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BLANCHE NEIGE de Marc Webb : la critique du film

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Spectateurs

Père : Marc Webb
Date de naissance : 19 mars 2025
Type : sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h49 / Poids : 250 M$
Genre : Familial, Musical

Livret de famille : Rachel ZeglerGal GadotAndrew Burnap

Signes particuliers : Une adaptation live complètement foireuse et foirée.

Synopsis : « Blanche Neige » des studios Disney est une nouvelle version du classique de 1937 en prises de vues réelles. Avec Rachel Zegler dans le rôle principal et Gal Gadot dans celui de sa belle-mère, la Méchante Reine. Cette aventure magique retourne aux sources du conte intemporel avec les adorables Timide, Prof, Simplet, Grincheux, Joyeux, Dormeur et Atchoum.

 

Oh regarde, une catastrophe qui arrive…

UN AVANT-GOÛT DE L’ENFER

NOTRE AVIS SUR BLANCHE NEIGE

La machine à laver les dessins animés Disney continue de tourner à plein régime et le petit dernier, tout beau tout propre, prêt à aller sur l’étendoir du live action pour sécher au soleil du box office, c’est Blanche Neige. Un nouveau conte merveilleux après La Belle et la Bête. Après en avoir revisité à la pelle ces dernières années, Disney s’attaque donc au tout premier classique d’animation de l’histoire du studio, sorti en 1937 et basé sur un conte des frères Grimm. C’est Marc Webb (les Amazing Spider-Man avec Andrew Garfield) qui se colle à la transposition de l’animation vers le live, Rachel Zegler prêtant ses traits à Blanche Neige tandis que Gal Gadot incarne la méchante Reine. Et c’est parti pour un Blanche Neige en live action… mais surtout modernisé à la sauce 2025. Et c’est là que les problèmes ont commencé.

A l’heure des forts remous générés par les questions de représentations des minorités, par la remise en question des stéréotypes datés et par les revendications féministes, Blanche Neige posait de nombreux problèmes chez Mickey. Les nains ? Non, en 2025 plus possible. Une femme d’âge mûr jalouse de la beauté d’une jeunette plus jolie qu’elle ? Non, en 2025 plus possible. Une princesse blanche comme la neige ? Non, en 2025 plus possible. Le concept du Prince Charmant ? Non, en 2025 plus possible. Alors les pavés ont été enlevés un à un. Les nains sont devenus des « créatures magiques ». La femme d’âge mûr n’est pas moins belle que Blanche Neige physiquement, c’est la « beauté intérieure » qui fera désormais la différence. Le Prince Charmant n’est plus un prince (et il n’est plus très charmant mais ça…). Et enfin, Blanche Neige s’appelle ainsi non pas car elle est « blanche comme la neige » mais parce qu’elle est née un jour de tempête de neige (reprenant ainsi non pas le conte des Grimm mais le film d’animation de 1937 qui avait déjà introduit cette idée). C’est bon, on est dans les clous. Ah, et Blanche Neige n’est plus une écervelée qui fait le ménage chez les Nains -pardon « les créatures magiques ». Désormais, c’est elle qui leur commande de faire de faire le ménage et distribue les tâches. 2025 oblige. Ah, et aussi elle n’a plus besoin que les hommes fassent tout pour elle, elle peut aller affronter la méchante Reine elle-même. 2025 oblige.

Blanche Neige est un peu crétin dans son ultra-modernité obligée et surtout trop visible de loin avec sa subtilité proche de celle d’un taureau en overdose de gingembre. Ce n’est pas l’actualisation à la sauce 2025 qui pose souci, mais plutôt le peu d’intelligence et de malice avec lesquelles Disney opère le ravalement de façade. Davantage d’ironie, d’humour et de second degré aurait été considérablement plus préférable qu’une telle entreprise de déconstruction au bulldozer. Mais bon, laissons de côté le débat idéologique qui fait rage là-dehors (c’est scandaleux, c’est hyper woke, non, si, non, si, non…) et tenons-nous en au cinéma et rien qu’au cinéma.
Cinématographiquement donc… Bah c’est laid. Et visuellement, c’est cheap. Ce Blanche Neige 2025 est une abomination épouvantable dans laquelle pas grand-chose ne fonctionne. On a connu Disney plus inspiré sur certains live action, mais clairement ce petit dernier rejoint le fort médiocre La Petite Sirène tout au fond du panier des pires live action produits par le Studio. Dès les premières images, on a l’impression de se voir jeter de l’eau de javel dans les yeux et ça brûle. Tout fait fake, des costumes aux décors en passant par le moindre caillou, accessoire ou oiseau numérique. On a la sensation de voir une bande de cosplayeurs évoluant dans un univers en polystyrène façon Disneyland. Et encore, les ruelles du parc de Marne-la-Vallée sont peut-être même plus crédibles que ce machin infernal. Et derrière, tout part en cacahuètes, et en cascade. La mise en scène est plus plate qu’une piste de bowling, loin de l’effort de créativité d’un Wicked par exemple. Ça chante toutes les cinq minutes des chansons toutes plus tartignoles les unes que les autres (et ce dès la première, à froid, à sec et sans vaseline). Avec heureusement les classiques du dessin animé. Toujours ça de pris. La direction photo est désastreuse et aussi dégueulasse que la direction artistique. Les deux jeunes héros (Rachel Zegler et Andrew Burnap) n’ont pas un demi-point de charisme cumulé à eux deux. Il est plus facile de trouver des truffes dans un mini bosquet sur une aire d’autoroute au bord de l’A6 qu’un bon point dans ce long calvaire qu’est Blanche Neige 2025. Peut-être le plan de fin de la Reine avec son miroir éventuellement. On se raccroche comme on peut aux branches maigroulettes.

