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LES BONNES MANIÈRES de Juliana Rojas & Marco Dutras : la critique du film

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Carte d’identité :
Nom : As Boas Maneiras
Père : J. Rojas & M. Dutras
Date de naissance : 2018
Majorité : 21 mars 2018
Type : Sortie en salles
Nationalité : Brésil
Taille : 2h15 / Poids : NC
Genre
: Fantastique

Livret de famille : Isabél Zuaa, Marjorie Estiano, Miguel Lobo…

Signes particuliers : Un film fantastique brésilien fascinant.

LE LOUP-GAROU DE SAO POLO

LA CRITIQUE DE LES BONNES MANIÈRES

Résumé : Clara, une infirmière solitaire de la banlieue de São Paulo, est engagée par la riche et mystérieuse Ana comme la nounou de son enfant à naître. Alors que les deux femmes se rapprochent petit à petit, la future mère est prise de crises de somnambulisme… 

Comment ne pas être intrigué par les sublimes affiches conceptuelles de Les Bonnes Manières, drame de genre brésilien du duo Juliana Rojas et Marco Dutra ? Certaines nous pro-mettent des séquences qui vont nous éblouir, d’autres parlent d’un surprenant conte de fée mélangeant horreur, drame social, romance, voire comédie musicale ! Présenté au festival de Gerardmer, Les Bonnes Manières a su rallier une très large partie du public à sa cause, se forgeant ainsi une réputation d’ovni prodigieusement formidable déjà née à Locarno puis à L’Étrange Festival. De quoi susciter encore un peu plus la curiosité envers un film qui suit les pas d’une jeune infirmière de la banlieue de Sao Polo embauchée par une riche femme isolée prête à accoucher. Alors qu’elles se rapprochent et nouent une relation forte, les crises de somnambulisme de la future maman pourraient cacher une sombre réalité.

Atypique sur le fond comme sur la forme, Les Bonnes Manières est un film construit à double-temps. D’abord, une longue première partie très ingénieuse, qui renforce le mystère autour du film alors que l’on est bien incapable de déceler vers quoi il tend. Les Bonnes Manières avance, prend le temps de développer ses personnages, leur position dans l’histoire, leur relation, et distille très lentement des clés alors que l’on s’interroge. Vers quoi nous embarque ce drame lointainement teinté de fantastique ? Et puis vînt la rupture, le point central et l’ellipse. On n’en dira pas plus mais à mi-parcours, Les Bonnes Manières bascule, affirmant plus clairement son ancrage au cinéma de genre et à l’horreur, dévoilant ses atouts de film de loup-garou à la sauce Sao Paolo. Ce n’est pas la première fois que le tandem Rojas-Dutra s’amuse à détourner les codes d’un genre pour mieux explorer une certaine réalité sociale. Tout en étant un pur film de genre, Les Bonnes Manières parvient à être différent, utilisant avec parcimonie ses motifs horrifiques ou graphiques pour mieux décupler leur impact et les articuler à ce qu’il raconte en creux. En cela, le film de Juliana Rojas et Marco Dutras pourrait rappeler le récent Grave de Julia Ducournau, version sud-américaine. Mais derrière cette façade « lycanthropique », l’idée est surtout d’observer la lutte des classes dans un pays dichotomique, de se pencher sur la thématique des liens maternels et de retravailler celle sur la différence. Car l’une des idées originales de ces Bonnes Manières, c’est de faire de sa créature loup-garou, un être fragile ayant besoin d’être protégé se ses propres instincts.

Bourré d’audaces formelles au service d’une atmosphère fascinante et hypnotique, Les Bonnes Manières est un petit coup de génie, un film de contrastes capable de sublimes grands écarts gérés avec une adresse et une maîtrise folles. Tour à tour intimiste ou effrayant, film d’auteur ou vraie proposition de genre, tantôt ancré dans la réalité ou s’échappant dans l’imaginaire, ce singulier objet cinématographique magnifie son histoire en lui apportant une sorte d’étrange souffle romanesque et tragique, associé à une lancinante atmosphère angoissante, à des effets spéciaux peu nombreux mais efficaces et à un discours pas forcément nouveau mais très intelligemment conduit. Captivant de bout en bout, Les Bonnes Manières est un film de passerelles, à la fois d’un point de vue idéologique, stylistique ou thématique. Preuve que le cinéma est un champ d’infinis possibilités.

 

BANDE-ANNONCE :


Par Nicolas Rieux

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