoque une jeunesse cherchant à combler un vide existentiel. Son portrait profondément sincère et émouvant scrute le chemin escarpé d’un jeune homme en quête d’une voie, comme tant de jeunes d’hier et d’aujourd’hui à la recherche d’un but, d’un sens à leur vie. Et le cinéaste de montrer que c’est à force de traverser des instants qui peuvent paraître insignifiants sur le moment, que l’on se dessine ce chemin. Ces moments et d’autres plus graves ou plus importants.

Après avoir parlé de la vieillesse dans Youth où deux octogénaires affrontaient une fin de vie en contemplant une jeunesse qu’ils ne retrouveront plus, Sorrentino se penche sur l’autre extrême du compas, sur une jeunesse qui a encore tout à faire, tout à construire, tout à découvrir. Et le réalisateur de se remémorer tous les éléments qui ont fait de lui ce qu’il est, et façonné son chemin par petites touches plus ou moins majeures, le football, l’art, les femmes, l’apprentissage de la sexualité, Naples, la découverte du cinéma. Des éléments qui vont le lancer et l’aider à surfer sur la vie comme un hors-bord lancé à 250 km/h sur l’eau et qui fait « Schouff… schouff… schouff… ».

Par Nicolas Rieux

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