Faut-il définitivement honnir le concept des adaptations de classiques d’animation en live action ? Pas forcément. Ils apportent une autre vision aux dessins animés, un autre formalisme, une autre façon de les découvrir. Et Aladdin, Le Livre de la Jungle ou le premier Roi Lion ont prouvé qu’il était possible d’arriver à des résultats plus ou moins corrects malgré la difficulté d’affronter le poids de films d’animation références très ancrés dans les esprits. Sauf que là, Marc Webb et Disney se sont embourbés dans le pire du pire. Blanche Neige est un gigantesque mashup hideux au possible. Le « prince » est emprunté à Robin des Bois, la Reine lorgne vers Maléfique, Blanche Neige a des montées d’intrépidité à la Raiponce ou Rebelle, ça pioche chez Cendrillon, en forêt on trouve des traces d’Alice au pays des merveilles, on croise Bambi

Tout était explosif autour de la sortie de Blanche Neige. Sa sortie a été précédée d’une vindicte rare, le moindre mouvement ou choix de Disney déclenchait une hostilité venimeuse, les débats ont fait rage, Rachel Zegler a vécu un harcèlement ignoble sur les réseaux sociaux (oh grands dieux, ils ont osé prendre une latina pour incarner Blanche Neige – comme si c’était d’une extrême gravité géopolitique mettant l’équilibre du monde en péril). Sans parler des voix qui se sont élevées, Peter Dinklage sur le nanisme, le fils du réalisateur de l’originel Blanche Neige sur le supposé wokisme du film, les tensions entre Gal Gadot et Zegler sur fond de conflit politique israélo-palestinien… Un contexte si houleux que l’avant-première officielle du film à Hollywood s’est faite sans journalistes, que la campagne promotionnelle a été étonnement discrète pour un Disney, que le film a été pré-montré seulement la veille de sa sortie à une presse triée sur le volet. Et le résultat ne s’est pas fait attendre. Blanche Neige réalise un mauvais démarrage au box office américain, en-deçà du Dumbo de Tim Burton. Un flop (pour l’heure) mérité ? Oui si l’on parle de cinéma et rien que de cinéma. Copieusement assaisonné par la critique et une bonne partie du public, Blanche Neige a largement été victime de préjugés quant à sa nature et d’une opinion forgée avant même sa sortie, boostée au passage par des vents racistes, anti-wokiste et réactionnaires. Injuste et scandaleux. En revanche, sa découverte crédibilise son échec. Blanche Neige est une bouillie tiède qui remue du vide et le fait avec laideur. L’un des plus gros succès de l’histoire du cinéma méritait une actualisation bien plus étudiée, réfléchie et artistiquement engagée que ce passe-plat désespérément insipide qui ne fait rien de cette dite actualisation, à part pousser timidement deux-trois portes entrouvertes comme s’il avait la trouille d’entreprendre quoi que ce soit.

On entend d’ici les complaintes des auteurs. Le film a été victime de ci, de ça, le bashing est injuste, bla bla-bla-bla… Alors oui, peut-être un peu, mais non. Le film est aussi (et surtout) victime de sa confondante nullité. De la cheaperie de son production design à la pauvreté famélique de ses intentions en passant par la fadeur de ses ambitions artistiques ou le cabotinage de ses comédien.nes, rien ne va dans ce boudin incapable de faire naître la moindre magie. Plus qu’aseptisé, Disney et Marc Webb font carrément dans le pasteurisé, éliminant dans le processus, toute la cruauté tragique et la poésie enchanteresse du classique animé de 1937.

 

Par Nicolas Rieux

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