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LA BATAILLE DE LA MONTAGNE DU TIGRE de Tsui Hark [Critique – Sortie Ciné]

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la_bataille_de_la_montagne_du_tigreMondo-mètre
note 6.5 -10
Carte d’identité :
Nom : The Taking Of Tiger Mountain
Père : Tsui Hark
Date de naissance : 2014
Majorité : 17 juin 2015
Type : Sortie en salles
Nationalité : Chine
Taille : 2h20 / Poids : NC
Genre : Action

Livret de famille : Zhang Hangyu (Yang), Lin Gengxin (Capitaine 203), Liya Tong (Petite Colombe), Tony Leung Ka Fai (Hawk), Yu Nan (Qinlian), Han Geng (Jimmy), Chen Xaio (Gao)…

Signes particuliers : Capable du meilleur comme du pire depuis le début des années 2000, le hongkongais visionnaire Tsui Hark est de retour avec un blockbuster ultra-ambitieux et complètement… On n’a même pas de mot.

TSUI HARK PLUS FOU QUE JAMAIS !

LA CRITIQUE

Résumé : En 1946, après la capitulation japonaise, la guerre civile fait rage en Chine. Des bandits sans foi ni loi en profitent pour occuper le nord-est du pays. Hawk est le plus puissant et le plus redouté de ces barbares. Avec ses hommes, il vit dans une forteresse imprenable, lourdement armée, au sommet de la Montagne du Tigre. L’Unité 203 de l’Armée de Libération traverse cette région lorsqu’elle tombe sur des hommes de Hawk en train de piller un village. Le Capitaine 203 décide alors de rester et de combattre le chef de ses criminels. Mais, cela n’est possible que si l’officier de reconnaissance Yang réussi à s’infiltrer d’abord dans le camp retranché de Hawk. Une bataille impitoyable, faite de force et de ruse, commence… la_bataille_de_la_montagne_du_tigre_4L’INTRO :

Cinéaste retrouvé grâce à la saga des Detective Dee qui faisait suite à une période délicate pour ce pilier emblématique de la nouvelle vague du cinéma HK (son segment de Triangle était le plus faible du lot, Missing et All about Women étaient insignifiants, et avant l’excellent Seven Swords, Black Mask 2 et La Légende de Zu étaient ratés), le hongkongais Tsui Hark revient en force avec un blockbuster rendant hommage à des héros méconnus et oubliés de l’histoire chinoise. Avec La Bataille de la Montagne du Tigre, le réalisateur s’inspire d’une histoire vraie passablement remaniée, prenant racine dans le contexte de la guerre civile post-capitulation japonaise, en 1946, lorsqu’une unité de soldats fut envoyée dans les contrées lointaines du nord-est de la Chine, pour y combattre un groupe de bandits barbares, terrorisant les populations locales, pillant, détruisant et tuant sans état d’âme. Motivé par le souvenir d’un vieil opéra révolutionnaire qui remporta un vif succès dans les années 60 et adapté d’un célèbre roman de Qu Bo (Tracks in the snowy forest paru en 1957) mainte et mainte fois retravaillé au cinéma ou à la télévision, La Bataille de la Montagne du Tigre était annoncé comme l’accouchement d’un projet de logue date ambitieux et ultra-spectaculaire. Cette nouvelle aventure démesurée de l’éternel visionnaire, une fois de plus filmée en 3D (en espérant éviter la débâcle visuelle de l’horrible Dragon Gate) laissait entrevoir un spectacle tonitruant mettant en scène une bataille épique et impitoyable entre deux clans inégaux, l’un lourdement armé et en surnombre, l’autre porté par son courage, prêts à faire front avec acharnement durant près de 2h20 d’une intensité sans faille.

la_bataille_de_la_montagne_du_tigre_3L’AVIS :

