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RETOUR A SEOUL de Davy Chou : la critique du film

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Nom : Retour à Séoul
Père : Davy Chou
Date de naissance : 2023
Majorité : 25 janvier 2023
Type : sortie en salle
Nationalité : France
Taille : 1h59 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de Famille : Park Ji-minOh Kwang-rokGuka Han

Signes particuliers : Un film étrangement fascinant. 

Synopsis : Sur un coup de tête, Freddie, 25 ans, retourne pour la première fois en Corée du Sud, où elle est née. La jeune femme se lance avec fougue à la recherche de ses origines dans ce pays qui lui est étranger, faisant basculer sa vie dans des directions nouvelles et inattendues. Librement inspiré de la vie de Laure Badufle.

 

CANET NE FILE PAS LA GAULE

NOTRE AVIS SUR RETOUR A SEOUL

Sept ans après son fascinant Diamond Island sur la nouvelle jeunesse cambodgienne en quête de repères, le cinéaste Davy Chou signe son grand retour avec Retour à Séoul, un second long-métrage de fiction dans lequel il est finalement encore question de quête de repères. Juste pas les mêmes. Si l’on craint souvent ce « film d’après » quand on a marqué les esprits sur un premier effort, pour le coup Davy Chou n’a visiblement eu aucun problème à confirmer son énorme talent. Pour Retour à Séoul, le franco-cambodgien s’est fortement inspiré de l’histoire d’une amie proche, née en Corée du Sud mais adoptée en France alors qu’elle n’avait qu’un an. 23 ans plus tard, elle était retournée pour la première fois dans son pays natal et y avait rencontré son père biologique. Une rencontre difficile qui n’aurait pas dû en appeler une autre. Et puis la vie a fait que. Davy Chou avait assisté à la seconde rencontre. Comme il le confesse, l’épisode l’a marqué. « Cette expérience m’a remué. Dans cet échange, il y avait tout un mélange d’émotions, de la tristesse, de l’amertume, de l’incompréhension, des regrets… Il y avait même une dimension tragi-comique car on sentait qu’ils n’arrivaient pas à se comprendre. On avait amené une traductrice et elle avait du mal à transcrire les élans de colère de mon amie, à les transposer avec la politesse réclamée par la coutume coréenne. Comme cette situation avait touché quelque chose de profond en moi, je m’étais dit qu’un jour, je réaliserais peut-être un film là-dessus. » Voilà, c’est désormais chose faite.

Confirmation. C’est clairement la chose à retenir de Retour à Séoul. Sur Diamond Island, Davy Chou avait laissé entrevoir une véritable intelligence dans sa manière de s’approprier un sujet qui lui parlait. Il récidive. C’était le désarroi d’une jeunesse cambodgienne dans Diamond Island, c’est la question de l’identité cette fois. Davy Chou est né en France de parents cambodgiens. Ce n’est qu’à l’âge de 25 ans qu’il a foulé le sol de la terre de ses ancêtres, se connectant ainsi à son identité enfouie. Exactement ce que va vivre son héroïne, laissant sortir d’elle-même des choses dont elle n’avait peut-être pas conscience, comme une forme de colère sourde.

Retour à Séoul est une histoire d’abandon dans tous les sens du terme. D’abandon il est forcément question dans un film qui traite de l’adoption et des blessures et questionnements qu’elle peut engendrer. D’abandon il est aussi question dans la manière de se projeter dans le film de Davy Chou. Retour à Séoul est comme ces gondoles à Venise glissant langoureusement sur les eaux de la Sérénissime avec, de temps à autres, quelques soubresauts dus au « traffic » ou aux virages abruptes. On y monte, puis on se laisse emporter, bercé par une mélodie clapotante qui peut évoluer en une fraction de seconde selon les imprévus qui se présentent. Ainsi fonctionne le film de Davy Chou. Il peut être calme, lancinant, prenant son temps pour dessiner subtilement un formidable portrait de femme. Et puis soudain, il se passe quelque chose, il accélère, devient aussi tempétueux que son héroïne en quête de repères, d’identité, d’une paix intérieure. A chaque angle de scénario, c’est le mystère sur ce qui nous attend.

Retour à Séoul repose en grande partie sur l’éblouissante performance de sa jeune actrice non-professionnelle : Park Ji-min. Artiste plasticienne, la jeune femme est une révélation tonitruante. Dans Retour à Séoul, elle est magnétique, volcanique, elle vampirise un cadre qui semble n’exister que par et pour elle. Probablement parce que, toute néophyte qu’elle soit, elle a beaucoup travaillé avec Davy Chou sur le scénario, quitte à lui faire déconstruire les choses pour mieux les reconstruire. Un sacré caractère qui se retrouve à l’écran. Retour à Séoul épouse sa mélodie intérieure, c’est avant tout Park Ji-min et un personnage fascinant. Ce n’est qu’ensuite un film somptueux, auquel on reprochera seulement une certaine froideur qui finalement, tient un peu à distance et ne génère pas vraiment une émotion à partager.

Film qui n’a de cesse de surprendre par sa grande liberté dans le ton comme dans le récit, Retour à Séoul est une étrange réussite, un film qui captive sans que l’on saisisse vraiment les mécanismes qui expliqueraient ce pouvoir d’emprise qu’il construit. Probablement parce que la réponse est à aller chercher encore du côté de son interprète.

 

Par Nicolas Rieux

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