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DÉSIGNÉ COUPABLE de Kevin Macdonald : la critique du film

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Carte d’identité :

Nom : The Mauritanian
Père : Kevin Macdonald
Date de naissance : 2020
Majorité : 14 juillet 2021
Type : sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 2h10 / Poids : NC
Genre : Drame, Biopic

Livret de Famille : Tahar Rahim, Jodie Foster, Shailene Woodley, Benedict Cumberbatch…

Signes particuliers : Intelligent et passionnant, un drame porté par un formidable Tahar Rahim.

 

 

DANS LES GEÔLES DE GUANTÁNAMO

NOTRE AVIS SUR DÉSIGNÉ COUPABLE

Synopsis : L’histoire vraie de Mohamedou Ould Slahi, un Mauritanien que son pays a livré aux États-Unis alors en pleine paranoïa terroriste à la suite des attentats du 11 septembre 2001. L’homme a passé des années en prison sans inculpation ni jugement. Il a retrouvé la liberté en octobre 2016.

2002, l’Amérique se lance à l’assaut des « terroristes » sur fond de vengeance post-11 septembre. Dans cette chasse impitoyable et aveuglée par la haine et la rancœur, nombreux « suspects » finiront dans les geôles de la tristement célèbre prison de Guantánamo à Cuba. Détenus sans la moindre forme de procès, interrogés sans relâche et torturés durant des années, ces hommes connaîtront le pire pour un résultat très douteux (une poignée seulement seront condamnés pour des crimes avérés). Parmi eux, Mohamedou Ould Slahi, un mauritanien emprisonné de 2002 à 2016. Il écrira de longues lettres à son avocate, lettres qui seront déclassifiées en 2012 et deviendront alors un livre, un best-seller mondial où le prisonnier raconte ce qu’il a vécu et surtout comment. D’accusé, Slahi est devenu témoin. Témoin de l’horreur d’un camp où la constitution américaine a été bafouée, où les droits de l’homme ont été ignorés, où la justice a été rangée sous le tapis.

Porté par un impressionnant Tahar Rahim qui a été nommé aux BAFTA et aux Golden Globes avant d’être injustement oublié des Oscars, Désigné Coupable (ou The Mauritanian en V.O, titre plus classieux que son cousin français sonnant très thriller de série B) marque le retour en grâce du réalisateur Kevin Macdonald, qui s’était un peu perdu dans des futilités depuis son excellent Le Dernier Roi d’Ecosse en 2006. Désigné Coupable est un exercice d’équilibriste que l’on pourrait qualifier de quasi-impeccable. Macdonald parvient à tenir avec une justesse saisissante sur un filin à cheval entre le drame biographique et le thriller judiciaire sans jamais basculer ni dans le risque de pathos de l’un, ni dans le danger du sur-sensationnalisme de l’autre. Parfaitement focalisé sur ce qu’il raconte et surtout sur son discours qui surplombe tout, des protagonistes à leurs histoires personnelles, Désigné Coupable n’est finalement pas le récit d’une destinée tragique, c’est plutôt et surtout un cri d’alarme adressé à l’Amérique. Un cri qui résonne d’autant plus fort à l’heure où le départ mouvementé de Donald Trump a secoué l’opinion publique et les médias au lendemain de « l’attaque du Capitole ». En racontant la trajectoire terrible de Mohamedou Ould Slahi, Kevin Macdonald interpelle sur l’importance de respecter la Constitution car elle est la garante de tout, d’un système, d’une démocratie, de la viabilité et de la dignité d’un pays. Tout ce que le camp de Guantánamo a bafoué odieusement et sans le moindre scrupule. Comme le martèle son avocate, génialement incarnée par une Jodie Foster tout en sobriété, il ne s’agit pas de défendre pas un homme ou un terroriste, mais de défendre un idéal de justice, de défendre le concept même de la justice.

Tour à tour interpellant, dérangeant, poignant, Désigné Coupable suit un parcours au balisage escarpé qui parvient à installer une connexion imperturbable entre ses protagonistes et le spectateur. De l’empathie, il y en a dès le départ et ce n’était pourtant pas chose aisée alors que le film nous introduit un suspect musulman, ancien d’Al-Qaïda et potentiel participant aux attentats du 11/09. Mais malgré cette présentation ambiguë, Kevin Macdonald nous attache à son Mohamedou Slahi. Autant qu’il nous attache à cet avocat de l’accusation (Benedict Cumberbatch), autant qu’il nous attache à ces avocats de la défense (Jodie Foster et Shailene Woodley). Le doute, l’envie de croire, la réticence, la gêne sont autant d’émotions qui traversent le film avant que le dénouement progressif nous aiguille sur la raison qui rendait cette histoire importante à être racontée. Et à l’arrivée, le film tout comme son sujet prennent une dimension le rendant majeur. Certes, Désigné Coupable n’est pas très original quoiqu’il parvienne à s’extirper des codes classiques tant du film carcéral que du film de procès (probablement parce qu’il raconte un non-procès justement) mais la conduite de Kevin Macdonald est souvent brillante et l’ensemble fait mouche car très habile dans sa gestion de sa narration, de son sujet et de sa mise en scène jouant intelligemment avec les points de vue.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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