La Bataille de la Montagne du Tigre incarne parfaitement la quintessence du cinéma actuel de Tsui Hark, et par extension l’état du cinéma hongkongais à la gloire fanée et surpassée par la Corée voisine. Cette dernière œuvre viscérale et formellement dingue d’ambitions, s’acharne à remettre la production nationale sur les bons rails, proposant un spectacle dantesque dichotomique, autant porté par ses qualités qu’il ne souffre de ses défauts, symboles de la recherche d’un nouveau souffle pour une cinématographie malade qui d’échine à retrouver son lustre et sa folie d’antan malgré les contraintes, au risque de ne plus savoir comment canaliser son bouillonnement intérieur qui explose tel un volcan crachant son feu dans un désordre chaotique, qu’incarne parfaitement le cinéma de Tsui Hark.la_bataille_de_la_montagne_du_tigre_2Sans doute le film le plus timbré du génie hongkongais qui repousse loin les limites du portnawak dans un sur-délire intense et complètement allumé, La Bataille de la Montagne du Tigre est un fourre-tout sans cesse étonnant, fourmillant d’idées visuelles et de partis pris surprenants, qu’il rend avec une générosité qui tire à tout-va dans un spectacle massif et hystérique à deux doigts de l’hyperactivité malade. Formellement grandiose, techniquement maîtrisé par un Tsui Hark plus fou que jamais dans sa mise en scène démente et fiévreuse, alternant surréalisme de l’action pop corn grandiloquente, magnificence esthétique, comique second degré et expérimentalisme déjanté, multipliant les cadrages improbables et les ralentis en bullet time 3D, La Bataille de la Montagne du Tigre est injecté de séquences visionnaires, bien que toujours gênées par cette éternelle non-maîtrise des SFX, récurrente depuis près de trente ans dans l’industrie HK, au grand dam du cinéaste lui-même.LA+BATAILLE+DE+LA+MONTAGNE+DU+TIGRE+-3D+PHOTO2Tsui Hark se mue en espèce de néo-Peckinpah asiatique, en action-guy à la tête d’un improbable Expendables historique complètement frappé et tellement emblématique du cinéma de cet enfant de la virtuosité qui n’a eu de cesse depuis toujours, de repousser les limites du cinéma national, avec cette capacité incroyable à marier les genres dans des films uniques et fous. De Green Snake à Détective Dee 2, Tsui Hark a toujours navigué dans une singularité formelle et stylistique qui est la sienne. Il ne déroge pas à son cinéma avec cette Bataille de la Montagne du Tigre, OFNI purement « harkien », pour le meilleur et pour le moins bon. Parfois virtuose, parfois amusément grotesque, parfois confus voire totalement bordélique visuellement comme narrativement, mais capable de moments de bravoure tarés extraordinaires (le combat contre le tigre, l’attaque initiale de la forteresse, le final avec l’avion, les affrontements dantesques à l’arme lourde, la scène irréelle des deux frangins faisant leurs besoins dans la neige…), ce nouvel effort sublime son art de l’excessivité décomplexée, magnifié par une 3D qui donne du relief à ses envolées lyrico-fêlées !La-Bataille-de-la-montagne-du-tigre-3Par un hommage pernicieux, à la fois glorificateur du courage de vieux héros oubliés et moqueur de ces récits héroïques qui traversent les âges en s’enroulant dans un légendaire teinté de surréalisme mythologique (ce que le film rend via ses excès en tout genre ironisant sur sa conception de la crédibilité), Tsui Hark livre sa vision du film de commando à l’ancienne, registre un peu oublié ces temps-ci. Le résultat est unique, récupérateur d’une tradition et pourtant ne ressemblant en rien, ni aux classiques d’antan façon Les Douze Salopards, ni aux œuvres stéroïdées à la Expendables, pas plus qu’aux hits du cinéma HK façon Eastern Condors de Sammo Hung. Le résultat, c’est une nouvelle fantaisie fondue dans un mélange de mégalomanie et de générosité de cœur, de divagation psychotique et de réalisme sensationnel. Un film mentalement dérangé, passablement schizophrène, mais magistral. Comme tous les films de Tsui Hark. Et c’est pour ça qu’on l’aime.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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