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PROMETHEUS (critique)

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Mondo-mètre :

Carte d’identité :
Nom : Prometheus
Parents : Ridley Scott
Livret de famille : Noomi Rapace (Elizabeth Shaw), Michael Fassbender (David), Charlize Theron (M. Vickers), Idris Elba (Janek), Guy Pearce (Mr Weyland), Rafe Spall (Milburn), Sean Harris (Fifield), Logan Marshall-Green (Charlie)…
Date de naissance / Nationalité : 2012 – États-Unis
Taille/Poids : 2h03 – 150 millions $

Signes particuliers (+) : Grandiose sur l’instant : plastiquement superbe et une 3D immersive. Une ingénieuse et ambitieuse imbrication du mythe de Prométhée. Haletant. D’une grande richesse thématique.

Signes particuliers (-) : Aussi intelligent qu’idiot limite nanardesque par moments. Une montagne d’incohérences et illogismes de détails. Bâti comme un pilote de série TV. Écrasé par le poids de ses ambitions.

 

ALIEN 0… OU -1… OU -2 PLUTÔT…

Résumé : La découverte de symboles dans des cavernes aux quatre coins du globe pousse un riche milliardaire, Weyland, a affrèter un vaisseau, le Prometheus, avec pour but de traverser la galaxie vers un système solaire cachant potentiellement, nos géniteurs, une race extraterrestre. L’équipage ne s’attend pas à ce qu’il va trouver sur place…

Séquelle, préquelle, film indépendant, le projet d’un nouvel Alien était sur toutes les lèvres depuis qu’il a été initié il y a de cela quatre ans, en 2009. En cause, malgré le piètre 4ème volet signé Jean-Pierre Jeunet et les croisements débiles avec d’autres créatures subis depuis, la présence aux commandes de l’auteur originel de la saga, Ridley Scott. On croyait la fresque horrifico-science fictionnelle des Alien abîmée à jamais par ces trahisons au mythe et pourtant, force est de constater qu’elle nourrit toujours autant l’excitation d’imaginaires transgénérationnels depuis plus de 30 ans, chacun ayant un jour pris part à la terreur spatiale à l’état pur en mettant un pied a bord d’une franchise parmi les plus mythiques de l’histoire du cinéma et reine en son genre, souvent imitée, jamais égalée. Ridley Scott avait posé les bases avec Alien, Le Huitième Passager en 1979, chef d’œuvre absolu de l’angoisse sourde et invisible, tapie dans l’ombre des recoins d’un vaisseau transformé en terrain de chasse et de survie. Mètre étalon du genre, Alien avait encore de belles heures devant lui puisque le génie James Cameron viendra marquer de sa patte la mythologie en 1986 avec un second volet aussi bien pour les uns, meilleur pour les autres, ou très infimement inférieur pour les moins fans. Un second volet qui gardait cette puissance terrifiante tout y ajoutant plus d’action pour un résultat parfait entre horreur, SF et actionner envoyant le bois. Enfin, l’esthétisant David Fincher viendra ponctuer une trilogie de rêve avec un sombre troisième opus en 1992, magnifique et mélancolique, bien qu’en deçà de ses prédécesseurs qui avaient placé la barre bien trop haute. « Enfin » car c’est en occultant volontairement le quatrième opus de la franchise, bouse infâme signée du français Jean-Pierre Jeunet qui aurait dû en rester à ses Delicatesseneries plutôt que de venir souiller la mythologie Alien sans en comprendre l’essence. On ne parlera même pas des idioties du style Alien vs Predator, hontes aux deux sagas de légende.

