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LA PLANÈTE DES SINGES – SUPRÉMATIE de Matt Reeves : la critique du film

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la_planete_des_singes_suprematieCarte d’identité :
Nom : War for the Planet of the Apes
Père : Matt Reeves
Date de naissance : 2017
Majorité : 02 août 2017
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 2h30 / Poids : 217 M$
Genre
: Action, SF

Livret de famille : Andy Serkis, Woody Harrelson, Steve Zahn, Terry Notary…

Signes particuliers : Un digne final pour la saga.

 

 

GLOIRE À CELUI QUI LIBÉRA SON PEUPLE

LA CRITIQUE DE LA PLANÈTE DES SINGES – SUPRÉMATIE

Résumé : Quelques années après l’attaque menée par Koba, la guerre entre Singes et Humains n’a fait que s’aggraver. L’armée menée par César est désormais réfugiée dans une forêt mais se fait attaquer par un groupe de soldats humains. Les pertes subies obligent les singes à battre en retraite mais, après avoir vu le colonel des humains abattre son fils, César se retrouve pris d’une terrible soif de vengeance et choisit de partir de son coté en mission punitive, rejoint par trois de ses fidèles. La chasse à l’homme les mènent jusqu’à une base militaire où le destin de la planète va se jouer.la_planete_des_singes_suprematie_3

L’AVIS DE JULIEN DUGOIS :

La trilogie la plus darwinienne, mais aussi la plus belle vitrine de l’usage de la motion capture, vient se clore dans un troisième blockbuster encore plus spectaculaire que les deux précédents. Pour rappel, en 2014, Matt Reeves avait repris le contrôle de la saga initiée par un premier film qui manquait cruellement de souffle épique, faute à la place trop importante donnée à sa relecture crypto-gay de Max, mon amour. Si L’Affrontement de Reeves fut une réussite, c’était grâce à sa façon de jouer avec le spectateur en le plaçant non pas du côté des humains mais de celui des singes, et d’y avoir introduit une réflexion d’ordre politique qui dépassait l’écueil du simple manichéisme racial. Dans la suite qu’il propose aujourd’hui, l’opposition des gentils singes contre les méchants humains est en revanche bien assurée. Le récit tourne toujours autour de César, le leader de l’armée simiesque, qui tel un Charles Xavier un peu plus poilu, a autrefois lutté pour faire cohabiter les siens avec les humains, mais qui, à présent la guerre entamée, doit faire face à sa propre rage envers des adversaires aux méthodes méprisables. Cette façon qu’a celui qui est présenté comme un prophète auprès des siens, de lutter contre ses démons incarnés par le souvenir de sa némesis Koba, est le cœur et la force de cette conclusion au triptyque qui lui est consacré.la_planete_des_singes_suprematie_4Cette « guerre de la Planète des Singes«  (c’est le titre original… le choix du terme « Suprématie » reste à discuter) s’inscrit dans la parfaite lignée du genre approprié. Sans jamais chercher à réitérer la grande bataille épique qui concluait le précédent opus et réunissait des centaines de singes, celui-ci s’ouvre et se ferme sur deux séquences non moins impressionnantes. Si le fait de limiter les principales scènes d’action au début et à la fin d’un film est souvent synonyme de rythme ingrat (souvenez-vous des Gardiens de la Galaxie vol.2 !), il faut bien comprendre qu’ici, les références sont avant tout dans les grands classiques du film de commando (Les Canons de Navarone, Les Douze Salopards…) et du film d’évasion (La Grande Evasion, Le pont de la rivière Kwai…). Démontrant sa maîtrise des codes, et en multipliant les références stylistiques -la plus flagrante étant sans doute celle à Apocalypse Now dans la lumière de la dernière scène de Woody Harrelson-, Matt Reeves livre une aventure dans laquelle on se plait à suivre César et sa troupe. L’une des limites serait d’ailleurs que les personnages simiesques secondaires manquent de caractérisation, à tel point qu’on ne retiendra le nom que d’un seul d’entre eux, Maurice, l’imposant mais bienveillant orang-outan déjà vu dans L’Affrontement, mais aussi l’amusant sidekick bonobo, une figure comique que l’on ne s’attendait à trouver dans un tel film de guerre.

