Mondociné

ROOM 237 de Rodney Ascher
DVD – critique (documentaire)

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21005320_20130513143435686.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxxMondo-mètre :
note 6.5
Carte d’identité :
Nom : Room 237
Père : Rodney Ascher
Livret de famille : Bill Blakemore, Geoffrey Cocks, Juli Kearns, John Fell Ryan, Jay Weidner (eux-mêmes)…
Date de naissance : 2012
Majorité au : 27/11/2013 (en DVD)
Nationalité : USA
Taille : 1h47
Poids : 300 000 $

Signes particuliers (+) : Un documentaire passionnant disséquant avec humour et cinéphilie l’une des oeuvres les plus ambitieuses et énigmatiques de l’histoire du cinéma en sillonnant dans des voies peu traditionnelles : le célèbre et non moins culte Shining de Stanley Kubrick. Extravagant, troublant peut-être, mais très pertinent.

Signes particuliers (-) : La forme déconcertante n’est pas forcément ce que le documentaire a du plus judicieux.

 

DU FILM À L’ANALYSE…

LA CRITIQUE

Résumé : En 1980, Stanley Kubrick signe Shining, qui deviendra un classique du cinéma d’horreur. A la fois admiré et vilipendé, le film est considéré comme une oeuvre marquante du genre par de nombreux experts, tandis que d’autres estiment qu’il est le résultat du travail bâclé d’un cinéaste de légende se fourvoyant totalement. Entre ces deux extrêmes, on trouve cependant les théories du complot de fans acharnés du film, convaincus d’avoir décrypté les messages secrets de Shining. ROOM 237 mêle les faits et la fiction à travers les interviews des fans et des experts qui adhèrent à ce type de théories, et propose sa relecture du film grâce à un montage très personnel. ROOM 237 ne parle pas seulement de fans d’un film mythique – il évoque les intentions de départ du réalisateur, l’analyse et la critique du film.

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L’INTRO :

Shining… Rien que le nom donne des frissons cinéphiliques et impose une sensation de mythe cinématographique absolu. Plus de 30 ans après sa sortie, le classique de Stanley Kubrick reste encore une œuvre marquante à l’aura puissante, qui ne laisse personne indifférent. Certains détestent, d’autres le portent au firmament d’un genre. Mais que l’on adhère ou pas à cette étrangeté unique et singulière, que l’on soit en émoi à chacune de ses redécouvertes ou qu’il rebute avec l’impression de voir un génie se fourvoyer, il est une chose qui est certaine, Shining est un incontournable du septième art, doublé d’une œuvre extrêmement riche, un de ces films que l’on adule ou auquel l’on accroche pas, tout en en percevant l’immensité à moins d’une mauvaise foi sans pareille.

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L’AVIS :

Room 237, c’est justement se rendre compte de toute la folie ambitieuse et torturée de Shining et explorer tout ce qu’on a pu rater dans ce chef d’œuvre aux portes dérobées infinies. Passionné lui-même par  ce monument de légende de l’épouvante, le cinéaste Rodney Ascher a décidé de lui consacrer un documentaire atypique donnant la parole à des fans et spécialistes et permettant à certaines théories marginales relative au film, de s’exprimer en toute liberté. Ils sont cinq, précisément, les intervenants de ce Room 237. Cinq « experts » ou autoproclamés ainsi, exposant des théories récurrentes à l’égard du film qui feront sourire de prime abord avant de passionner et d’impressionner par leur argumentaire étudié.

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Film obsédant, film malade, film complexe, film énigmatique, Shining nourrit depuis des lustres des théories plus dingues les unes que les autres. Et l’encre qu’il a fait couler aurait de quoi remplir une encyclopédie Universalis entièrement dédiée à sa légende. Room 237 en a choisi quelques-unes et les décrypte images à l’appui, avec quelques auteurs dont on serait presque tenté de se moquer si leur passion viscérale à l’égard du film ne nous captivait pas au plus point. Tantôt drôles, tantôt fascinantes, tantôt extravagantes mais toujours pertinentes, les visions proposées lorgnant toutes du côté de l’essai, représentent la quintessence du travail d’analyse filmique poussé, au point même de se confronter à ses limites. Ne verrait-on pas parfois, dans certaines œuvres aussi ambiguës que ne l’est Shining, ce que l’on a en réalité envie d’y voir ? C’est toute la problématique défendue par Room 237. Toujours est-il que les exemples étayant ces visions sont là. Et certaines nous poussent à s’incliner devant leur intelligence d’approche défendu avec conviction par une toile vertigineuse d’à-propos.

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Représentation du génocide indien, métaphore du génocide juif, illustration du mythe du minotaure, confession déguisée d’un Kubrick clamant ce qu’il n’a jamais pu clamer à voix haute sur sa possible (et légendaire) implication dans la réalisation du lancement d’Apollo 11 vers la lune et des soi-disant premiers pas de l’homme sur le satellite naturel… que veut dire Shining derrière sa seule histoire d’épouvante ? Superposition, numérologie, symbolismes, détails cachés, ruses et fausses erreurs volontairement glissées, Room 237 nous embarque dans une haletante quête de sens autour de l’un des films les plus mystérieux jamais réalisé. Et force est de constater que son étude révèle des choses sacrément troublantes. A l’arrivée, au terme de ces 107 minutes, Shining nous paraît plus énigmatique que jamais, plus vertigineux et hallucinant qu’on ne pouvait le penser. Et Room 237 d’être le récit d’une passion de fétichistes tournant à la possession mentale, superposé à une dissection passionnante et méticuleuse flirtant avec l’improbable sans jamais y verser grâce à la sagacité de ses arguments.

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Si la rhétorique employée est déroutante et discutable (on ne voit jamais les intervenants, tous cachés en voix-off derrière les images du film qu’ils commentent et d’autres films illustrant propos et situation) infligeant à ce documentaire un côté « original » qui ne lui sied pas toujours très bien, reste que le sujet est convaincant et, pour peu que l’on fasse un effort, nous ouvre vers des voies un brin extravagantes que l’on aurait pas forcément creuser de soi-même. Dans sa facture, Room 237 est un peu confus, pas loin du fourre-tout, et la rapidité de son débit de parole n’aide pas à toujours bien suivre les exposés et nous donne parfois l’impression de nous noyer dans ce maelström spéculatif. Mais le pari de nous confronter à l’immensité de Shining est réussi. Quand bien même l’on ne serait pas très fan, cette immersion nous interpelle au moins sur la richesse de cette œuvre culte dans une fiction sous forme de chasses aux indices, faisant la démonstration brillante que tout y était calculé avec la plus grande attention, y compris ce que l’on aurait pu prendre pour des faux raccords grossiers. Une façon réellement fascinante de redécouvrir Shining.

Bande-annonce :

Par Nicolas Rieux

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