2010. Le projet Prometheus se dessine, prend forme et commence à alimenter toutes les conversations, à façonner les fantasmes les plus fous, à faire saliver les fans de la première heure comme les plus tardifs. Exit « l’employé » que papa Ridley souhaitait mettre à la réalisation alors que lui aurait été en charge de la production, Scott assumera bien, répondant ainsi à la condition imposée par la Fox pour financer l’entreprise, la mise en scène de ce qui s’annonce comme un méga blockbuster couteux. Pas une séquelle à coup sûr, on semble se diriger vers une préquelle avant que les échos ne laissent entrevoir autre chose. Damon Lindelof, le scénariste de la célèbre série à succès et à mystères Lost, sera en charge du script après moult versions pondues mais non satisfaisantes. Il aura fallu attendre longtemps et tardivement pour savoir ce que serait vraiment Prometheus (au moins 2011) dont rien que le titre donne une indication sur la volonté de se démarquer indirectement de la marque Alien en développant une nouvelle mythologie qui, toutefois, se rattachera à la saga originelle en expliquant et faisant la lumière sur certains points laissés en suspens comme l’origine du Space Jockey, ce géant fossilisé vu dans le premier volet et des fameuses bestioles. Et finalement, certains seront déçus du contenu, d’autres transportés de bonheur en entrapercevant toute la richesse du projet : Prometheus est un film de SF indépendant de la saga Alien mais distillant les bases de ce que sera la mythique franchise, levant le voile sur ses origines sans pour autant qu’il ne s’agisse d’une vraie préquelle au sens strict du terme car cherchant à développer son propre univers. Indirectement oui mais concrètement, Prometheus ne parle pas vraiment d’aliens ! Le film emmené par Ridley Scott sera une sorte d’Alien zéro, situé temporellement bien avant l’apparition des terrifiantes créatures et répondant à certaines questions sur leurs origines… et sur les nôtres ! Surtout sur les nôtres.

Car c’est de cela dont il s’agit fondamentalement dans un film qui revêt de fort relents de fresque mystico-philosophique. D’ou vient-on ? Qui nous a créé et surtout pourquoi ? C’est pour répondre à cette question que l’équipage du Prometheus s’envole pour un long voyage de plus de deux ans aux confins de l’univers à la suite de découvertes archéologiques troublantes faites aux quatre coins du globe. Un équipage dirigé de main de maître par une beauté froide, Mlle Vickers (la somptueuse Charlize Theron) au commandement du vaisseau, un engin ultra-équipé affrété par un puissant milliardaire, Mr. Weyland (méconnaissable Guy Pearce vieilli) et composé entre autre, d’un duo de scientifiques à l’origine de la découverte d’un mystérieux système solaire (la suédoise Noomi Rapace découverte dans la saga Millenium alias Elizabeth Shaw, ersatz de Ripley/Sigourney Weaver et Logan Marshall-Green), d’un androïde ultra-avancé, David (le toujours formidable Michael Fassebender), d’un pilote cool (Idriss Elba) et de tout un équipage hétéroclite au nombre total de 17.

A la vue des premières photos alléchantes puis des premières images et bandes-annonces, Prometheus promettait, c’est le moins que l’on puisse dire. Des images somptueuses, des effets magnifiques, le tout dans un film qui s’est donné les moyens de ses ambitions, fort d’un budget estimé à entre 130 et 150 millions de dollars, en vraie 3D. Pour satisfaire les studios selon la mode tendance ? Non. Ridley Scott y tenait et on ne l’en blâmera tant elle est effectivement de toute beauté, magnifiant des paysages et des décors ahurissants en jouant extraordinairement bien sur la profondeur de champs. Et surtout, une volonté affichée : « révolutionner la SF » par une œuvre pharaonique ne se contentant d’enfiler ses pieds dans les chaussons d’une mythologie existante mais en la développant, en l’étoffant et en en construisant une nouvelle à la fois créative et prolongeant le mythe.

Alors finalement, PrometheusAlien ou pas ? Cohérent avec la saga ou résolument a part, s’en détachant complètement ? Renouvelant la SF ou simple coup d’annonce dans l’eau ? Si en effet le film peut aisément être suivi en soi, sans connaitre une minute de la franchise dont il ne cherche pas vraiment à se réclamer, une certitude est claire : Prometheus divise. Le nouveau film attendu de pied ferme de Ridley Scott émerveille, déçoit, souvent les deux d’ailleurs, l’un à la suite de l’autre. D’abord, il cloue sur place par sa beauté, par sa richesse, il transporte par les qualités qu’il affiche si supérieures à la moyenne de ce qui nous est donné de voir… Puis la coquille se craquelle, on y repense, on le tourne et retourne dans sa tête et comme dans un deuxième effet « kiss cool », ce sont les innombrables défauts qui émergent, prenant le pas sur l’excitation à chaud du moment. « Pour », « contre », la particularité de Prometheus est de ne pas seulement diviser les gens. Il divise au plus profond de soi le spectateur, tiraillé entre ce que l’on aime passionnément chez lui et ce que l’on déteste à posteriori, tiraillé entre l’effet de puissance immédiat et la réalité des choses qui pointent le bout de son nez quelques heures ou jours plus tard après macération mentale…