_DSF1564.RAFLe redoutable antagoniste incarné par Woody Harrelson est quant à lui filmé comme le serait n’importe quel méchant, à savoir dans des contre-plongées écrasantes qui ne font qu’amplifier son caractère de vilain. Jusque dans sa dernière scène donc, il ne partagera avec le Colonel Kurtz que le grade et la coupe de cheveux. Ce n’est certainement pas son monologue dans lequel il explique ses motivations, mais aussi ses propres troubles internes, qui vont permettre à l’ultra-manichéisme du dispositif de s’estomper un tant soit peu. Malgré le magnétisme que dégage ce cher Woody, le personnage humain le plus intéressant est finalement la gamine interprétée par Amiah Miller, jeune actrice déjà aperçue dans Lights Out, dans ce qu’elle symbolise de l’avenir de l’humanité et donne en cela la clé de cette « Suprématie » simiesque. Aucun humain ne vient en conséquence prendre le relais de James Franco et Jason Clarke pour incarner cette compassion humaine qui viendrait rappeler à César, que nous ne sommes tous des monstres méritant la mort. Une absence qui vient, presque malgré elle, nous rappeler qu’un appui humain aurait été salutaire à ces singes désormais acquis à une idéologie violemment xénophobe. Cependant, dans la façon dont il s’achève, le film est loin d’avoir posé les bases de la situation telle qu’on la retrouvera dans le film de 1968, dont cette trilogie devait pourtant servir de prequel. Il reste tant à faire pour en venir à l’établissement d’une civilisation simiesque à l’échelle planétaire (car n’oublions pas qu’il n’est jusque-là question que d’une tribu de la côte ouest des Etats-Unis !) qu’il ne serait nullement étonnant que la Fox continue à capitaliser sur cet univers post-apocalyptique autrefois imaginé par Pierre Boulle.

L’AVIS DE NICOLAS RIEUX :

Tout a été dit ou presque par Julien ci-dessus. Dans la lignée de ses deux prédécesseurs, ce troisième et dernier chapitre de la trilogie consacrée à l’évolution de César au cœur de cette guerre human-simiesque, Suprématie fait dans l’économie de l’action. Elle est effectivement concentrée essentiellement au début et à la fin, mais on ne s’ennuie pas pour autant dans ce nouveau volet qui, spirituellement, s’applique à poser les derniers fondements et à conclure une saga attachée à la volonté d’être plus intelligente que la moyenne des blockbusters classiques visant la seule efficacité du geste. Ici, il est surtout question d’observer une fois de plus les mécanismes d’un conflit inéluctable, l’évolution d’une guerre, l’opposition idéologique, la volonté génocidaire. Le sujet est passionnant et il est parfaitement implémenté à cet univers fantastico-science-fictionnel jadis imaginé par Pierre Boulle. Mais là où Suprématie trouve sa limite, c’est dans le virage brusque qu’il prend par rapport à ses deux aînés. Jusqu’à présent, la saga La Planète des Singes avait su trouver le parfait équilibre entre les humains et les singes. A travers les personnages de James Franco dans le premier, puis Jason Clarke dans le second, le spectateur avait la possibilité de s’attacher émotionnellement aussi bien aux humains qu’aux singes savants. Et le conflit n’en devenait que plus cruel, tragique et amer. Mais dans Suprématie, Matt Reeves bouleverse cet équilibre, et c’est dommage.

L’erreur est finalement à aller chercher du côté du nouveau personnage humain star de ce troisième volet, campé par un Woody Harrelson qui fait du Woody Harrelson. Désormais, plus d’humain empathique, place à un véritable méchant voulu iconique, sorte d’ersatz assumé du Colonel Kurtz dans Apocalypse Now, avec un festival de références à l’appui. L’ennui, c’est que le film perd cet équilibre formidable, et avec lui, perd un peu de l’intelligence déployée par la saga. Car désormais, les rapports sont plus binaires, des gentils singes, un vil et méchant militaire et une intrigue plus tirée par les cheveux, parfois même à la limite de la cohérence. La subtilité des enjeux au centre du conflit s’évaporent dans un affrontement où le spectateur est amené à prendre fait et cause pour les singes, là où l’on aurait aimé que les motivations des deux camps sont plus défendables (et de fait moins manichéennes) pour poursuivre dans cette voie d’un fort accent tragique qui planait sur la franchise. Car il n’y a pas de meilleurs films « d’affrontement » que quand l’on peut comprendre les idéaux des deux camps en présence. Seul l’introduction d’une jeune fillette blondinette vient éclaircir le tableau noir fait des hommes, mais la pauvre demeure très gadget dans le nœud du film. Reste que Suprématie est néanmoins un bon film, suffisamment haletant pour embarquer, techniquement impressionnant, mis en scène avec élégance, et bourré de références au cinéma de guerre, au western, voire même au cinéma biblique (voir le final).

BANDE-ANNONCE :

Par Julien Dugois & Nicolas Rieux

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