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IN FABRIC de Peter Strickland : la critique du film

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La Mondo-Note :

Carte d’identité :
Nom : In Fabric
Père : Peter Strickland
Date de naissance : 2019
Majorité : 20 novembre 2019
Type : Sortie en salles
Nationalité : Angleterre
Taille : 1h58 / Poids : NC
Genre : Épouvante

Livret de famille : Marianne Jean-Baptiste, Gwendoline Christie, Fatma Mohamed…

Signes particuliers : Un objet cinématographique unique.

DANS L’ESPRIT FOU DE PETER STRICKLAND

NOTRE AVIS SUR IN FABRIC

Synopsis : La boutique de prêt-à-porter Dentley & Soper’s, son petit personnel versé dans les cérémonies occultes, ses commerciaux aux sourires carnassiers. Sa robe rouge, superbe, et aussi maudite qu’une maison bâtie sur un cimetière indien. De corps en corps, le morceau de tissu torture ses différent(e)s propriétaires avec un certain raffinement dans la cruauté. 

Pour ceux qui ne connaîtraient pas le cinéma de Peter Strickland, autant prévenir que pénétrer dans ses œuvres est comme un voyage dans un bizarre déstabilisant. Son film d’horreur Berberian Sound Studio avait donné un bon aperçu de la singularité de son travail, le sensoriel The Duke of Burgundy avait confirmé que le cinéaste anglais ne faisait rien comme les autres. Cinq ans plus tard, Strickland revient au cinéma de genre avec In Fabric, un film d’épouvante reposant sur un postulat très simple. Une femme profite des soldes pour s’offrir une élégante robe rouge en vue d’un rendez-vous galant. Mais rapidement, la robe s’avère menaçante pour sa propriétaire. Sur le papier, on est face à un pitch de série B. Dans les faits, Strickland signe un long-métrage hypnotisant et ultra-esthétisant, lequel rend autant hommage au cinéma bis des années 70-80 qu’il ne plonge le spectateur dans une expérience viscérale et obsédante.

Dès les premières minutes, In Fabric déconcerte par la manière dont il filme son récit avec un amour invétéré pour les ambiances étranges croisant le chemin d’une épouvante sourde au charme kitsch presque drolatique, comme si David Lynch rencontrait Jess Franco. Une association improbable. Strickland n’a jamais déroulé ses intrigues en suivant un canevas classique prêt à séduire les amateurs de pulsations horrifiques faciles. Il leur préfère les atmosphères tordues, déformées et obsessionnelles, le déploiement de motifs graphiques envoûtants, la sensualité d’un érotisme quasi fétichiste. Le tout mélangé donne lieu à des œuvres iconoclastes, comme cet In Fabric qui berce le spectateur dans un biscornu magnétique. Ici, il est question d’une mère célibataire fascinée par la sexualité débridée de son fils qui couche avec une obscure femme glaciale (Gwendoline Christie), d’une robe rouge vif malveillante, de rites occultes menés par le personnel inquiétant d’une boutique de prêt-porter… Le plus fascinant est la manière dont Strickland fait évoluer son histoire au rythme d’un savoureux mélange des tons. In Fabric peut être très sérieux dans l’épouvante comme cette superbe et saisissante scène de possession d’un lave-linge, autant qu’il peut être niché dans un humour noir tour à tour abscons ou sarcastique quand il navigue autour de l’horreur. Comme quand son héroïne fait face à ses employeurs lunaires, invitant un esprit très « Terry Gilliam » dans ce qui pourrait être un film fantastique bisseux ou un giallo italien à la sauce Argento.

Mais au-delà de l’expérience formelle et sensorielle, In Fabric ne réussit pas à être le coup de maître qu’il laisse supposer pendant un temps. Pendant une heure, Peter Strickland subjugue, excite les sens, navigue entre stylisation, vertige et angoisse. Mais la faute revient à une seconde partie plus poussive, qui paye ses longueurs et surtout un virage certes audacieux mais aussi dangereux. Si la conclusion (réussie) rattrape un peu les choses, le film s’avère au final inégal et on regrette que Strickland ne profite pas de son sujet pour glisser un discours sur le consumérisme. Au moins, il nous offre à voir quelque chose de rare au cinéma, une vision artistique très personnelle.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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