POUR :

Ridley Scott et son staff annonçait un « renouveau de la SF » et première impression à la sortie de la projection de Prometheus : c’est beau. En fin et élégant cinéaste qu’il est, Scott place en effet la barre bien haut. Plans somptueux, design et reconstitutions titanesques et riches, mouvements de caméra gracieux, une 3D magnifique jouant à merveille sur la profondeur de champs de décors et de paysages magiques, tantôt naturellement impressionnants tantôt extraordinaires de désolation quant à la planète lointaine sur laquelle sur pose le vaisseau avec ses couleurs grises, ses paysages faits de minéraux, de roches et de montagnes désertes. Techniquement, Prometheus affiche un emballage soigné, largement supérieur à la moyenne. De la même manière, c’est ébahi que l’on contemple les fabuleux décors d’Arthur Max et son équipe, les cavernes découvertes sur la planète LV-426, l’immense statue à visage humain, les design d’engins spatiaux extraterrestres ou le Prometheus. Scott fait preuve d’ambition pour proposer un spectacle foisonnant, excitant, transcendant, que sa caméra épouse gracieusement. Prometheus est beau à en crever. Stylistiquement, le pari est on ne peut plus réussi, ce que l’on pressent et ressent dès la première séquence et cet « extraterrestre » au look imaginatif de puissance, qui va se désintégrer après avoir ingurgiter un mystérieuse substance noire. Premières images, premières émotions. Prometheus dégage un souffle épique impressionnant et est doté d’effets spéciaux travaillés et pas seulement en réalisme mais surtout en beauté visuelle (les hologrammes magnifiques). Sauf que l’emballage plastique n’a jamais fait le cadeau. Reste le contenu.

Et là aussi, Prometheus exalte, fait parler, fait couler pas mal d’encre. La mythologie Alien était déjà riche mais fidèle à ce qui avait été annoncé, Prometheus lance bel et bien une nouvelle mythologie, ouvre de nouveaux horizons et possibilités. Damon Lindelof, spécialiste ès suspens complexes et intrigues à mystères s’imbriquant dans un tout que l’on ne perçoit jamais d’emblée car poussant le spectateur à la réflexion pour aller chercher toute la richesse de l’univers, ne se contente pas d’un scénario simpliste où une pauvre bande de scientifiques va se retrouver aux prises avec un danger hostile. Comme on pouvait s’y attendre venant de lui et de Ridley Scott, Prometheus déborde d’idées, de sous-textes, de sens, de paraboles. Récit mystico-théologique, ce nouveau né d’une nouvelle saga présumée, s’appuie sur un script extrêmement ambitieux. Livre biblique de la genèse transposé en SF ? Histoire du mythe de Prométhée revisité ? Prometheus peut se lire à plusieurs niveaux, peut aussi s’interpréter de plusieurs manières et fort à parier que les prochains volets (s’ils viennent et on croise les doigts) donneront leur lot d’explications sur les points encore ambigus.

ATTENTION SPOILER

Prometheus peut se voir comme une vaste transposition biblique incroyable d’intelligence. Les dieux créent plusieurs créatures : l’homme et ce qui sera les futurs Aliens. Mais ses deux créations se retournent contre lui (de la même manière que Satan et quelques anges d’une part et l’homme d’autre part, se sont détournés ou rebellés contre Dieu). La substance noire pervertissant l’homme (ici le Docteur Holloway mais uniquement après son consentement indirect, comme dans l’histoire biblique) serait ainsi l’équivalent de la pomme donnée à Ève. Et de la même manière que dans la vie, l’homme s’est détourné de son créateur pour se tourner vers d’autres adorations. Traduction version Prometheus : les hommes se détournent de leurs créateurs/les ingénieurs, s’inventent des dieux sur Terre et vont subir leurs foudres. Autre possibilité, les Aliens seraient justement la foudre en question, ce par quoi les créateurs allaient punir l’humanité. Mais une autre lecture plus plausible et probable est possible via le mythe de Prométhée. Prométhée, personnage de la mythologie grecque, volât le feu sacré du savoir aux Dieux de l’Olympe pour le donner en cadeau aux hommes et leur faire partager la connaissance et le savoir. Il fut punit pour cela, les dieux n’ayant jamais cautionné cet acte isolé. La séquence d’ouverture de Prometheus prendrait alors tout son sens. L’ingénieur présenté, a commis l’irréparable (contre l’avis des siens en train de s’envoler dans leur belle soucoupe) en donnant à l’homme non pas le savoir mais la vie. Par son acte rituel sacrificiel, l’ingénieur, séparé de ces « frères » et contre la volonté du collectif, insémine la Terre, pour y faire naître la vie. Les ingénieurs, par cet acte de rébellion isolé, se retrouvent ainsi avec une progéniture imprévue dont ils ne veulent pas. Ils vont alors développer de quoi l’anéantir sans prévoir que cette seconde création va se retourner contre eux. Cette théorie est probablement la plus sensée, expliquant au passage la réaction violente de l’ingénieur découvrant les hommes sur LV-223 en les massacrant de rage.

