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NOVEMBRE de Cédric Jimenez : la critique du film

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Nom : Novembre
Père : Cédric Jimenez
Date de naissance : 2021
Majorité : 05 octobre 2022
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h40 / Poids : NC
Genre : Thriller, Policier

Livret de Famille : Jean DujardinAnaïs DemoustierSandrine Kiberlain, Lyna Khoudri, Jérémie Rénier, Sami Outalbali…

Signes particuliers : Cédric Jimenez évite avec brio les pièges d’un projet casse-gueule. 

Synopsis : Une plongée au cœur de l’Anti-Terrorisme pendant les 5 jours d’enquête qui ont suivi les attentats du 13 novembre.

LE RECIT DE LA TRAQUE

NOTRE AVIS SUR NOVEMBRE

C’était l’une des « curiosités » attendues au tournant lors du dernier festival de Cannes. Hors compétition, le cinéaste marseillais Cédric Jimenez présentait le sobrement intitulé Novembre, son thriller policier sur les terribles attentats parisiens du 13 Novembre 2015 qui ont fait 130 morts et plus de 400 blessés. Le réalisateur de La French, HHhH et Bac Nord s’est intéressé au déroulé de l’enquête qui s’est enclenchée dès les premières du drame, lançant une traque sur plusieurs jours pour remonter la trace des terroristes ayant semé l’effroi dans la capitale et possiblement prêts à frapper à nouveau. Le danger était réel avec ce projet sur un sujet encore sensible. Le danger de tomber dans l’opportunisme, dans le sensationnalisme, alors que la tragédie est encore chaude dans tous les esprits (et que le procès de Salah Abdeslam est en cours à l’heure de ces lignes). Jean Dujardin, Sandrine Kiberlain, Jérémie Rénier, Lyna Khoudri, Anaïs Demoustier, Sami Outalbali, Stéphane Bak ou encore Marine Vacth prêtent leur visage à ce récit sous haute tension, ramassé sur 1h40 sans répit. Comme les 4-5 jours vécus par ces enquêteurs qui ont mis leur vie en pause face à l’urgence.
Sobre. C’était ce qu’il fallait faire, c’est ce que Cédric Jimenez a fait. Plutôt qu’un film spectaculaire ne reculant devant aucune ficelle opportuniste, Jimenez signe un thriller minutieux, un film qui garde la tête froide, focalisé sur son objectif érigé en note d’intention. Pas question de basculer dans l’indécence, pas question d’instrumentaliser l’histoire, Novembre s’applique juste à détailler les coulisses d’une traque en articulant avec adresse enjeux, portraits et regards humains, comme a pu le faire Kathryn Bigelow outre-Atlantique avec son salué Zero Dark Thirty. Pour autant, Cédric Jimenez ne tombe pas dans l’effort compassé ayant peur de son sujet délicat. Le cinéaste trouve le juste milieu entre le « suspense » (façon de parler dans la mesure où l’on connaît les enjeux et les aboutissements) d’une enquête haletante et la dignité d’un film rendant hommage au travail difficile de ceux qui l’ont mené à bien. On entend déjà des voix s’élever contre le cinéaste dans l’après Bac Nord. Oui, Jimenez parle encore des « flics ». Celles-là parleront d’obsession. Ce n’est pas vraiment le mot. Le sujet, l’angle du scénario, le propos, l’importance de l’histoire, tels sont les éléments qui l’ont poussé à accepter le projet.
Fidèle à son style, Cédric Jimenez signe un thriller ultra-efficace, aussi captivant dans ce qu’il raconte qu’haletant dans la manière dont il le raconte. Novembre allie toutes les qualités qui pouvaient en faire un grand film évitant les pièges tendus sur son parcours. A la fois sobre et d’une solidité à toute épreuve, il n’exploite aucune ficelle facile et se cantonne constamment à solidifier son socle : raconter cliniquement le déroulé des évènements tout en gardant un œil ouvert sur l’humain au cœur d’une situation vraiment particulière. Le déroulé, c’est l’immédiate urgence, protéger et trouver. C’est la complexité de l’enquête, le souci du moindre détail, les impasses, les fausses pistes, démêler le vrai du faux, chercher une aiguille dans une botte de foin avec l’impossibilité d’échouer. L’humain, il est réduit au minimum par choix cohérent. Ce sont juste des hommes et des femmes qui ont été confrontés à l’urgence de devoir résoudre une situation de crise, des hommes et des femmes qui ont tout stoppé, leur vie, leur famille, leurs émotions, des hommes et des femmes qui se sont mis en mode « machine » pour se concentrer à 200% sur un but unique qui a occupé toute leur attention durant quelques jours de terreur : trouver avant que ça recommence. Le parti pris de faire des personnages de simples fonctions prend ainsi tout son sens.
On se doute bien que nombreux seront ceux qui tomberont à bras raccourcis sur le film, à commencer par une certaine critique qui n’attendait que ça avant même de voir le résultat. Novembre est un film respectable, un bon film qui fait tout pour être respectable. Un film qui évacue les images d’attentats, qui évacue l’emphase ou le tire-larmes, qui évacue le voyeurisme malaisant ou la dramatisation. Jimenez signe un effort carré, implacable, à la fois documenté et à bonne distance de ce qu’il raconte. Avec dedans, des comédiens impeccables, un agencement narratif choral reflétant l’idée d’un travail collectif, un rythme et un montage restituant parfaitement la situation vécue entre pression, chaos, vertige et sentiment d’urgence, et une mise en scène redoutablement efficace, immersive et sans fioritures, une mise en scène chargée en tension, traduisant bien cette idée de carburation contre la montre, la peur palpable, l’épuisement, le devoir de ne pas lâcher, les petites victoires, les erreurs, le défaitisme et la pugnacité.

 

On avait fait un faux procès à Bac Nord. Jimenez connaîtra sûrement son lot de bousculades avec ce nouveau long-métrage. Qu’importe, il poursuit vaillamment un parcours jusque-là sans faute. Novembre est une réussite, avec peut-être quelques petites imperfections, mais l’essentiel est là. Ne pas faire un film « coup de poing », faire juste un film digne et passionnant. Mission accomplie, Novembre est une prise au col pour mieux planter le spectateur au fond de son siège et ne jamais qu’il en bouge.

 

Par Nicolas Rieux

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