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EL CLAN de Pablo Trapero : la critique du film

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note 2.5 -5
Carte d’identité :
Nom : El Clan
Mère : Pablo Trapero
Date de naissance : 2015
Majorité : 10 février 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : Argentine
Taille : 1h49 / Poids : NC
Genre : Thriller, Drame, Biopic

Livret de famille : Guillermo Francella, Peter Lanzani, Lili Popovich, Giselle Motta, Franco Masini, Gastón Cocchiarale, Antonia Bengoechea…

Signes particuliers : Ambitieux, El Clan ne se donne pas toujours les moyens pour concrétiser ses intentions.

PETITS MEURTRES EN FAMILLE

LA CRITIQUE

Résumé : Dans l’Argentine du début des années quatre-vingt, un clan machiavélique, auteur de kidnappings et de meurtres, vit dans un quartier tranquille de Buenos Aires sous l’apparence d’une famille ordinaire. Arquimedes, le patriarche, dirige et planifie les opérations. Il contraint Alejandro, son fils aîné et star du rugby, à lui fournir des candidats au kidnapping.Alejandro évolue au prestigieux club LE CASI et dans la mythique équipe nationale, LOS PUMAS. Il est ainsi, par sa popularité, protégé de tous soupçons.el_clan_film_3L’INTRO :

Il y aurait plein de façons différentes de présenter ce El Clan, thriller dramatique venu d’Argentine. En évoquant le fait qu’il s’est imposé en quelques semaines, comme le plus gros succès de l’industrie locale par exemple, ou alors, en soulignant la bienveillance paternaliste de ses producteurs de renom, les frères Almodovar, Pedro et Augustin. On pourrait également relever le fait qu’il reprend à son compte, un fait divers aussi authentique qu’incroyable, mentionner son sacre transalpin, avec le prix du Meilleur Réalisateur attribué à son auteur, Pablo Trapero (le pas mal Carancho il y a cinq ans) ou encore s’attarder sur son audace d’offrir à un comédien connu pour ses rôles comiques, l’occasion de briller dans une performance ô combien dramatique et inquiétante.el_clan_film_2L’AVIS :

El Clan nous plonge dans l’Argentine post-dictature des années 80 et nous emmène à la rencontre de la famille Puccio, désormais tristement célèbre pour avoir été au centre d’une vague d’enlèvements meurtriers malgré le paiement de rançons astronomiques par des victimes fortunées. Pablo Trapero aura mené de longues recherches pour nourrir avec le plus de fidélité possible, son biopic s’immisçant dans l’intimité de cette tribu horrifiante. Chez les Puccio, une apparente normalité régnait. Le père, Arquímedes, était un ancien des services de renseignements sous la dictature, désormais vieil homme mis au placard alors que le néo-gouvernement essayait d’oublier ce sombre passé appartenant à une Argentine d’avant, désormais en quête d’avancée vers la démocratie et de radical changement de visage. Le fils, Alejandro, était quant à lui une star de rugby, jouant même dans l’équipe nationale des Pumas. Enfin, la mère, comme les autres frères et sœurs, étaient toutes de banales personnes sans histoire. Et pourtant, derrière la façade propre de cette dynastie respectée, un fait divers effrayant, d’autant plus effrayant qu’il était à mettre à l’actif d’une famille bien sous tous rapports, dans laquelle certains participaient à l’horreur et d’autres, fermaient volontairement les yeux sur ces sombres agissements.el_clan-5Toute tentative de biopic solide sur ses bases, réclame un angle. C’est par le prisme de la relation liant Alejandro à son paternel, que Pablo Trapero a choisi d’aborder son sujet. Un fils placé sous la coupe d’un père manipulateur, aux allures de figure magnétique dirigeant un clan, tel un capitaine autoritaire. Chez les Puccio, Arquímedes était de ces patriarches à qui l’on ne dit jamais non, témoignant d’une emprise totale sur les siens au point d’en devenir aussi fascinant que terrifiant de froideur, malgré son amour évident pour les siens. Cette dynamique filiale essayant de lever un rapport conflictuel étouffé par un père machiavélique, cristallise des enjeux dramatiques sur lesquels va se superposer l’illustration d’une histoire vraie tirant vers un caractère quasi-surréaliste, de part la conjugaison de la normalité sociale de cette famille et de la violence du chemin qu’elle va emprunter. El Clan tend à peindre tout le côté irréel des actions commises par les Puccio, lancés dans une spirale criminelle alors que rien, ou peu de choses, pouvaient expliquer une telle destinée.el_clan_filmA la force d’une mise en scène inspirée, notamment quand Trapero emploie de façon saisissante le plan-séquence pour sublimer l’impact glaçant et sordide de son récit et de ses images, El Clan est une virée fascinante dans un malaise, essayant de s’intéresser autant au fait divers en lui-même dans sa généralité, que portant un regard personnel sur les relations intimes liant les membres de cette famille orchestrant l’inexplicable. Et Trapero de passer pas loin du grand film. Pas loin, car on aurait voir son auteur parvenir à un meilleur équilibre entre sa volonté de fresque clinquante à la Scorsese portée sur les rouages de cette entreprise criminelle, et son regard plus intimiste, focalisé essentiellement sur la relation père-fils lui permettant de nuancer l’horreur en apportant une dynamique conflictuelle. Œuvrant à cheval entre ces deux directions, Trapero délaisse pas mal de choses sur le bord de la route, alors qu’El Clan avance de façon très mécanique et superficielle, manquant parfois de subtilité narrative pour mieux mettre en valeur les interstices, tant de son histoire, que de sa progression. Hormis son duo mis en avant, les autres membres de la famille Puccio souffrent tous d’un traitement les reléguant trop en toile de fond. De même, en voulant conserver la part de mystère qui règne encore sur cette affaire au lieu de s’impliquer en apportant un regard personnel, Trapero distille trop de touches d’énigmatique, poussant son El Clan vers une certaine frustration. On aurait aimé voir le cinéaste davantage mettre l’accent sur les motivations profondes d’Arquímedes Puccio, davantage s’intéresser aux rôles tenus par le reste de la maisonnée, mettre plus en exergue le contexte politique ou pousser plus loin, la peinture du cheminement propre à chaque personnage. El Clan est aussi pertinent sur certains points précis, qu’il ne s’avère incomplet sur d’autres, enchaînant les grandes lignes de son histoire sans trop s’appliquer à en peaufiner les plus petites, en plus de voir sa relation filiale mise en avant, cannibaliser le reste. Et finalement, on en vient à se dire que son évidente maîtrise formelle ne trouve pas un digne répondant dans une conduite narrative trop souvent traitée par l’anecdotique au lieu de se fondre corps et âme dans un sujet pourtant passionnant.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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