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LA COUR DES MIRACLES de Hakim Zouhani et Carine May : la critique du film

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Nom : La Cour des Miracles
Père : Hakim Zouhani, Carine May
Date de naissance : 2021
Majorité : 28 septembre 2022
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h30 / Poids : NC
Genre : Comédie, Drame

Livret de Famille : Rachida BrakniAnaïde RozamSérigne M’Baye, Gilbert Melki…

Signes particuliers : Un portrait juste et très pertinent de l’état de l’éducation nationale aujourd’hui. 

Synopsis : Jacques Prévert, école primaire en Seine-Saint-Denis, est menacée par l’arrivée d’un nouvel établissement scolaire bobo-écolo flambant neuf. Zahia la directrice de l’école, en quête de mixité sociale, s’associe à Marion, jeune instit pleine d’idées, pour créer la première « école verte » de banlieue et attirer les nouveaux habitants. Mais pour ça, il va falloir composer avec une équipe pédagogique disons… hétéroclite, et pas vraiment tournée vers la nature.

 

EDUCATION NATIONALE A L’AGONIE

NOTRE AVIS SUR LA COUR DES MIRACLES

Sélectionné à Cannes où il a été présenté en avant-première dans le cadre des projections spéciales du cinéma de la plage, La Cour des Miracles est le premier long-métrage 100% fiction du duo Carine May et Hakim Zouhani, deux cinéastes qui depuis dix ans, s’inspire de leur ville d’Aubervilliers pour créer principalement des courts-métrages. Leur notoriété remonte à 2011 et le film Rue des Cités, un « court long-métrage » à cheval entre le drame et le documentaire. C’est toujours avec cette volonté d’illustrer les problèmes de leur région, qu’ils ont écrit ce feel good movie observant un sujet de société grave avec une bonne humeur communicative, toutefois sans que la comédie n’étouffe l’impact d’un propos sérieux. Direction une école primaire abandonnée par les pouvoirs publics et désormais menacée par l’implantation prochaine, à proximité, d’une résidence huppée comportant une école élémentaire écolo-bobo. La directrice et ses professeurs (de fortune pour certains) vont tout faire pour se battre, sauver leur école et l’importance de la mixité sociale.

Pour faire simple, si l’on devait définir La Cour des Miracles, on pourrait l’en rapprocher du cinéma de Louis-Julien Petit (Discount, Les Invisibles, La Brigade) en cela que le film de May et Zouhani utilise à peu près la même formule mêlant sujet sociétal, comédie, pointe de drame et propos social engagé. A quatre mains, le tandem tricote un film positif, dénonciateur mais porteur d’espoir et de promesses. Beaucoup de rires et peut-être quelques larmichettes viennent donner du liant à une fiction parfois coupable de facilité dans l’écriture mais totalement graciée par sa modestie et sa sincérité. Car au fond, le duo de cinéastes ne donne jamais dans le cynisme cinématographique. Leurs intentions louables transpirent de leur petite comédie aux allures de mignonnerie attachante en apparence, mais dont la pertinence explose à l’écran. Le sujet de fond ne se dessine jamais « au détour de », il s’impose constamment comme le cœur essentiel du récit d’un film à l’engagement vaillant. La Cour des Miracles se confronte avec clairvoyance à certaines tares du système de l’éducation nationale. Dysfonctionnements, délitement du professionnalisme, inégalités et injustices, manque de moyens, danger d’un fonctionnement à deux vitesses, gentrification d’une partie du 93 au détriment de tout esprit de mixité sociale, au détriment d’écoles inconsidérées devenant ainsi les poubelles de leurs voisines plus huppées… Tels sont quelques-uns des fléaux que La Cour des Miracles pointe du doigt. Mais dénoncer est facile. Là où Zouhani et May sont intelligents dans leur démarche, c’est qu’ils ne se contentent pas d’enfoncer des portes ouvertes. Ils essaient de proposer des embryons de solutions. Ce ne sont peut-être pas des solutions miracles, elles ne sont peut-être pas idéales, bonnes ou même viables, mais ils soulignent bien l’idée que c’est en essayant que l’on parvient, c’est en cherchant que l’on trouve. Certainement pas en cloisonnant la misère pour éviter qu’elle entache « le reste ».

En recourant à la dialectique du « joli film engagé drôle et touchant » dont il coche bien toutes les cases, La Cour des Miracles fait mouche et parvient à se rendre important. Important dans ce qu’il dénonce, important dans ce qu’il imagine. Ici, l’idée est de s’inspirer de ce qui se fait ailleurs (plutôt que de réformer avec des œillères) et de lier ce qui peut l’être, ce qui incarne l’avenir : l’école et l’écologie, dont on sous-estime clairement l’utilité tant sociétale que pédagogique. Emmené par une formidable galerie d’acteurs, le film ne brille certes pas par son originalité narrative (très quelconque) ni par sa mise en scène (très illustrative), mais il compense son manque de « cinéma » par du cœur, par du sourire et surtout par un regard très éclairé sur son sujet (tout ce qui est montré est authentique, même les « profs » de fortune embauchés à Pole Emploi) avec l’envie de croire que l’on peut encore inverser la tendance et la dégringolade du système avec juste de bonnes idées, du positivisme et un peu d’envie. Fable politique et sociale à la fois drôle et alarmante, La Cour des Miracles est l’exemple parfait de ce que l’on appelle « un film utile ».

Bande-annonce prochainement

Par Nicolas Rieux

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