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WALL CINÉ PICTURES – escale n°10 : trois idées de films à voir ou à revoir

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Spectateurs

Dixième numéro de notre nouveau rendez-vous « ciné-club » du samedi. Le « Wall Ciné Pictures » c’est un coup de projecteur hebdomadaire sur trois films, anciens ou récents, connus ou méconnus, d’un horizon à un autre. Histoire de se balader ensemble dans l’incroyable vivier du septième art et peut-être, de vous donner des idées ou envies, de voir ou revoir tout un tas de films ! Escale n°10, focus sur un petit chef-d’oeuvre américain méconnu, sur l’un des derniers films du grand Sam Peckinpah et sur une série B de science-fiction soviétique furieusement propagandiste.

the-man-from-earthnote 4.5 -5

THE MAN FROM EARTH
De Richard Schenkman – 2007 – 1h35
Genre : Drame – USA
Avec : David Lee Smith, John Billingsley, Ellen Crawford, Tony Todd, William Katt, Annika Peterson, Richard Riehle, Alexis Thorpe.

Synopsis : Un homme réunit ses amis pour leur annoncer qu’il va partir et leur expliquer pourquoi. Mais son histoire est incroyable. Est-il fou ? Dit-il la vérité ou est-ce un jeu ?

Attention, chef-d’œuvre méconnu droit devant ! The Man From Earth est un coup de génie réalisé pour des clopinettes (200 000 dollars) par Richard Schenkman en 2007. Quelques personnages, une pièce, une conversation dans laquelle un homme explique à ses amis qu’il doit partir. Toute la question est de savoir pourquoi. Rien qu’avec ces trois éléments aussi simples que bonjour, The Man From Earth est probablement l’un des films les plus captivants que l’on ait pu voir ces dernières années. C’est sur son lit de mort en 1998 que le célèbre romancier Jerome Bixby dictera de mémoire à son fils, ce scénario incroyable qu’il n’avait pas eu le temps de coucher sur papier. Reposant sur un pitch énigmatique qui prend tout son sens au fur et à mesure que progresse cette quasi-pièce de théâtre filmée absolument fascinante, The Man from Earth est de ces films qui reposent sur la confiance. Ne lisez rien, ne regardez rien, ne cherchez pas à savoir de quoi ça parle… RIEN ! Faites-nous simplement confiance et lancez le, vierge de toute information. Vous découvrirez très vite pourquoi The Man From Earth est un trésor, une œuvre d’une richesse incroyable, capable de s’aventurer sur des terrains philosophiques, théologiques, métaphysiques, anthropologiques, capable de parler d’histoire, de parler du monde, de la vie, de la mort, de l’humanité… Tout ça sans jamais ennuyer. Car The Man From Earth tient grâce à un suspens virtuose qui joue brillamment avec le doute. Vrai ? Faux ? Mensonge ? Vérité ? Vous verrez, The Man From Earth est une expérience que l’on voit une fois, et qui marque à jamais.



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LE CONVOI
De Sam Peckinpah – 1978 – 1h50
Genre : Drame, Action – USA
Avec : Kris Kristofferson, Burt Young, Ernest Borgnine, Ali McGraw, Seymour Cassel…

Synopsis : Rubber Duck est rejoint par ses anciens collègues camionneurs dans un mouvement contestataire contre le shérif Wallace qui agit comme un véritable tyran. Leur convoi parcourt les routes du Nouveau-Mexique jusqu’au moment où les forces de l’ordre les arrêtent en les empêchant de poursuivre. L’affaire commence alors à se médiatiser…

