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L’ENNEMI JAPONAIS A HOLLYWOOD : le nouveau documentaire des soeurs Kuperberg

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A la rédaction de Mondociné, on guette toujours avec la même avidité cinéphile chaque nouveau documentaire des sœurs Kuperberg, binôme qui n’a de cesse de cultiver et transmettre sa passion pour l’histoire du cinéma hollywoodien. Après s’être intéressées à des sujets divers et variés comme la censure du Code Hays, les femmes qui ont participé à bâtir la légende d’Hollywood ou très récemment les acteurs qui ont été espions pour le gouvernement américain pendant la guerre, Clara et Julia Kuperberg dévoilent leur petit dernier, un film de 54 minutes retraçant l’histoire de « l’ennemi japonais » de 1941 à nos jours, tant dans le cinéma hollywoodien que dans la vie quotidienne des américains. L’occasion pour le tandem d’évoquer surtout le concept du « Whitewashing », anglicisme désignant un phénomène qui perdure encore de nos jours et qui consiste à utiliser des comédiens blancs et anglo-saxons pour camper des rôles qui auraient dû, en toute logique, revenir à des acteurs ou actrices noirs, arabes ou asiatiques. Exemple récent et populaire, le marvellien Docteur Strange et le rôle de « L’Ancien » interprété par la britannique Tilda Swinton alors qu’il s’agit ouvertement d’un personnage… tibétain. On pourrait également citer Scarlett Johansson pour Ghost in the Shell (pas très japonaise la Scarlett) ou bien Emma Stone qui joue une sino-hawaïenne dans Aloha. Mais il fut un temps ou Hollywood assumait encore clairement cette position.

Marlon Brando dans La Petite Maison de Thé

Avec L’Ennemi Japonais à Hollywood, Clara et Julia Kuperberg remontent le fil du temps direction l’âge d’or d’Hollywood, et décryptent avec acuité un phénomène (tristement) intéressant qui a jalonné l’histoire d’Hollywood depuis ses débuts. Le film évoque des emplois (assez choquants vu d’aujourd’hui) comme celui de Katharine Hepburn dans Le Fils du Dragon (1944) où la comédienne apparaissait grossièrement grimée en chinoise, yeux bridés à l’appui. On pourrait se dire que le contexte était particulier avec la Seconde Guerre Mondiale opposant le Japon aux États-Unis… mais quid des prestations de Mickey Rooney dans Breakfast at Tiffany’s (1961) où l’acteur était maquillé à la limite de la caricature pour prêter ses traits au voisin nippon d’Audrey Hepburn ? Ou encore Marlon Brando dans La Petite Maison de Thé ? Les exemples sont légions et traversent les époques, de façon très visible hier ou plus sournoise aujourd’hui. L’Ennemi Japonais à Hollywood est ainsi un moyen d’analyser ce phénomène décennal ayant privé (et privant toujours) certaines communautés, de rôles de premier plan -les asiatiques en premier lieu- en soulevant au passage la question d’une certaine forme de racisme dissimulé. Le tout parfois remis en perspective avec l’histoire, comme lorsque le documentaire évoque les camps d’internement ayant regroupé les japonais vivant sur le sol américain pendant la guerre, ou articulé de sorte à faire écho avec notre époque comme quand il évoque la défiance qui perdure aujourd’hui envers les asiatiques à Hollywood et ce malgré le succès d’un Crazy Rich Asians. Car si l’on regarde de près, de nos jours, les stars asiatiques ont rarement leur place à Hollywood, ou alors dans des troisièmes ou quatrièmes rôles seulement destinés à aider les films sur le juteux marché chinois que l’industrie yankee n’a de cesse de vouloir séduire.

Mickey Rooney dans Breakfast at Tiffany’s
Katharine Hepburn dans Le Fils du Dragon

 

L’ennemi Japonais à Hollywood

Diffusion le 13 octobre sur OCS Géants

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