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Le saviez-vous ? : Jean Gabin, amoureux de Marlene Dietrich et surveillé par le FBI

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Le cinéma nous a souvent donnés à voir les plus belles romances qui soit avec son don pour sublimer les passions. Mais loin de l’écran, dans la réalité de la vie,  il y a quand même eu quelques grandes histoires d’amour qui sont entrées dans la légende d’Hollywood ou d’ailleurs. Comme celle entre Katharine Hepburn et Spencer Tracy, ou entre Lauren Baccall et son Humphrey Bogart. Il y a eu les liaisons aussi, Marilyn et notre Yves Montand national par exemple. Ou entre l’élégante Marlene Dietrich et le bourru Jean Gabin, deux opposés qui se sont follement attirés durant un instant. Histoire…

On part au temps de la Seconde Guerre Mondiale. Les Allemands gagnent, la France capitule, Pétain lance la collaboration. Du côté du petit monde du cinéma, on assiste à l’avènement de la Continental-Films, une société de production française financée par des capitaux allemands et créée par Goebbels. Son but était de produire des films mais avec une visée propagandiste à peine déguisée. De nombreux acteurs et réalisateurs refuseront de travailler pour la Continental car cela revenait à collaborer avec l’ennemi. Parmi eux, le populaire Jean Gabin. On essaiera par tous les moyens de le convaincre, y compris en lui proposant en échange, la libération de son neveu retenu prisonnier en Allemagne. Gabin refusera et à contrecœur, il gagnera les États-Unis. Il n’aimait guère l’idée d’aller dans ce royaume du faux qu’était Hollywood, lui l’homme de la terre et de l’authenticité. Mais ses options étaient limitées. Au moins, il retrouverait là-bas Michèle Morgan, dont il était amoureux. Et puis Hollywood le voulait aussi. Mais n’ayant pas de contrat signé pour un film en particulier, Gabin n’eut d’autre choix pour s’échapper que d’accepter un visa de propagande du gouvernement de Vichy. Il n’avait pas conscience de ce que cela pourrait impliquer par la suite. Le document l’engageait à représenter le prestige du maréchal Pétain à l’étranger. Il pensait le signer et s’en foutre comme de l’an 40 une fois loin. Il n’en sera rien.

Une fois à Hollywood, Jean Gabin a du mal à s’adapter. Comme c’est étonnant. A Hollywood, le star-system vivait comme dans une bulle, l’insouciance régnait, les fêtes s’enchaînaient, loin du monde, loin de ses terribles réalités. Gabin n’y arrivait pas. Il culpabilisait d’être un privilégié à l’abri pendant que ça canardait en Europe, que sa douce France vivait de sales heures et que ses jeunes tombaient au front. C’est en tout cas là-bas, à New-York précisément, qu’il va retrouver cette belle Marlene qu’il avait déjà croisé quelques fois à Paris. A l’époque, Marlene Dietrich trouvait que Gabin avait le charisme d’une patate. Il faut dire qu’elle était très « stylée », sorte de vamp aussi sexy qu’élégante et énigmatique. De Marlene Dietrich se dégageait un chic et une classe naturelle, un mélange antinomique de froideur/chaleur, de tendresse, de raffinement et de langueur distinguée. Elle avait ce petit quelque-chose d’impressionnant, presque d’intimidant. Gabin était l’exact opposé, un homme un peu plus bourru, brut, nonchalant, dont le charisme était de l’ordre du populaire gouailleur. Un homme simple qui aimait les choses simples, toute star qu’il était. « Rien ne semblait devoir nous rapprocher. Il aura fallu cette période d’exil pour qu’il me soit donné de découvrir, sous l’écorce un peu rude du faubourien, l’âme vibrante, ardente et sensible de l’homme » dira plus tard Marlene à propos de son Jean. Leur amour était inattendu, improbable, et pourtant. Bien que tous les deux mariés, ils vont tomber éperdument amoureux en 1941 à Manhattan. Marlene Dietrich voit soudain plus loin que le paraître, elle est séduite par la sensibilité animale de l’homme, tapie derrière son côté loup solitaire. Leur passion enflammée va les pousser à emménager ensemble à Beverly Hills. C’est là que les soucis vont commencer.