Fin des années 70, Sam Peckinpah est un cinéaste vieillissant et malade. Le Convoi, son avant-dernier long-métrage inspiré d’une chanson country de C.W. McCall, en porte les stigmates. Échec commercial et critique à sa sortie en 1978, il fut considéré comme mineur, impersonnel et alimentaire. L’auteur avait encore un peu de jus et entendait le faire savoir, après son fabuleux et décrié Croix de Fer. Mais le chaos règnera en maître sur le tournage. Peckinpah commencera par pester contre un script qu’il n’aimait pas, puis se verra contraint de faire appel à son ami James Coburn, engagé comme réalisateur de seconde équipe pour l’épauler dans ses mauvais moments. En dépit de tout cela, Le Convoi portera néanmoins la marque d’un Peckinpah qui réussira le tour de force d’importer La Horde Sauvage et Les Sept Mercenaires dans un genre totalement différent, le road movie de camionneurs ! Le cinéaste y transpose la figure du bandit de l’Ouest, du cow-boy libre et rebelle, les machines de fer roulantes (les camions) remplaçant les majestueuses montures cavalières d’antan. Le Convoi déroutera par sa radicale différence d’avec l’univers habituel du cinéaste. Point de violence sèche et graphique, point de cynisme, le film est plus enjoué, plus chaleureux, et fait preuve d’un humour débordant qui lui confère au final, un ton proche de la comédie d’action. Comme une sorte d’adieu à un ancien cinéma et à une ancienne Amérique révolue à laquelle appartenait le metteur en scène, Le Convoi vend un parfum de liberté et de dénigrement de l’autorité étatique, des lois, des politiques, comme une sorte de personnification de la période désabusée post-Watergate où l’on ne croyait plus en rien. Peckinpah tient du coup tout son film sur ce parfum de rébellion, mais on lui reprochera de manquer d’une finalité forte, surtout avec son dernier acte qui ne tiendra pas toutes ses promesses. Il n’empêche que son dynamisme rieur et effronté lui donne un style pas désagréable, alors que les éclats de rires se mêlent à un suspens palpitant et des séquences d’action spectaculaires. Kris Kristofferson et Ali McGraw forment un duo savoureux, entourés par Ernest Borgnine et Burt Young. Même si Le Convoi n’a pas la poigne des grands Peckinpah, même s’il n’a pas son style éclaboussant et sa colère rageuse, il reste une petite distraction de fin de carrière comme bien des réalisateurs aimeraient en avoir.

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LA PLANÈTE DES TEMPÊTES
De Pavel Klouchantsev – 1962 – 1h38
Genre : Science-fiction – URSS
Avec : Vladimir Yemelyanov, Georgi Zhzhyonov, Yuriy Sarantsev…

Synopsis : Trois vaisseaux spatiaux soviétiques quittent l’URSS pour Vénus. À proximité de la planète l’un d’entre eux est détruit, mais les deux autres décident de poursuivre la mission. Une femme reste en orbite alors que cinq hommes et un robot descendent et explorent cette terre hostile, à la recherche de vie extraterrestre et de la source des étranges chants qu’ils entendent.

Quand le cinéma soviétique faisait dans le patriotisme, il n’y allait pas de mains mortes. La preuve avec La Planète des Tempêtes, savoureuse série B de science-fiction sortie en 1962, en plein contexte de guerre froide et de course aux étoiles entre l’Occident et l’URSS. Largement avant même qu’un pied ne soit posé sur la lune, c’est Vénus que visait sans vergogne le bloc de l’Est dans ce « planet opera » signé du faiseur Pavel Klouchantsev. Petite réjouissance kitsch au charme désuet dès plus rigolo, La Planète des Tempêtes incarne à merveille une époque où la SF, produite avec les moyens techniques du bord, illustrait des histoires à l’imaginaire farfelu emblématiques de la méconnaissance que l’on avait alors, de l’univers. Vu d’aujourd’hui, comment ne pas sourire devant cette représentation d’une Vénus peuplée de plantes vivantes hostiles et de dinosaures en caoutchouc ?! Mais le meilleur est à venir car, au-delà de la bisserie SF attachante, le film de Pavel Klouchantsev est avant tout un pur produit ultra-nationaliste, un bon vieux film de propagande à la gloire de l’Union Soviétique, vantant ses mérites et ses valeurs, notamment le courage de ses hommes et femmes, tous fiers de représenter leur nation, au péril de leur vie et avec une abnégation sans faille, le seul objectif étant de remplir le glorieux rôle honorifique confié par le pays. Dialogues impayables, musiques et chansons patriotiques traversent ainsi cette aventure humaine qui dépasse le simple postulat de l’exploration de contrées inconnues. Tout vaut le détour dans cette curiosité très ancrée dans son temps. Si sur le fond, La Planète des Tempêtes n’avait rien à envier à ses homologues ricaines de l’époque, cette production rétro déroute surtout sur sa forme, et pourrait servir d’illustration dans les cours d’histoire, pour expliquer aux plus jeunes, ce qu’était le cinéma de propagande, un formidable médium pour véhiculer des idéaux. Ici, la fraternité se conjugue à la peinture plus roublarde de l’idée qu’en dehors de l’Union Soviétique, tout n’est que danger !

A samedi prochain !

Par Nicolas Rieux

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