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GAGARINE de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh : la critique du film

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Nom : Gagarine
Parents : Fanny Liatard, Jérémy Trouilh
Date de naissance : 2021
Majorité : 06 octobre 2021
Type : sortie en DVD
Nationalité : USA
Taille : 1h38 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de Famille : Alséni BathilyLyna KhoudriJamil McCraven, Finnegan Oldfield

Signes particuliers : Sélection Officielle Cannes 2020.

 

DE LA BANLIEUE AUX ETOILES

NOTRE AVIS SUR GAGARINE

Synopsis : Youri, 16 ans, a grandi à Gagarine, immense cité de briques rouges d’Ivry-sur-Seine, où il rêve de devenir cosmonaute. Quand il apprend qu’elle est menacée de démolition, Youri décide de rentrer en résistance. Avec la complicité de Diana, Houssam et des habitants, il se donne pour mission de sauver la cité, devenue son  » vaisseau spatial « .

A défaut de n’avoir pu montrer son beau visage sur la Croisette lors de l’édition 2020 -malheureusement annulée pour cause de Covid- Gagarine avait reçu le label « Cannes 2020 ». On ne va pas se mentir, l’étiquette ne compensait pas le manque de visibilité perdue. Néanmoins, ce premier long-métrage de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh a su trouver un écho auprès de la presse qui s’est empressée d’en parler comme de l’un des meilleurs films de l’année 2021. A raison. Prolongement d’un court-métrage qu’ils avaient réalisé en 2015, Gagarine est une pépite sublimée par son « réalisme magique » pour reprendre les intentions de ses auteurs. Direction une cité d’Ivry-sur-Seine proche de la démolition. Youri, l’un des habitants de cette cité Gagarine, rêve d’espace sans vouloir fuir un endroit qu’il aime. Parce qu’avant d’être une simple cité obsolète, c’est chez lui.

Gagarine évolue sur deux plans, le béton des murs d’une cité qui s’écroulent et les étoiles séculaires qui la surplombent. Deux extrêmes réunis au milieu par Youri (on comprend facilement la symbolique du prénom), un gamin qui aime profondément son « chez lui » autant qu’il rêve de l’espace.
Le cinéma dit « social » à la française est valeureux et ne manque pas de caractère, mais on pourra toujours lui reprocher de tourner un peu rond, thématiquement peut-être, formellement pour sûr. Fanny Liatard et Jeremy Trouilh réussissent le tour de force de lui ouvrir une nouvelle voie, celle de l’expression poétique. Gagarine est un poème social, un film ancré dans sa réalité aux HLM qui se délitent, autant qu’il baigne dans un doux onirisme profondément émouvant. Le mariage est sublime. Jamais la banlieue n’avait été filmée ainsi, rarement le cinéma social n’avait paru si libre, comme si le film de Liatard et Trouilh allait s’envoler dans les rêves aux côtés de ceux de son jeune gamin si bouleversant. Il y a tout dans Gagarine, gravité et apesanteur. La gravité d’une triste réalité sociale pesante qui s’ouvre sur ces cités HLM construites à la hâte il y a 60 ans et qui sont à démolir aujourd’hui car vieilles et insalubres. Avec dedans, des hommes, des femmes, des enfants, des familles que l’on doit déraciner de chez eux au mépris de leurs émotions, faute d’avoir su s’intéresser à leur sort avant. L’apesanteur, elle, c’est le vol des rêves qui tourbillonnent au-dessus de ces têtes, à commencer par celles d’une jeunesse pleine d’idéaux. Alors qu’il est souvent de mise d’associer « banlieue » et « drame humain », Gagarine fait le contraire. Le film de Liatard et Trouilh baigne dans la lumière, dans l’optimisme, dans la douceur. Il peint surtout une banlieue autrement que par la misère, la dureté, les statistiques ou les clichés. Il y est question de rêves et d’avenir, d’imaginaire, d’entraide, d’une jeunesse fertile…
Proche du conte urbain lyrique fait de métaphores (un gamin abandonné par sa mère vs une cité abandonnée par l’Etat, une destruction programmée vs de nouveaux départs, rêver en grand vs la vie dans un microcosme muré), Gagarine est une perle façonnée dans l’émotion, dans la grâce, dans la magie. Chaque plan est un émerveillement où le réel et l’imaginaire s’entremêlent dans une danse qui exprime des choses fortes et concrètes sans s’enfermer dans l’éternel rhétorique du discours en colère et moralisateur. Coup de cœur aux allures d’odyssée d’ici et d’ailleurs, Gagarine est différent, original, drôle, épique à sa manière, imparable.

Par Nicolas Rieux

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