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THE SESSIONS (critique)

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Carte d’identité :
Nom : The Sessions
Père : Ben Lewin
Livret de famille : John Hawkes (Mark), Helen Hunt (Sheryl Cohen), William H. Macy (Père Brendan), Moon Bloodgood (Vera), Adam Arkin (Josh), Annika Marks (Amanda), W. Earl Brown (Rod)…
Date de naissance : 2012
Nationalité : Etats-Unis
Taille/Poids : 1h35 – 1 million $

Signes particuliers (+) : De formidables comédiens dans des rôles pas faciles. John Hawkes enfin dans un premier rôle intéressant. Un film léger, sincère et agréable sur un sujet pourtant assez sensible.

Signes particuliers (-) : Lewin opte pour un regard un peu candide et inoffensif qui rend The Sessions sympathique à défaut d’être plus.

 

LE SEXE EN SIX LECONS

Résumé : Mark, frappé par la polio alors qu’il était enfant, vit depuis cloué sur son brancard, incapable de bouger. Intrigué par le « sexe », il finit par passer une annonce et fait la connaissance d’une thérapeute sexuelle pur handicapé…

The Sessions est le gentil petit film indépendant inoffensif que l’on retrouve annuellement aux Oscars sans qu’il ait fait trop de bruit jusque-là. C’est aussi et surtout un projet osé, adaptation d’un sujet délicat par le biais de l’histoire vraie de Mark O’Brien, un handicapé à vie par une polio ravageuse contractée étant jeune, et qui avait raconté dans un essai intitulé On Seeing a Sex Surrogate, paru dans le Sun Magazine en 1990, ses premiers émois sexuels et notamment son travail, sur quelques séances, avec une éducatrice spécialisée. La sexualité chez les handicapés, l’étrange métier d’éducatrice sexuelle, autant de sujets pas évidents à traiter au cinéma rendant du coup d’autant plus louable le projet The Sessions, entreprise vraiment osée reposant sur un duo de comédiens pardessus le marché pas des plus vendeurs. D’un côté, Helen Hunt, excellente comédienne confirmée mais dont la carrière fonctionne aujourd’hui au pas et qui n’est pas la meilleure des stars pour mettre en lumière un petit budget de la sorte. Face à elle, pire, John Hawkes, comédien extrêmement talentueux mais qui n’a jamais vraiment eu droit aux premiers rôles. Typiquement le genre d’acteurs dont on voit le visage sans en connaître le nom parce qu’on l’a vu dans tous plein de films où il tenait… des seconds rôles. La réunion de ces deux acteurs est pourtant une idée lumineuse car le couple fonctionne à merveille grâce à une alchimie qui prend immédiatement. Et finalement, ce tout petit budget de seulement un million de dollars, et qui bénéficie de la présence également du toujours extraordinaire William H. Macy, « d’entrer dans la lumière », comme le dirait Patricia Kaas.

Réalisé par Ben Lewin, un ancien avocat qui a pas mal tourné de séries télé (Ally McBeal) et de téléfilms, qui signe ici son quatrième long-métrage après Georgia avec Judy Davis, Rue Saint-Sulpice (qui réunissait Jacques Villeret et Jeff Goldblum -??!!- ou Bob Hoskins et Michel Blanc -re ??!!- véridique…) et Lucy Break, The Sessions est le parfait exemple du joli petit film indépendant discret, mineur et anecdotique, mais pour le moins plutôt agréable et attendrissant du haut de sa belle histoire pleine de tendresse et de sensibilité.

Il est vrai que le sujet est assez facile en termes d’efficacité mélodramatique et que, s’il parvient à ne pas trop en faire et à rester sobre, Ben Lewin a toutes les chances de conduire son film à bon port. Et c’est ce qu’il fait, bien aidé il faut le dire par son tandem d’acteurs magnifiques. Helent Hunt donne de sa personne comme jamais (c’est simple, c’est seulement la deuxième fois de sa carrière où elle accepte de se dénuder à ce point) en endossant un rôle pas évident, à la fois exigeant et dérangeant, demandant des prises de risque jamais faciles pour une comédienne de son âge (presque 50 ans la demoiselle). Face à elle, John Hawkes fait un beau numéro d’acteur avec ce rôle fort (les cyniques diront que l’handicap est souvent payant en termes de prix glanés) et c’est presque étonnant de le voir ainsi écarté de la course à l’Oscar. Mais le meilleur viendra peut-être de William H. Macy, exquis dans le rôle d’un curé écoutant en confession le cheminement sexuel de son ouaille et y trouvant presque un certain suspens le rendant accroc à ses aventures avec son éducatrice sexuelle chargée de lui faire découvrir ce plaisir ultime.

The Sessions n’est pas, attention, un drame lourd et exagérément lacrymal, destiné à faire pleurer dans les chaumières. C’est une comédie plutôt légère prenant son sujet difficile par un angle plutôt gracieux et lumineux, à l’image du véritable Mark O’Brien. Un choix à la fois avec ses avantages et ses inconvénients. D’une part, il évite d’être taxé de faiseur de larmes et permet d’esquiver les attaques sur la facilité à provoquer une charge lourdement dramatique mais d’autre part, il requiert aussi de l’habilité et du savoir-faire pour ne pas basculer dans le mauvais goût. Ben Lewin s’en sort quant à lui à merveille. Certes, The Sessions ne restera pas dans les mémoires en raison de son absence de prise de risque, de sa sagesse relative et de sa naïveté, mais la subtilité de son histoire pleine de charme, de poésie et de volupté le mène à se muer en petite pilule de bonne humeur pleine de vie. Un vrai feel good movie où le cinéaste reste en constant équilibre entre pudeur et crudité, jamais vulgaire jamais voyeur, et en maintenant comme ligne directrice un optimisme communicatif tout en finesse et en justesse.

The Sessions parle de « l’amour pour tous », parle d’accomplissement de soi, de courage et de force intérieure qui, transformée en volonté de fer, permet de surmonter tous les handicaps. Facile ? Peut-être. Candide ? Sûrement. Mais là n’est pas la question. The Sessions n’a pas la prétention ni l’ambition de se poser en chef d’œuvre ou en grand film. Ben Lewin voulait juste rendre compte de cette étonnante histoire, de cet étonnant bonhomme qui, depuis le fin fond de son brancard, a accompli beaucoup plus que tant d’autres. Et ainsi de créer un écho, une résonance attendrissante chez le spectateur qui se souviendra, ému ou pas, de ses premiers émois sexuels. Avec beaucoup d’authenticité, de simplicité et de sincérité, The Sessions et ses formidables comédiens nous font passer un beau moment, rien d’exceptionnel, juste sympathique.

Bande-annonce :

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