Charles Boyer, autre frenchie exilé à Hollywood et potentiel rival de Gabin auprès du public américain, va le dénoncer comme un pro-vichyste. Le fameux visa signé par Gabin avant son départ remonte à la surface. Un français doté d’un visa de propagande vichyste qui de surcroît fréquentait une allemande, certes naturalisée mais allemande quand même, autant dire que les soupçons vont aller bon train chez les Yankees. A cela s’ajoutait le fait qu’il ne se mêlait pas à la communauté française sur place et qu’il n’allait jamais aux fêtes incessantes (parce que ça l’emmerdait royalement). Ce cocktail suspicieux va faire que Jean Gabin sera convoqué par le FBI qui a monté tout un dossier sur lui. L’interrogatoire sera blessant pour l’acteur, que l’on soupçonne d’espionner pour le compte des allemands. Lui qui a quitté sa patrie à contrecœur et souffre d’un terrible inconfort à se savoir privilégié planqué pendant que des jeunes meurent aux quatre coins de la France et de l’Europe au nom de la liberté. C’en était trop. Malgré son amour pour Marlene, Gabin n’en pouvait plus. Pour lui (et il ne cessera de le répéter par la suite), les américains sont des cons. Résultat, il part s’engager et fuit cette Amérique qu’il détestait et qui voyait en lui tout ce qu’il méprisait : « un collabo ». En 1943, l’acteur rejoint les Forces Françaises Libres, d’abord comme canonnier sur un char d’assaut avant de devenir chef de char dans la 2e Division Blindée. Il ne voulait plus être un planqué, il ne voulait plus être un privilégié, il culpabilisait trop. Gabin s’illustrera par son courage, prenant des risques et se battant comme n’importe quel « anonyme ». Dans une lettre adressée au FBI, de Marlene Dietrich expliquera que Gabin  est parti « brisé » par ces accusations. Il a rédigé son testament (dans lequel il lui léguait tous ses biens) et fait sa demande pour rejoindre la 2e DB… alors qu’il avait 40 ans, peur du feu et qu’il était claustrophobe ! Sa seule requête fut d’avoir le premier grade suffisant pour pouvoir porter une casquette et non un béret à pompon. Il trouvait ça ridicule, surtout à 40 balais.

Pendant ce temps, Marlene s’engagea aussi à sa manière. La star entama un tour de chant dans les casernes pour soutenir les soldats et pour aider à lever des fonds afin de financer le débarquement en Afrique du Nord. Les deux tourtereaux s’éloignent mais ils se retrouvaient parfois brièvement. Ils se croiseront à Alger notamment, puis à Paris en novembre 44. Là, ils parlent d’avenir. Jean Gabin fait même une demande en mariage. Mais pour lui, une chose est sûre, il est hors de question de retourner vivre aux États-Unis.  En septembre 1945, c’est Marlene qui débarque en France mais les choses seront compliquées. Gabin n’est pas bien dans sa peau. L’acteur angoisse pour le futur. Il a les traits marqués par la guerre et ses cheveux sont déjà totalement blancs. « Qui va vouloir faire tourner un coton-tige ? » disait-il. Et puis la guerre lui a pris sa place. En son absence, des Gérard Philippe ou Jean Marais sont devenus les nouveaux « jeunes premiers ». Pendant l’été 1946, Dietrich et Gabin tournent néanmoins leur premier (et unique) film ensemble, Martin Roumagnac. Un échec au passage. A la fin du tournage, Marlene repart… et les deux amoureux ne se reverront plus jamais. Jean Gabin venait de comprendre que Marlene n’abandonnerait jamais sa carrière hollywoodienne. Ne voulant pas jouer le jeu pervers de l’amant malheureux, il passera à autre chose et se remariera trois ans plus tard. Il écrira une lettre très mélancolique à sa belle, expliquant sa tristesse et son refus de la revoir à jamais. De son côté, Marlene Dietrich vivra très mal cette rupture totale. La star essaiera à de nombreuses reprises de contacter Gabin, sans succès. Inconsolable, elle passera même les dernières années confinée dans son appartement avenue Montaigne, pile face à la chambre du Plazza où ils avaient séjourné pendant la guerre et vécu quelques jours si heureux.

 

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