Mondo-mètre :
Carte d’identité :
Nom : The East
Père : Zal Batmanglij
Livret de famille : Brit Marling (Sarah), Alexander Skarsgård (Benji), Ellen Page (Izzy), Toby Kebbell (Doc), Shiloh Fernandez (Luca), Danielle Macdonald (Tess), Patricia Clarkson (Sharon), Julia Ormond (Page)…
Date de naissance : 2013
Majorité au : 10 juillet 2013 (en salles) / 13 novembre 2013 (DVD chez 20th Century Fox)
Nationalité : USA, Angleterre
Taille : 1h57
Poids : 6,5 millions $
Signes particuliers (+) : Un honnête thriller dramatico-initiatique de bonne facture, écrit et réalisé avec sérieux et implication de sorte à relever un fond qui ne manque pas d’intéresser.
Signes particuliers (-) : Pour bien faire, il aurait manqué à ce The East, juste un peu d’audace et de caractère. Un peu trop démonstratif, souvent assez naïf derrière son discours engagé et globalement très conventionnel, le lissage de son écriture est son pire ennemi et entrave sa bonne marche. Tiens, on dirait du Redford…
DIS MOI COMMENT TU CONSOMMES, JE TE DIRAI QUI TU ES…
Résumé : Ancien agent du FBI, Sarah Moss travaille désormais pour une agence de renseignement privée qui protège les intérêts de puissants hommes d’affaires. Elle reçoit pour mission d’infiltrer The East, un mystérieux groupuscule éco-terroriste qui s’attaque aux multinationales coupables de dissimuler leurs agissements criminels. Déterminée, ultra entraînée, Sarah parvient à s’intégrer au groupe malgré leur méfiance, et doit même participer à leur prochaine action. Mais plus elle vit avec les membres passionnés de The East, en particulier Benji, l’anarchiste, plus elle se sent écartelée entre les deux mondes et s’interroge sur elle-même…
The East est un film de débuts et de fin. Débuts, pour le réalisateur Zal Batmanglij qui signe là seulement son deuxième long-métrage après Sound of my Voice en 2011. Et fin, car il est l’une des dernières productions du cinéaste Tony Scott, décédé en août 2012, et qui n’aura jamais vu le produit fini de ce « thriller écologiste » nous emmenant sur les traces d’un groupuscule d’activistes radicaux menant des opérations commandos à travers les Etats-Unis pour faire éclater des vérités scandaleuses et des crimes envers la planète non punis. Cette plongée en immersion sur fond de mouvement baptisé Freeganisme (mode de vie communautaire reposant sur la gratuité et l’auto-suffisance) est narrée par le prisme d’une employée d’une agence de renseignement privée infiltrant un groupe d’anarchistes déterminés aux « opérations » aussi efficaces que médiatiques. C’est la charmante Brit Marling qui incarne l’héroïne du film, en plus d’occuper les fonctions de scénariste et de productrice dans une fiction à petit budget dessinant une réalité terrifiante. Alexander Skarsgard, Ellen Page ou encore Patricia Clarkson complètent la distribution.
The East fonctionne sur le schéma classique du parcours initiatique d’une jeune femme aux convictions ébranlés au contact d’une réalité qu’elle ne soupçonnait pas en s’engageant dans l’aventure pour laquelle elle a été missionnée. Si les deux co-auteurs se défendent de tout engagement politique affirmé, difficile de ne pas voir dans cette production indépendante, le fruit d’une mûre réflexion sur les dérives de nos sociétés actuelles faisant fi de la logique et de l’éthique, détruisant notre habitat sans vergogne au nom du profit, de l’égoïsme, de l’appât du gain ou simplement du désintéressement envers les conséquences de nos modes de vie. Au carrefour du film d’espionnage, du thriller social et du film politique, quoiqu’en disent ses auteurs, The East est un film acerbe, qui pose les bonnes questions en s’efforçant de rendre tout le monde concerné et en n’excusant personne dans son discours sur le fil d’une radicalité d’approche troublante. Effectivement, on reconnaîtra à Batmanglij et Marling une volonté de ne pas prendre parti et de laisser à chacun une liberté de jugement sur les actions dépeintes, mais la mécanique de l’histoire laisse néanmoins poindre un début d’idéologie prenant position, à peine déguisée.
Si The East s’essaie avec beaucoup de sincérité à une écriture et une mise en scène sous tension et oppressante, des maladresses dans sa dérive mélodramatique et sa facture globale auront vite fait d’en limiter l’impact. Proche du cinéma académique, faussement incisif et trop classiquement anti-conventionnel d’un Robert Redford, ce petit film aux faux airs ambitieux manque de souffle pour réellement nous étreindre avec son récit engagé qui n’a pas toute la rage qu’aurait mérité son traitement. Cela ne veut pas dire pour autant que Batmanglij rate son exercice et passe à côté de son sujet mais le manque de caractère et d’intensité et la naïveté qui sous-tend son arc dramatique couplée à sa relative sagesse, lui sont au final dommageable, là où cet effort aurait pu devenir un brûlot questionneur et palpitant décuplant la force de son propos. Reste un film honnête et emballé avec sérieux, intéressant sur le fond, plus maladroit sur la forme, entre son histoire engoncée dans son écriture trop réfléchie et ses quelques embardées démonstratives. The East aurait clairement pu être meilleur avec davantage d’originalité d’approche et d’audace dans ses prises de position. Pas mal mais inabouti.
Bande-annonce :
Par Nicolas Rieux