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STILLWATER de Tom McCarthy : la critique du film

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Carte d’identité :

Nom : Stillwater
Père : Tom McCarthy
Date de naissance : 2020
Majorité : 22 septembre 2021
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 2h20 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de Famille : Matt Damon, Camille Cottin, Abigail Breslin

Signes particuliers : Entre thriller et drame, un film au parcours surprenant, porté par un grand Matt Damon.

 

 

MATT DAMON DANSE LE MIA, PLANÈTE MARSEILLE

NOTRE AVIS SUR STILLWATER

Synopsis : Un foreur de pétrole débarque à Marseille du fin fond de l’Oklahoma, pour soutenir sa fille qu’il connait à peine mais qui purge une peine de prison, accusée d’un crime qu’elle nie avoir commis. Confronté au barrage de la langue, aux différences culturelles et à un système juridique complexe, Bill met un point d’honneur à innocenter sa fille. Au cours de ce cheminement intime, il va se lier d’amitié avec une jeune femme du coin et sa petite fille tout en développant une conscience élargie de son appartenance au monde. 

Matt Damon dans les rues de Marseille, chez Quick ou devant un match de l’OM au Stade Vélodrome, ça peut paraître improbable et pourtant, c’est bel et bien le programme affiché par Stillwater, nouveau long-métrage de Tom McCarthy (Spotlight) coécrit à plusieurs mains avec notamment le concours du français Thomas Bidegain (Les derniers Audiard, La Famille Bélier ou le biopic Saint Laurent). Stillwater s’inspire d’une histoire vraie, un fait divers qui avait défrayé la chronique en 2017, l’affaire Amanda Knox. Étudiante américaine en Italie, Amanda Knox avait été condamnée pour le meurtre de sa colocataire, crime dont elle se clamait innocente. Une histoire qui avait déjà inspiré le britannique Michael Winterbottom pour son épouvantable navet L’Affaire Jessica Fuller.

Avec Stillwater, McCarthy transporte l’histoire de l’Italie vers la France, planète Marseille en l’occurrence. Quel intérêt pour juste re-dérouler les balises d’un fait divers ? Eh bien justement, c’est exactement ce que ne fait pas Tom McCarthy. Avec Stillwater, le cinéaste américain s’inspire lointainement de l’affaire Amanda Knox mais pour raconter tout autre chose. Son objectif n’est pas de refaire l’histoire, d’en explorer les zones d’ombre ou de retracer le procès, mais de s’inspirer des très grandes lignes de l’affaire pour en déplacer le centre de gravité de son histoire. Son film ne s’intéresse pas vraiment à l’étudiante accusée et encore moins à « l’affaire », mais aux proches qui, dans ce genre de situation, gravitent autour des protagonistes. C’est là tout le cœur de l’entreprise, parler des répercussions sur l’entourage, comment les proches vivent la chose, en l’occurrence ici, comment un père affronte le fait que sa fille est incarcérée dans un pays étranger, qu’elle clame son innocence et qu’il paraît terriblement impuissant. Comment il a aussi l’occasion de se racheter du paternel médiocre qu’il a pu être jusqu’ici.

En changeant d’axe, en déplaçant l’œil sur son scénario, Tom McCarthy fait d’emblée un choix intéressant : avoir quelque chose à raconter. Des histoires de meurtres, de procès, d’enquêtes pour prouver une innocence, on en a vu des dizaines voire des centaines, on connaît la trajectoire, les marqueurs, la méthodologie, rien de neuf là-dedans en termes de thématiques. En choisissant de s’intéresser aux victimes collatérales, le metteur en scène tient une thématique porteuse d’un peu de fraîcheur, une thématique où il y a plus de matière à creuser, à poser un regard curieux sur quelque chose d’attrayant, à impliquer et importer de l’émotion.

Stillwater est un film à deux temps. Sa structure, qui risque d’en dérouter plus d’un d’ailleurs, porte les marques d’une scission claire séparant une première moitié en mode « enquête » (comme une sorte de Taken contemplatif à Marseille) et une seconde qui semble vriller soudainement sur tout autre chose et briser ce qui a été entrepris précédemment. Mais en réalité, il n’y a pas de « cassure », ce virage amène juste une vraie originalité au récit. On n’en dira rien pour ne pas trop en dévoiler mais clairement, Stillwater bascule à mi-parcours dans quelque chose de plus intimiste que certains auront vite fait de trouver frustrant là où pourtant, le film se charge en dimension humaine et embrasse enfin un regard, un propos, une personnalité.

Véritable film de personnages, Stillwater fascine par la densité d’écriture accordée à chacun d’entre-deux. Refusant le blanc ou le noir, McCarthy et Bidegain ont travaillé sur les gris, sur les nuances qui composent l’âme humaine. Conjugué au passé, présent et futur, Stillwater explore le poids des décisions que l’on prend et les répercussions qu’elles engendrent. Ce sujet passionnant est ici travaillé selon une dynamique dramatique maîtrisée, avec tout ce qu’il faut de force, de sensibilité, d’émotion, et même de quelques notes d’humour (surtout dans le choc des cultures américain vs marseillais, choc jamais réduit à des clichés lapidairement balancés sans qu’ils n’amènent rien derrière). Porté par un immense -et intense- Matt Damon qui incarne avec force toutes les erreurs, fêlures et nuances de son personnage que l’on sent marqué, Stillwater passionne non pas par son suspens finalement secondaire, mais davantage par les trajectoires humaines qu’il introduit avec délicatesse et affectivité, à l’image de cette rencontre entre l’acteur et une Camille Cottin décidément de plus en plus populaire aux États-Unis (après avoir donné la réplique à Brad Pitt dans Alliés, place à Matt Damon ici, en attendant Jared Leto et Al Pacino dans House of Gucci).

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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