FIN DES SPOILER

Clairement, Prometheus est d’une richesse incroyable. À l’image de la série Lost, le grand fait d’arme de Lindelof à ce jour, le film de Ridley Scott est riche, plein de degrés, de symbolisme (la substance noire renvoyant au mal pur et diabolique etc.) et de sous lectures possibles renvoyant à des interrogations dont les réponses semblent être là, cachées dans cette œuvre ultra-ambitieuse et cultivée, loin de toute la banalité du cinéma hollywoodien aux scénarii sommaires et linéaires. De la SF pour adulte en somme. Prometheus en appelle à l’intellect, à la réflexion, au décorticage pour en comprendre l’essence, la substance fondamentale. Beau, passionnant, c’est un tour de force qui dépasse sa condition de film horrifico-science fictionnel pour aller soulever des questions métaphysiques, philosophiques à l’image de celle évoquée : « si les ingénieurs sont les dieux, qui a créé les ingénieurs ? », renvoyant fatalement à la philosophique « si Dieu nous a créé, qui a créé Dieu ? ». Prometheus ou le commencement de quelque chose de nouveau et de fondateur ? On l’espère. Reste à patienter en salivant dans l’attente insupportable de la suite assujettie au succès de ce premier nouveau volet qui en prend le chemin. Car en posant de nouvelles questions et de nouveaux enjeux, Prometheus s’est à la fois permis de déclencher une « nouvelle » mythologie tirée d’une ancienne et que l’on pressent énorme tout en se permettant de répondre à certaines interrogations de la précédente. A la fois Alien 0 et Prometheus 1.0, le dernier Ridley Scott n’est pas l’un ou l’autre mais une sorte de double commencement aiguisant notre appétit. Il peut aisément se voir en soi malgré sa complexité mais l’on est bien dans quelque chose de plus grand et ça se sent. En tout cas, c’est foutrement beau et terriblement intéressant à la fois théologique, philosophique, mythologique, existentialiste (la réflexion de l’homme à la recherche de son créateur et de l’androïde se posant des questions lui aussi).

CONTRE :

Beau, intéressant, riche, à croire que Ridley Scott a réussi à créer un apollon cinématographique, comme en 1979 et comme à plusieurs reprises tout au long de sa carrière, à signer un chef d’œuvre indiscutable et incontournable. Et oui… mais non. C’eût été trop facile. Prometheus fonctionne comme un bonbon « Kiss Cool », selon le fameux slogan publicitaire mis dans toutes les têtes par la marque. Premier contact, malgré une petite déception devant un film pas aussi bon que les Alien ou Aliens, Prometheus emballe. On en sort plutôt séduit en se disant « putain, c’est vachement bien quand même ». Réalité ou méthode d’auto-conviction ? Réalité ou facette illusoire ? La seconde possibilité semble plus être est la bonne. On aurait tant aimé que Prometheus soit une claque magistrale qu’on aurait presque tendance à vouloir se voiler la face pour y croire. Mais laissez mijoter 24 heures et avec la distanciation, c’est la réalité qui prend le pas. Et la coquille, le bel emballage, se fissure, se craquelle. La chute est douloureuse. Les défauts accumulés par Prometheus sont légion.

