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L’HISTOIRE DU GÉANT TIMIDE de Dagur Kari : la critique du film

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histoire du geant timideMondo-mètre
note 4.5 -5
Carte d’identité :
Nom : Fusi
Père : Dagur Kari
Date de naissance : 2015
Majorité : 24 février 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : Islande, Danemark
Taille : 1h34 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de famille : Gunnar Jónsson (Fusi), Ilmur Kristjánsdóttir (Sjöfn), Arnar Jónsson (Rolf), Margrét Helga Jóhannsdóttir (Fjola), Franziska Una Dagsdóttir (Hera), Sigurður Skúlason, Sigurður Karlsson…

Signes particuliers : Notre énorme coup de cœur du moment !

ON AIMERAIT TOUS CONNAÎTRE UN GÉANT COMME LUI

LA CRITIQUE

Résumé : A 43 ans, Fusi vit toujours chez sa mère. Alors que son quotidien est rythmé par une routine des plus monotones, l’irruption dans sa vie de la pétillante Alma et de la jeune Hera va bouleverser ses habitudes de vieux garçon…lhistoire-du-geant-timide-1-1300x605L’INTRO :

L’Histoire du Géant Timide était placé sous la bonne étoile de joyeuses retrouvailles cinéphiles avec le cinéaste Dagur Kari, dont on était tombé éperdument amoureux du cinéma il y a plus de treize ans, au détour de son magnifique Noi Albinoi. Fils spirituel d’Aki Kaurismaki dans l’âme, Dagur Kari est aujourd’hui de retour avec un quatrième long-métrage témoignant une nouvelle fois, de son attirance pour les beaux personnages perçus comme étranges car en marge de la norme sociale communément admise. Peignant le portrait de Fusi, un colosse nordique tout en chair et en gentillesse, le fer de lance du néo-cinéma islandais (avec Baltasar Kormakur, au passage producteur du film) signe à n’en pas douter, l’un des plus beaux films de ce début d’année 2016, et au-delà.histoire-du-geant-timideL’AVIS :

L’Histoire du Géant Timide, c’est le portrait délicat d’une fragile âme d’enfant dans le corps d’un géant adulte. L’Histoire du Géant Timide, c’est le portrait d’un colosse dont l’effrayante apparence massive, n’est que l’enveloppe cachant ses nombreuses fêlures d’être humain ô combien particulier. L’Histoire du Géant Timide, c’est enfin une belle histoire d’amour et une ode à l’être humain dans tout ce qu’il pourrait avoir de plus beau s’il n’était pas ce qu’il est. A l’heure où le cinéma ne cesse de jurer par les dystopies pour mieux nous terrifier au son d’un futur d’anticipation désenchanté, Dagur Kari signe comme une sorte de contre-dystopie, montrant finalement, qu’il ne sert à rien d’imaginer des futurs lointainement farfelus anticipant de sombres destinées pour l’humanité. Ces futurs inquiétants et troublés, ce sont ni plus ni moins que notre présent. Nous vivons déjà une dystopie. Le vrai monde idéal « d’avant l’apocalypse sociale« , c’est celui de son magnifique Fusi, armé de toute sa pure sensibilité, de sa toute sa naïveté émouvante, de son regard compatissant et dénué de la moindre once de cruauté. Sa simplicité d’esprit fait de lui un être authentique, sans arrière-pensées, seulement guidé par son instinct bienveillant, son absence de préjugés, de calcul, sa nature profondément bouleversante de douce personne ne comprenant pas le pourquoi du comment d’un monde agitant autour de lui, vilénie, fourberie, hypocrisie, dureté et méchanceté. Fusi est à part car Fusi est tout simplement l’incarnation d’une immense poésie noble, dans un monde où ladite noblesse n’a plus sa place.lhistoire_du_geant_timideEt Dagur Kari de presque quitter les sentiers du réel tangible pour s’aventurer sur ceux d’une œuvre quasi-fantastique, imaginant à travers son personnage lumineusement tragique, ce que pourrait être le monde s’il était peuplé d’êtres purs comme lui. Il en faut de l’imagination tant on est loin de notre crasse réalité pour accepter un tel chérubin adulte. Et l’air de rien, Kari de déployer un puissant portrait terriblement acerbe et désillusionné de notre monde actuel, où la sincérité n’a plus sa place, ou la médiocrité, la méfiance et une certaine forme d’ignominie ont pris leur place à la douceur, à la bonté, au naturel. Ce que notre monde a perdu en beauté, Dagur Kari nous le rappelle et nous le restitue avec une formidable justesse, sur la foi d’une allégorie dramatique capable de nous tirer de profondes larmes mélancoliques coulant de nos yeux émerveillés par la grâce du parcours de cet être malmené pour la seule et unique raison, qu’il ne perçoit pas le monde extérieur de la même manière que nous. Sauf qu’en l’observant à travers ce subtil et succulent portrait précieux, un constat s’impose très vite. Le monde de Fusi serait à n’en pas douter, bien plus beau que le nôtre si l’on pouvait amener l’humanité vers lui, au lieu d’essayer de vouloir imposer le contraire. Habité d’une tristesse insondable tapie dans l’ombre d’une étourdissante forme de drôlerie chatoyante, L’Histoire du Géant Timide touche en plein cœur à la force de sentiments vrais, à la force d’un regard simple et débarrassé des lunettes pervertissantes couvrant nos yeux d’un cynisme tragique. Ce coup d’œil pur et cristallin, c’est l’univers de Fusi. Il pourrait briller de mille feux si sa flamme ne vacillait pas autant, mise en péril par les vents contraires de notre réalité, qui soufflent dans le mauvais sens.VirginMountain_web_3Le seul défaut que l’on pourra reprocher à ce coup d’éclat magistral de Dagur Kari, c’est qu’il doive se terminer à un moment ou à un autre… alors que l’on se verrait bien passer le reste de notre vie, cinématographique du moins, en compagnie de ce glorieux et admirable personnage. Car, comme le dit Francis Ford Coppola à propos du film, « Si tout le monde monde était comme lui, le monde serait merveilleux ». L’Histoire du Géant Timide est l’une des plus belles choses qui nous ait été donnée de voir sur un écran de cinéma ces derniers temps. Une histoire intimiste que l’on rêverait tant de voir générale, une histoire imaginaire que l’on rêverait tant de voir réelle. Pour le bien de l’homme, pour notre bien à tous. Déchirant et éloquent, même voire surtout dans ses silences, L’Histoire du Géant Timide est un petit chef-d’œuvre fait de cœur, d’esprit, d’intelligence et d’une folle humanité. Une œuvre forte, poignante, sombre dans ce qu’elle montre du genre humain, mais de laquelle naît une lumière qui irradie l’écran en nous donnant l’envie d’être meilleur dans un monde soudainement redevenu fade et navrant une fois le bout de la pellicule atteint.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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