Prometheus a les défauts de ses qualités. Basé sur un script qui se veut terriblement ambitieux, la nouvelle épopée SF de l’ami Ridley Scott finit par sombrer sous le poids d’une mythologie que le scénariste Damon Lindelof a voulu rendre trop épaisse. Inconscient du fait qu’il écrit pour le cinéma et non plus pour la série télé, le talentueux bonhomme (escroc notoire pour certains déçus du final de Lost) pond un scénario qui s’apparente plus à un pilote d’une nouvelle série à mystères sans se rendre compte qu’il n’aura pas cinq ou six saisons devant lui pour développer ses thématiques, ses enjeux, ses tenants et aboutissants et apporter ses réponses distillées. Et c’est encore en comptant sur le fait qu’il y aura bien une suite, ce qui n’était pas gagné d’avance car conditionné au succès de ce premier volume. Dès lors, Lindelof, et par extension Scott, a t-il pensé une seconde à l’absurdité de son entreprise ? Si Prometheus était censé être quelque part, une sorte d’Alien Zéro, le film repose sur un faille béante : son rôle aurait dû être d’apporter des réponses, de répondre aux éventuelles questions que l’on pouvait se poser. Or, Prometheus pose plus de questions qu’il n’apporte de réponses. Le film établit un nouvel univers foisonnant mais ouvre du coup, de nombreuses interrogations, laisse la porte ouverte à de nombreuses interprétations, à tout un tas de questions qui laissent un amer sentiment de frustration une fois le générique passé. Lindelof construit Prometheus comme il a construit Lost et c’est probablement son plus grand tort. Car clairement, si suite il ne devait pas y avoir, alors le droit de le lyncher en place publique devrait être donné à tous les fans par vengeance. Œil pour œil, clavier pour clavier, le bonhomme pourrait vite mériter de se faire lapider à grand coup de touche « echap » et « enter ». Patience donc, les deux comparses ont un répit provisoire mais qui n’enlève rien au fait que Prometheus est un film souffrant de considérable problèmes d’écriture, laissant bon nombre de questions en plan ou de choses confuses. Des problèmes d’écriture que l’on retrouve à tous les niveaux, de la structure de l’arc narratif régissant l’ensemble aux détails composant le film. Si en cherchant et en se creusant la tête, on peut trouver des explications lointaines (voire fumeuses) tenant aléatoirement la route en termes de cohérences ou appelant le spectateur à disposer d’un bagage culturel préalable pour discerner les paraboles, cela n’excuse pas en revanche l’innombrable liste des bêtises  constituant l’intrigue, entre improbabilités, erreurs, raccourcis scénaristiques et illogismes.

Il y en a tellement que les lister serait bien trop long et fastidieux, le film les alignant toutes les deux minutes. Mais pêle-mêle, rien n’empêche d’en citer quelques-unes pour le plaisir. On résume… On a un équipage qui apprend à se connaître au moment de débarquer. Ok. Mais ils ont été choisi avant le départ et ont suivi un entraînement, non ? Le tout sans se rencontrer ?! Bien. Ils partent pour une mission périlleuse. Ok. Personne n’a eu la maline idée d’envoyer des sondes en reconnaissance avant de lâcher 1000 milliards de dollars dans un projet vaseux ?! Mouais. Sur place, interdiction de contact en cas de découverte. Ok, génial. Ce beau monde part explorer une première découverte, un réseau de souterrains où, tiens, on peut respirer. Comme c’est pratique. Ça permet d’enlever son casque. Au fait, il y fait -24 degrés mais ça ne gêne personne ? Ils doivent avoir des radiateurs nouvelle génération au cul, c’est pour ça. Ils font un contact mais c’est pas grave au passage, tordons le coup aux directives sinon il n’y aurait pas de film puisqu’on remballerait et merci, le générique de fin. Des sondes ont fait des plans des lieux en les scannant mais ça n’empêche pas les deux couillons qui les gèrent de se paumer comme deux loosers dans les tunnels. Sérieusement, elles servent à quoi vos sondes, les gars ? Pendant ce temps, le Pr. Shaw est stérile, on le sait, c’est chouette mais techniquement, on s’en contrefout en fait alors que le pilote black baise la commandante Vickers soudainement au détour d’une conversation mais on s’en tamponne comme du musée de la ventouse dans le Limousin vu que la scène ne sert à rien. La joyeuse bande est venue faire une visite sur une planète inconnue sans aucun armement apprend t-on (?! Bien joué les mecs) même si au final, ils ont tout plein de lance-flammes découvrira t-on, ce qui s’avèrera bien pratique. Chacun fait des trucs mais personne ne le voit car dans ce film, tout le monde est aveugle. L’androïde pique une capsule étrange de 10 kg mais personne ne le voit sur le trajet du retour, il tripote des découvertes (dont un espèce de pavé numérique ouvrant une porte) sans en parler ni que personne ne s’y intéresse, Shaw s’auto-opère mais personne ne se demande pourquoi. Elle-même d’ailleurs extrait un Alien mollusqué de son bide mais ne sent pas la nécessité d’en informer qui que ce soit, c’est normal après tout de sortir une créature de son abdomen. Le festival continuera jusqu’à la fin sur ce tempo entre des gens censés être morts mais qui en fait sont vivants en se font laver les pieds, mais en vrai, ça choque personne, des relations père/fille cachées sans qu’on en comprenne concrètement l’intérêt, des réactions ou actions qui n’ont pas de sens du type : pourquoi nos pseudo-scientifiques pétochards perdus dans les cavernes décident soudainement d’explorer les lieux en partant à l’aventure et s’approchent d’une créature bizarre quand ils se retrouvent nez à nez avec elle en faisant « petit, petit, petit », eux qui s’étaient barrés de peur devant une création, elle, morte ?! La trouille est partie juste au moment où elle aurait dû être à son paroxysme, non ? Normal… Passons sur les découvertes aberrantes du genre : les extraterrestres ont le même ADN que nous… Oh, incroyable ! Alors pourquoi ils ne sont pas comme nous, hein, banane ?! On va peut-être s’arrêter et pourtant, il y aurait matière écrire un bouquin tellement le film en réserve quantité d’autres.

Lindelof ne s’est visiblement pas fouler la main en écrivant un script qui multiplie les inepties et les erreurs en plus d’évacuer ses personnages sans considération ou d’accumuler les points incompréhensibles (17 membres, trois ou quatre existent vraiment et encore). Les visions en hologramme, pourquoi ? L’ingénieur du début, pourquoi il crève en fait (même si l’on peut en tirer une explication au final) ? La salle de réunion de ces géniteurs de l’homme, pourquoi elle raconte toute leur histoire en s’éclairant de partout ? Cette matière noire, pourquoi, comment, au final ? L’ingénieur survivant, il attendait quoi en réalité en hibernation dans son caisson ? Le Face Hugger, l’Alien, pourquoi leur existence ? On comprend comment mais pourquoi ? Bref, Prometheus, c’est beaucoup de pourquoi et c’est bien là le problème d’un script qui s’apparente plus au début d’un show télé qu’à un film de cinéma en soi, ce qui était visiblement la volonté pourtant affichée. Lindelof, votre scénario à des thématiques passionnantes mais il est écrit avec deux mains gauches et il est confus aussi bien dans sa narration que dans son imaginaire. Là où les créatures étaient identifiables dans les précédents question hiérarchie, on se retrouve avec un bordel sans nom entre des lombrics miteux, des serpent à tête de gland, un Face Hugger, un alien visqueux devenant –on ne sait trop pourquoi- un vrai alien etc… On connaît la passion du bonhomme pour la complexité mais quand même… Il devrait y avoir des limites et c’était un peu à Ridley Scott de les poser aussi et de recadrer tout ça. Un Ridley Scott qui lui, affirme avoir donné la version définitive du projet qu’il souhait. Etrange tant on a l’impression que le film a été sabré au montage dans tous les sens. Peut-être en raison de la réduction du budget initial, Scott ayant réclamé 500 millions avant qu’on ne lui en donne que 150 !

Alors, bilan ? Prometheus, une belle œuvre, élégante, riche mais fagotée avec des moufles. Fainéantise ? On ne sait pas. Toujours est-il que le film est époustouflant quand il se voit. Attention juste au retour de bâton quelques heures plus tard quand vous y repenserez. C’est là que l’on se rend compte de sa bêtise parallèle à son intelligence. C’est aussi là que l’on prend conscience que Prometheus réussit l’exploit de faire côtoyer dans le même film, le divin subjuguant et la niaiserie d’un nanar italien digne des bisseries des années 80. Désormais, il a en tout cas intérêt à avoir droit à une suite car sinon, il risque d’être difficilement pardonnable à sieur Ridley Scott de nous laisser ainsi sur notre faim en plus de ne pas avoir vraiment « renouveler la SF » comme annoncé. Espérons aussi que si elle voit le jour, elle sera un brin mieux écrite, avec surtout plus de sérieux en évitant de commettre autant de conneries. Mais bon, Prometheus, ça reste quand même pas mal du tout…. Ou pas… Argh, on ne sait toujours pas en fait !

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